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Elle y travaille négativement en rejetant tout ce qui est mal compatible avec 1 ordre nouvehu. Elle y travaille positivement, en consolidant chaque jour davantage les intérêts matériels et moraux que cet ordre nouveau a produits.

« C’est le travail négatif qui, à maintes reprises, décida de l’écroulement de monarchie) impériales et royales vainement établies ou rétablies. La force des circonstances réduisit toujours à des fonctions purement viagères ces hérédités prétentieuses qui s’adjugeaient l’avenir. On projetait des dynasties, et aucun règne n’a pu être achevé, ni aucun irince héréditaire hériter de la couronne qui ui était promise. Notre récente histoire éclaire le grand sens de Cronwell : lui mourut protecteur de l’Angleterre, parce qu’il ne s’en’fit pas le roi et no s’attribua qu’un pouvoir viager. Le pouvoir prétendu héréditaire de nos Cronrweils n’a servi qu’à les conduire à l’exil...

Il faut à la France des garanties qui lui assurent la conservation de ses intérêts modernes, de ses opinions modernes, de son développement moderne. La république seule

est sans incompatibilités, grandes ou petites, avec la pleine action et le plein accroissement de ces éléments. >

— IV. Pour compléter les traits généraux par lesquels nous avons essayé de donner une idée de l’institution monurehique, il ne serait pas sans utilité d’examiner jusqu’à quel point sont vraies les allégations des partisans de la monarchie, lorsqu’ils présentent ce mode de gouvernement comme le gouvernement par excellence. À les entendre, en dehors de la monarchie, il n’y a ni ordre, ni prospérité, ni grandeur pour un peuple. En dehors d’elle, il n’y a que troubles, agitation, anarchie et misère. Une pareille affirmationpeut-el !e soutenir l’examen ? Rien ne serait plus facile que de donner une interminable nomenclature de faits qui prouveraient absolument le contraire. Mais faire cette nomenclature ce serait faire l’histoire même des peuples qui ont accepté ou subi le gouvernement monarchique. Est-ce à dire que tout ait été mauvais dans cette institution ? Evidemment non ; car ce qui est absolument mauvais ne saurait durer. Mais, à moins qu’on ne soit doué d’une incurable mauvaise foi ou d’une crasse ignorance, on ne saurait nier les maux et les abus de tout genre que la monarchie a engendrés. En ce qui touche notre pays, ■ il ne faut qu’ouvrir nos annales, bien qu’écrites par des moines ou des historiographes, disait Camille Desmoulins, pour voir, malgré les panégyristes, qu’aucune histoire ne présente

une plus longue série de mauvais rois. • Nous n’entreprendrons pas d’énumérer les crimes commis par ces princes, les guerres désastreuses causées par leur ambition, les persécutions religieuses, la guerre des albigeois, la Saint-Barthélémy, les dragonnades, les misères du peuple provoquant de longues guerres sociales ; nous ne parlerons pas du despotisme écrasant qui pesait sur la nation, de la corruption des cours, des exemples de démoralisation donnés par les rois, des emprisonnements arbitraires, des lettres de cachet, de l’absence complète de liberté individuelle, des falsifications de monnaie, des confiscations, des privilèges odieux, des banqueroutes du Trésor qui faisaient dire à Boileau : Plus pale qu’un rentier

À l’aspect d’un arrêt qui retranche un quartier.

Nous n’insisterons pas sur l’insécurité sociale, sur les troubles incessants qu’on trouve à chaque étape de la monarchie. Pour juger cette institution, nous la prendrons dans son type le plus complet, le plus admiré, sous Louis XIV, et pour ne pas être accusé de partialité nous reproduirons l’opinion d’un monarchiste qui ne saurait être suspect : le comte de Montalembert.

Voici ce qu’il écrivait à propos des Mémoires de Saint-Simon : « En songeant à ce que la monarchie absolue avait fait de la société, il y a un demi-siècle, il faut l’avouer, on ne pardonne pas, mais on comprend tout ce qui a suivi. On prévoit la Révolution. Quelle autre fin pouvait-il y avoir à une telle perversion du pouvoir et de la société ?

■o Qu’on se représente ce qu’a vu Saint-Simon :

»Les deux premières nations catholiques du monde gouvernées sans contrôle et saris résistance, l’une par Dubois, le plus vil des fripons, l’autre par Alberoni, le rebut des bas valets, et le saint-siége réduit à faire de tous deux des princes de 1 Église.

