Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/324

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C’est lui ! Pour vivre en nous s’oubliant à toute heure,
Lui qui prenait pour siens mes travaux, mes combats ;
C’est lui dont la pensée, onde supérieure,
Fertilisait la mienne, et ne tarissait pas !

De ces forêts vers moi je vous ai vu descendre
Ainsi qu’un blanc nuage, et glissant lentement ;
Le sol autour de vous s’éclaire d’un jour tendre,
De votre corps nouveau divin rayonnement.

Les plantes s’inclinant baisent vos pieds de neige ;
L’air est rempli d’oiseaux et de joyeuses voix ;
Les bois semblent marcher pour vous faire cortège ;
La nature vous rend votre amour d’autrefois.

Vous, calme et traversant son peuple qui s’assemble,
Vers moi sans lui parler vous voilà parvenu ;
Et, comme aux jours heureux où nous pensions ensemble,
Vous avez pris mon bras, cet appui si connu.

Et nous marchons tous deux en dominant la plaine
De mon pays natal, que je vantais souvent ;
Les monts à l’occident nous déroulent leur chaîne,
Beaux lieux que j’espérais voir avec vous vivant !

Vous m’êtes si présent que nous causons encore
D’hier et de demain, de nos projets nombreux :
Hélas ! comme si Dieu, dans un but que j’ignore,
N’avait pas déjà mis un monde entre nous deux !

Le mobile entretien vole en sa fantaisie
Des étoiles du ciel aux herbes des chemins ;
Nous parlons de mon cœur et de ma poésie,
Coursiers dont vous teniez les rênes dans vos mains :

Car je croyais en vous, que nul n’a su connaître !
Source au modeste flot qui dans l’ombre a coulé,