Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/194

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Depuis que j’en reçus ma première blessure
Et que mon vieil oracle a péri de leurs mains !

J’aimais comme un aïeul cet arbre aux fortes branches ;
Il parlait à mon cœur de paix et d’infini ;
Je goûtais à ses pieds, sur un lit de pervenches,
Ce repos créateur d’où l’on sort rajeuni.

Je lui dois des sommeils plus féconds que mes veilles ;
Sous son ombre un jour pur se levait dans mon cœur ;
Mes chants volaient, pressés comme un essaim d’abeilles,
Et laissaient sur ma lèvre une étrange douceur.

Je ne sais quel parfum et quel souffle des choses
S’exhalaient et coulaient dans mon sang agité ;
Les paisibles esprits des chênes et des roses
M’armaient pour bien des jours de leur sérénité.