La noblesse croupissant dans une mortelle et ruineuse oisiveté, lorsque le danger ou la mort ne venaient pas la puritier sur les champs de bataille.

« Le clergé atteint lui-même dans ses plus hauts rangs par la corruption, dupe de cette dévotion de cour, sincère chez les maîtres, commandée chez les valets et aboutissant sans interruption k une éruption de cynisme impie qui dure cent ans avant de s’éteindre dans le sang de3 martyrs.

La bourgeoisio pervertie par l’exemple d’en haut, par une longue habitude d’adulatiou et de servile docilité, à la fois mécontente et impuissante, incapable de résistance et do responsabilité.

La cation presque entière absorbée dans des préoccupations d’antichambre ; les institutions ébranlées, les garanties compromises,

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les droits enlevés k tous ceux qui en avaient au lieu d’être étendus à tous ceux qui en manquaient ; les têtes courbées, les cœurs asservis ; tous les individus ravalés au même néant...

Nous avons vu de nos jours bien des bassesses, bien des trahisons, bien des valets à tout faire... Mais, il faut le dire, ce que nous avons vu de plus triste et de plus honteux a toujours été bien moins triomphant, moins oppressif, moins accepté, moins toléré même que les déportements analogues de l’ancien régime.

■ Je parle ici, bien entendu, de l’ancien régime dans son sens restreint et véritable ; non du moyen âge, où il y avait de la liberté dans toutes les institutions et de la grandeur dans tous les caractères ; non de cette grande et superbe portion du xvn« siècle, antérieure a la révocation de l’édit de Nantes et au triomphe de l’idolâtrie monarchique. Je parle de cette mise en tutelle de toutes les forces sociales par la royauté qui produisit sur-lechamp 1 inévitable décadencé dont Saint-Simon fut le témoin indigné !

Sans remonter plus haut que 1700, sans descendre plus bas que 1850, nous avons le droit de reconnaître, en repassant l’histoire de nos pères, que nous n’avons pas été progéniem viliosiarem. Disons-le donc sans orgueil comme sans hésitation : notre société bourgeoise et libérale, sortie de la Révolution et façonnés par trente-cinq années de liberté régulière, malgré ses misères, ses mécomptes, ses éclipses et ses inconséquences, a mieux valu que la société française d’il y a cent cinquante ans. Un honnête homme, un homme d’honneur et un bon chrétien a dû s’y trouver plus à l’aise et marcher la tête plus haute. »

Nous nous arrêterons sur cette citation, en nous bornant à rappeler que, si la monarchie française antérieure à la Révolution a été loin d’être un idéal de gouvernement, la monarchie, sous la double forme constitutionnelle et césarienne, qui s’est offerte à nous depuis la Révolution, n’a pu fonder un gouvernement stable, exempt de troubles, donnant à la fois au pays la liberté et la sécurité.

Monarchie (db la.) (Délia monarchià], célèbre ouvrage de Dante, d’une grande vigueur de pensée, malgré les formes pesantes dont il est revêtu. Le De monarchià, selon M. Perrens, le dernier historien de la littérature italienne, est « un syllogisme régulier, ou plutôt, pour parler le langage de l’école, un épichérèine dont les trois propositions sont ; développées en trois livres : l° la monarchie est le gouvernement le plus propre à assurer la félicité du monde ; toute famille a son chef, toutes les facultés humaines sont conduites par la raison ; 2" cet idéal des gouvernements a été réalisé par l’empire romain et ne peut avoir disparu pour toujours, puisqu’il est suivant les vues de Dieu ; 3° il faut donc le rétablir entre les mains d’un empereur. • On voit quelles étaient les singulières théories énoncées par le grand poète italien, et démontrées par lui avec une rigueur logique plus apparente que réelle. Il serait, facile de reprendre les principaux termes de ce raisonnement et de montrer qu’il pèche par la base et que la conclusion dépasse les prémisses. Nous croyons qu’au xjxe siècle il n’est plus nécessaire de réfuter sérieusement une pareille thèse. La monarchie, forme idéale de gouvernement consacrée par l’histoire et par la volonté de Dieu I autant’d’idées, qui ont fait leur temps et qui aujourd’hui, -heureusement, ne sont plus k craindre. S’il reste encore quelques partisans clair-semés du système de Dante, nous osons affirmer qu’ils ne sont pas redoutables. Songeons k l’époque et au pays auxquels appartenait l’auteur du De monarchià. Le moyen âge était encore debout. La monarchie n’était-elle pas le salut contre la féodalité ? L’empire ne devait-il pas contre-balancer le saint-siége ? Dante avait compris que l’équilibre pouvait être établi entre le pouvoir laïque et le pouvoir sacerdotal par l’agrandissement dés droits impériaux. Il admirait cette Europe fortement constituée avec une double unité, unité politique, unité religieuse, formant, selon la parole du poète :

