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LXIX
PRÉFACE.

blesse, et nous en avons tiré les conséquences qui découlaient naturellement de cette exposition impartiale. N’ayant pris pour guide que les inspirations de notre conscience, nous n’avons pas falsifié l’histoire, nous l’avons racontée, sans nous inquiéter de savoir si un fait demeurait à la charge ou était acquis au bénéfice d’un parti. Vitam impendere vero, telle pourrait être la devise du Grand Dictionnaire universel, si l’immortel auteur du Contrat social ne s’en était pas créé une propriété pour ainsi dire inaliénable, dont il serait prétentieux de revendiquer l’héritage.

Quant aux questions douteuses, à celles qu’on pourrait appeler des problèmes historiques, le Grand Dictionnaire universel les a étudiées avec une attention toute particulière, et toujours en s’affranchissant complètement des hypothèses et des préjugés. Sa profession de foi est tout entière contenue dans cette devise : Recherche de la vérité, toujours et quand même. Ni crédulité banale, ni scepticisme systématique, ni parti pris, ni opinions préconçues. Quand nos laborieuses investigations ne nous livreront pas une solution définitive, nous donnerons au moins le résultat des travaux les plus récents de l’érudition historique, en même temps que celui de nos propres recherches et des documents que nous possédons ou que nous aurons découverts.

Nous n’avons pas abordé avec une moindre indépendance d’esprit la biographie, répertoire universel où doivent entrer tous ces personnages divers qui ont mérité ou dérobé une part quelconque de célébrité, bonne ou mauvaise ; tous les acteurs qui ont paru un instant sur la scène du monde, tous les figurants de cette danse macabre qui défile à travers les siècles ; les petits comme les grands ; les morts et les vivants, depuis Adam, Sésostris et Manou, jusqu’à Mourawieff, Abd-el-Kader et Juarez. Nous avons donné à chaque article une étendue proportionnée à la valeur réelle du personnage, mais en nous renfermant, à l’égard des contemporains, dans les limites d’une appréciation courtoise, qui ne va jamais jusqu’à une complaisance calculée, et à travers laquelle, néanmoins, perce toujours et facilement notre opinion. La vérité ne gagne rien à être formulée brutalement, et il y a des susceptibilités qu’il serait injuste et quelquefois cruel de froisser, en invoquant le prétexte de l’impartialité, « On doit des égards aux vivants, a dit si justement Voltaire ; on ne doit aux morts que la vérité. » C’est sur ce principe que nous avons réglé nos jugements. Les personnages morts appartiennent, eux, complètement à l’histoire, et, pour un grand nombre de ces individualités qui ont laissé une trace éclatante, nous avons mis à contribution une foule de documents inédits, curieux, intéressants, qui jettent un jour nouveau et complet sur beaucoup d’événements restés obscurs et inexpliqués. Ici, nous n’avons obéi qu’à la sévère équité de l’histoire, sans admettre ces ménagements intempestifs ou ces atténuations complaisantes qui se produisent banalement dans presque tous les livres, et que personne ne prend plus au sérieux depuis longtemps. Nous écrivons pour les hommes qui veulent se renseigner et s’instruire, nous ne publions pas un Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle — ad usum Delphini.

Nous avons accordé à la géographie toute l’extension possible, en mettant à profit les auteurs les plus compétents, et surtout les relations modernes qui ont jeté une si vive lumière sur un grand nombre de difficultés restées jusqu’ici non résolues. Les excursions hardies des voyageurs contemporains, et, pour certaines contrées du globe encore peu connues, les plus récentes expéditions nous ont fourni des renseignements précieux et nous ont mis à même de rectifier des erreurs capitales, introduites dans cette science si importante par des récits exagérés ou incomplets, par des observations superficielles, par la difficulté d’étudier certaines régions, et, disons-le franchement, par la fantaisie des explorateurs. Sur les mœurs de tous les peuples, sur l’état de la civilisation, la force, les ressources et la population de chaque pays, sur les productions de chaque climat, sur le commerce et l’industrie de chaque État ; en un mot, sur tous les points qui se rattachent à la géographie physique ou politique, le Grand Dictionnaire universel présentera un ensemble de notions aussi neuf, aussi utile, aussi instructif et aussi complet qu’on puisse le désirer.

Quant aux sciences basées sur le calcul ou l’observation, telles que les mathématiques en général, la physique, la chimie, l’astronomie, la médecine, l’art vétérinaire, les sciences naturelles, chaque partie, chaque article comporte des développements qui suffisent à élucider toutes les questions, à éclaircir tous les doutes, dans la mesure, bien entendu, du degré de perfection auquel sont arrivées ces diverses branches de nos connaissances. Là où le génie de l’homme n’a pu encore réussir à sonder tous les mystères, nous n’avons pu que constater des résultats incomplets ; mais partout, du moins, nous avons signalé le point extrême qui marque la limite où le connu s’arrête, pour faire place aux hypothèses plus ou moins plausibles ; en sorte que le lecteur est certain d’avoir une statistique exacte, rigoureuse, de l’état actuel de la science. Parfois il ne trouvera qu’une ébauche, un dessin dont les formes ne sont pas encore accusées ; mais la reproduction en sera du moins fidèle et complète. Un ordre d’idées naît, un principe est en travail d’enfantement  : nous ne pouvons que faire pressentir des conséquences, préjuger des résultats ou indiquer, d’une manière hypothétique, le rôle futur d’un système ou d’une découverte dont on est encore à étudier la valeur et l’importance ; trancher péremptoirement des questions aussi délicates nous paraît contraire à la tâche que nous nous sommes attribuée, comme au-dessus de la portée de notre esprit.

C’est pour nous conformer à cette règle que, tout en faisant l’usage le plus libre de notre faculté de juger, nous nous sommes attaché à présenter au lecteur les doctrines philosophiques, religieuses, politiques et économiques, même les plus