Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/90

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Qu’on donnerait peut-être à l’infirme, au vieillard ? »
Et les pierres volaient avec les cris lancées
Sur le noir étranger.

Et lui, de ses pensées
Distrait, parle, et, laissant à l’autre son erreur :
« Quel mal ici te fais-je ? où tend cette fureur ?
Qu’ai-je dit ? ai-je ôté rien des mains de personne,
Ou t’aurais-je envié l’aumône qu’on te donne ?
Ce seuil, tu le sais bien, si dur aux suppliants,
Ne peut-il pas tenir, hélas ! deux mendiants ?
Tais-toi, renonce aux coups, à l’insulte farouche ;
Si je frappais, ce poing te briserait la bouche,
Et du festin j’aurais, pour moi seul les débris. »

Mais, redoublant alors les pierres et les cris,
Le lépreux : « Écoutez ce bavard ; sur mon âme,
De même, au coin du feu, grogne une vieille femme
Viens, et je fais pleuvoir tes dents sous ce bâton ;
Et je veux te traiter comme le porc glouton
Surpris à dévorer les blés semés pour l’homme,
Et qu’avec son épieu le laboureur assomme. »
La foule du portique encombrait les degrés,
Passants, soldats, valets, par ces cris attirés ;
Et ceux-ci se penchaient au bord des balustrades,