Un édifice, avec deux hommes au commet, Deux chefs élus, auxquels tout roî ne se soumet.

Ces deux moitiés de Dieu, le pape et l’empereur, Pierre et César

Dante ne se contentait pas de proclamer cet équilibre des deux pouvoirs ; il n’hésitait pas a fixer les rapports du sacerdoce avec l’empire et limitait à l’autorité spirituelle le pouvoir du saint-siége, rejetant « toutes les interprétations forcées que les papes faisaient de quelques passages de la Bible et plus encore les prétendues donations do Constantin et de Cnarlemagne, mettant enfin l’Église dans l’empire et non l’empire dans l’Église, a Pourtant, ce gibelin modéré n’excluait point les papes de Rome, il ne les envoyait point en captivité k Babylone, c’est-à-dire à Avignon. Il tenait pour légitime leur pouvoir temporel sur Rome seulement : étrange inconséquence, qui a duré bien longtemps, et

dont notre siècle même peut à peine triomfherl Dante, lui aussi, était un partisan de unité italienne, moins Rome. Mais Henri VII ne sut pas même réaliser l’idéal restreint que lui proposait l’auteur du De monarchià. Il ne

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sut point soumettre l’Italie au pouvoir Impérial et, après avoir ravagé la Toscane comme un aventurier, > il lâcha la proie pour l’ombre, » se fit couronner à Saint-Jean de Latran et mourut misérablement empoisonné, sans avoir su seulement comprendre la tâche héroïque à laquelle un homme de génie l’avait convié.

Monarchie française (OB LA.) depnla (On etuuli«*einenl jusqu’à no» jours, par M. le

comte de Montlosier, député de la noblesse aux états généraux (Pans, 1814, 3 vol. in-8°). En 1804, le premier consul, voulant réconcilier à son profit les adversaires et les partisans de la Révolution, chargea M. de MontloMer de composer un ouvrage où il rendrait compte : • îo de l’ancien état de la France et de ses institutions ; S" de la manière dont la Révolution était sortie de cet état de choses ; 3° des tentatives faites pour la combattre ; 40 des succès obtenus par le premier consul à cet égard et de ses diverses restaurations. » « M. de Montlosier, dit Aug. Thierry, homme d’une parfaite bonne foi, mais d’une conviction intraitable, était revenu de l’émigration plein des ressentiments de la grande défaite de 1791. Cette rancune qui débordait en lui, son imagination la refoulait au loin dans le passé, et toute la théorie de notre histoire en était empreinte.... Selon lui, le vrai peuple fiançais, la nation primitive, c’était la noblesse, postérité des hommes libres des trois races mélangées sur le sol de la Gaule ; le tiers état était un peuple nouveau, étranger à l’ancien, issu des esclaves et des tributaires de toutes les races et de toutes les époques. Jusqu’au xir8 siècle, l’ancien peuple avait seul constitué l’État ; mais depuis lors le nou’ venu peuple, entré en lutte et en partuge avec lui, 1 avait dépouillé graduellement de sou pouvoir et de ses droits, usurpation couronnée après six siècles par les résultats sociaux, du mouvement de 1789. Tel était pour M. de Montlosier le fond de l’histoire de France ; il croyait voir la vérité dans cette thèse passionnée, et ce fut elle qu’il appliqua intrépidement au programme du premier consul. Indépendant de caractère, il lit par ordre ce qu’il aurait fait de lui-même si la pensée lui en était venue.... Son ouvrage, qu’il termina en 1807, tendait à faire un axiome historique de la proposition suivante : Dans ses luttes de tous les temps contre la bourgeoisie et les communes, la noblesse française a soutenu une lutte juste et défendu des droits incontestables. > L’ouvrage de M. de Montlosier était ju3te la contre-partie du programme tracé par le premier consul. Soumis à une commission de censure, on lui décerna des éloges, mais on défendit de l’imprimer et il ne parut au jour qu’après lu chute de l’Empire.

