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A LA PENSÉE FRANÇAISE



bien, malgré la conviction de chacun, qu’une offre pareille est une demande, ne veut dire que ceci : employez-moi avec salaire, appointements. Pour l’instant, le ministre ne voulut pas user des talents de Victor Hugues. Mais lorsque l’année suivante on vint à monter la machine homicide des tribunaux révolutionnaires, la dénonciation devant en être l’âme, on dut naturellement songer à l’homme qui, au retour de longs voyages, s’était révélé par une dénonciation, et on en fit un accusateur public.

Petit de taille, marqué de la petite vérole, ce révolutionnaire avait dans le ton et les manières quelque chose de brusque et de saccadé, rendu plus apparent par un accent provençal fortement prononcé. Jamais il ne vous regardait en face ; mais lorsque, par hasard, ses petits yeux gris se rencontraient avec les vôtres, on y lisait un certain je ne sais quoi qui commandait la crainte, ou provoquait un sentiment répulsif.

Tel était l’homme auquel la Convention confia le gouvernement de la Guadeloupe, avec des pouvoirs illimités, ne relevant que de Dieu, qu’il niait, et de sa conscience révolutionnaire. Il avait pour collègue le citoyen Chrétien ; et, comme auxiliaire, outre onze cent cinquante hommes de troupes, une guillotine neuve, et le décret du 4 février 1794, portant abolition de l’esclavage dans les colonies françaises.


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On réunit à Rochefort les frégates la Pique et la Thétis, et le brick l’Espérance et cinq bâtiments de transport.

La petite troupe confiée aux Commissaires de la Convention avait reçu le nom de bataillon des Sans-Culottes. Elle était commandée par le général de division Aubert, lequel avait sous ses ordres Rouyer et Cartier.

Sortie de Rochefort à la fin de février, la division,