Monarchie ■elon la charte (de la), par Chateaubriand (Paris, 1816, in-8°). Louis XVIII venait de dissoudre la Chambre des introuvables lorsque Chateaubriand publia ce livre. « Comme pair de France, écrivit-il, je dois la vérité à la France, et je la dirai ; comme ministre d’État, je dois dire la vérité au roi, et je la dirai. Mon devoir est de signaler l’écueil, de tirer le canon de détresse et d’appeler tout le monde au secours. Ce devoir est d’autant

Îilus impérieux, que la liberté de la presse et a liberté individuelle sont suspendues. »

La Monarchie selon la charte est divisée en deux parties, l’une théorique, l’autre ayant trait aux circonstances du moment. Dans la première, l’auteur, touten posantee principe : «Hors de la charte point de salut, > ne se gène nullement pour en attaquer les conséquences et pour dresser un formidable réquisitoire contre les ministres qui la font respecter. Voici comment il définit le rôle du roi dans le nouveau gouvernement : « Dans le gouvernement représentatif, dit-il, le roi est plus absolu que ses ancêtres ne l’ont jamais été, plus puissant que le sultan à Constantinople, plus maître que Louis XIV k Versailles. Il ne doit compte de ses volontés et de ses actions qu’à Dieu. Il est le chef ou l’évêque extérieur de l’Église gallicane. Il est le père de toutes les familles particulières en les rattachant à lui par l’instruction publique. Seul il rejette ou sanctionne la loi : toute loi émane donc de lui ; il est donc le souverain législateur. Il s’élève même au-dessus de la loi, car lui seul peut faire grâce et parler plus haut que la loi. Seul, il nomme et déplace les ministres à vo !onté ? sans opposition, sans contrôle : toute administration découle donc de lui, il en est donc le chef suprême. L’armée ne marche que par ses ordres, seul il fait la paix et la guerre. Ainsi, le premier dans l’ordre religieux, moral et politique, il tient dans sa main les mœurs, les lois, l’administration, l’année, la paix et la guerre. Il est si bien tout par lui-même, qu’ôtez le roi, il n’y a plus rien. » Chateaubriand passe ensuite k l’examen des qualités que doivent posséder les ministres, et il leur donne quelques conseils fort utiles. Mais donner des conseils n’est pas suffisant pour un homme comme Chateaubriand ; il lui faut, en outre, morigéner un peu tout le monde. La roi, les lois, les ministres n’échappent point k sa férule. Ce sont ces derniers surtout qui reçoivent les coups les plus rudes. À l’entendre, la duplicité, la mauvaise foi, l’anarchie sont k l’ordre du jour ; s’il n’était là pour la sauver, la Révolution perdrait la France. Le seul remède, c’est le système qu’il propose : « La religion base du nouvel édifice, la charte et

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les’honnêtès gens, ’les choses politiques’de la < Révolution, et non les hommes politiques de la Révolution. » En d’autres termes, il faut priver les hommes de la Révolution du fruit ■ de leur labeur’fet faire administrer leurs conquêtes par ceux-lk mêmes qui les ont combattus, et c’est là ce que l’auteur appelle « pro- : mulguer les vérités qui doivent servir de fondement k notre croyance politique ! » Afin de donner plus de force à son malencontreux système, il consacre la seconde partie de son œuvre à une diatribe sur les différents ministères de la Restauration, contre lesquels il dressé un long acte d’accusation’. La conclusion de ce réquisitoire est qu’il fautsau- ’ ver le roi malgré lui, parce qu’il est emprisonné dans les mailles du filet révolution», naire. La Monarchie selon la charte n’est, en résumé, qu’un violent pamphlet contre l’ordre de choses établi, et non l’œuvre froide et ; raisonnée d’un politique. ■ J

Monarchie constitutionnelle en. Fronce.,

(la), par M. Ê. Renan (1870, m-8<>). Le pre- :, . mier défaut de ce livre, c’est qu’il est ep.contr’àdiction théorique avec tout le passé du brillant écrivain. Après avoir si.judicieusement banni le surnaturel dé la critiqué’his-’1 torique appliquée aux origines des religions^1 il le replace a l’origine des sociétés et en fait’ le point de départ de la civilisation. Voici, .1 en effet, d’après lui, le principe d’où tout dé-v coulé : « Aux yeux d’une philosophie éclairée, la société est un grand fait providentiel ; èlléfest établie non par l’homme, mais par hiiiatùxe même, afin qu’à ia surface dénotre pln> [ nète se produise la vie intellectuelle et 1116- ’ raie. La société humaine, inère de tout idéal, est le produit direct de la volonté suprême, qui veut que le vrai, le bien, le beau nient’ dans l’univers des contemplateurs. • La coii-clusion rigoureuse de ces prémisses mènerait tout droit au gouvernement théocratique ; si. donc, partant de la Providence, M. Renan aboutit à la monarchie constitutionnelle, c’est par un manque absolu de logique. J

Laissant de côté ce point de.départ, puisque, en somme, l’auteur s’y dérobé pour arriver à une entre conclusion, le principal objet de son élude est d’établir la supériorité ; des idées pratiques, se développant progrèssivement dans les temps, sur les idées p^iro- ’ ment révolutionnaires, c’est-à-diré sur I idéal ; absolu, s’imposant de vive force à la politique. Il reproche aux chefs de la Révolution leur ignorance des conditions d’existence d’une nation ; il montre la liberté sombrant chez nous d’abord dans la Convention, puis ’ entre les mains d’un despote, parce que, sans souci des lois économiques, il fut fait table ’ rase de tout ce qui existait au profit de principes absolus. Au contraire, la liberté s’est fondée en Angleterre par les plus longs tâtonnements. Les faits, ici, donnent raison mi critique ; mais Us lui donnent tort lorsqu’il voit le salut daift la monarchie constitutionnelle, puisque aucun des essais tentés jusqu’à ce jour en France n’a encore réussi, et que ces essais, de 1815 à 1848, embrussent uno suffisante période de tâtonnements ; Aussi ■ M. Renan cherchè-t-il la cause de leur insuccès, non.dans l’essence de la monarchie constitutionnelle, qui est impeccable, selon lui,

mais dans des circonstances étrangères : ia Restauration était condamnée à périra cause de son origine ; le gouvernement de Louis-Philippe, battu en brèche par le* légitimistes et les républicains, devait s écrouler sous cette coalition fatale. Il serait bien plus juste de dire que ce sont les légitimistes qui ont tué lo gouvernement de Louis XVIII et de Charles X, de même que les orléanistes ont tué la monarchie constitutionnelle. Le manque d’éSprit politique dans la nation et des^fautes : communes k tous les partis ont fait tomber, tous nos gouvernements, de 1815 à ’1848. Est-il besoin, en ce qui regarde Louis-Philippe, de chercher les causes da sa chute ailleurs que dans la corruption électorale et dans sa confiance en ce fantôme appelé le pays légal, résultat de cette corruption même ? Les causes qui faisaient espérer k M. Renan, en 1870, l’avènement prochain et la consolidation assurée du régime parlementaire étaient : 1° l’impuissance du parti républicain ; 20 l’état de l’armement de la France ; 30 la développement des intérêts matériels. • Examinons un peu cela.

L’impuissance du parti républicain I « Je n’en méconnais pas les progrès depuis dix-sept ans, dit-il ; mais, fort seulement pour l’agitation, il est condamné à n’être jamais qu’une minorité par la température de la France au point de vue social et intellectuel. Le lendemain du jour où le parti radical aura jeté bas une monarchie, les journalistes, les littérateurs, les artistes, les gens d’esprit, les gens du monde conspireront pour en établir une autre, car la monarchie repond à des besoins profonds de la France. La France n’oxcelle que dans l’exquis ; elle n’aime que le distingué, elle ne sait faire que l’aristocratique. iQue voilà de belles raisons et comme M. Renan a- été bon prophète I La France entière est républicaine aujourd’hui, à trois ans de date du livre, et s’inquiète bien peu de ce qu’une poignée de jçurnalistes et do gen 3 du monde peuvent dire ou écrire.

L’état de l’armement I M. Renan voyait une grande cause de sécurité dans les chassepots et les mitrailleuses dont on commençait k parler secrètement. On sait co que nous a

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