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PILE.

Théorie de la pile. Volta, dès qu’il eut connaissance des expériences de Galvani et qu’il les eut reproduites, songea à attribuer les contractions observées sur te cadavre de te grenouille à l’électricité développée dans l’arc métallique qui servait a mettre en communication les nerf3 lombaires avec les muscles cruraux ; et ces commotions se trouvant plus fortes lorsque l’arc était formé de deux métaux différents, il admit que c’était le contact de ces métaux qui dégageait l’électricité en les constituant l’un à l’état positif, et l’autre à l’état négatif, de sorte que la commotion produito était simplement due à la recomposition des deux électricités à travers le corps de l’animal. C’est ainsi qu’il fut conduit à l’hypothèse suivante : le contact de deux substances hétérogènes quelconques donne naissance à une force électro-motrice qui sa manifeste par la séparation d’une partie de leur fluide neutre et s’oppose ensuite à la recomposition des deux électricités contraires dont elles se sont chargées respectivement. Cette force électro-motrice constitue 1 une des substances à l’état positif, l’autre à 1 état négatif, et la différence algébrique des deux électricités dont elles sont chargées resta constante, toutes choses égales dailleurs, de sorte que, si la charge de l’un des corps augmente par une raison quelconque, celle de l’autre diminue d’autant. Les deux substances en contact peuvent se charger tle la mémo électricité, lorsque, par exemple, on les met en contact avec une source n’en produisantqu’une seule : mais l’une d’elles est alors plus chargée que 1 autre et la différence fourme encore la mesure constante de la force électro-motrice. La quantité d’électricité dégagée variant, toutes choses égales d’ailleurs, avec la nature des corps en contact, Volta les divisait en bons et- mauvais électro-moteurs, la première classe comprenant principalement les métaux, le charbon calciné, etc. ; la seconde les liquides, les corps organises, etc.

Cette théorie de Volta rendait bien compte des faits et, d’ailleurs, elle était basée sur des expériences concluantes. En effet, lorsqu’on sépare l’un de l’autre deux disques métalliques que l’on a mis en contact en les tenant par des manches isolants, on les trouve manifestement chargés d’électricités contraires, dont la présence est facilement mise en évidence à l’aide d’un électroscope.

Toutefois, l’explication aujourd hui adoptée des phénomènes observés dans la pile, sans être en contradiction complète avec l’hypo PILE

thèse de Volta, s’en éloigne cependant sur un point important.-Sans nier la mise en liberté de l’électricité par le contact des deux substances hétérogènes, on admet aujourd’hui que l’action chimique du. liquide acidulé sur le zinc a une influence prépondérante. Aussi, tandis que Volta considérait comme l’un des éléments de la pile le couple de deux rondelles de cuivre et de zinc, le regarde-t-on, au contraire, maintenant, comme formé des rondelles en contact de zinc et de drap mouillé, et considère-t-on les rondelles de cuivre comme servant presque exclusivement à relier entre eux les différents couples de la pilé et à conduire l’électricité de l’un à l’autre. Il est certain, en effet, que la pile fonctionne également bien lorsqu’elle est terminée à ses deux extrémités par des rondelles de même nature, cuivre ou zinc.

On nomme électrodes ou rhéophores de la pile les fils métalliques qui servent à mettre les deux pôles en communication. Le courant est censé aller du pôle positif nu pôle négatif,

l’île à auges. La disposition de la pile de Volta présente cet inconvénient, que le poids des rondelles métalliques comprime assez fortement les rondelles de drap pour en exprimer le liquide qui, en coulant le long de la colonne, entretient entre les deux pôles une communication par l’intermédiaire de laquelle le courant se produit aux dépens de celui qu’on voulait faire naître dans les rhéophores^ et, d’un autre côté, les rondelles de drap, bientôt desséchées, ne remplissent plus qu’imparfaitement l’office auquel elles étaient destinées. La pile à auges, qui peut être assimilée a une pile a colonne horizontale, est construite de manière à obvier, à ces deux inconvénients. Elle est établie dans une boite rectangulaire en bots, enduite intérieurement d’un mastic isolant. Les plaques cuivre et zinc, soudées entre elles deux k deux, sont implantées parallèlement aux petits côtés de la boîte à une petite distance les unes des autres et laissent entre elles des intervalles en forme d’auges, où l’on verse un liquide acidulé remplissant exactement les mêmes fonctions que celui dont on imprègne les rondelles de drap dans la pile à colonne. On établit la communication entre les deux pôles au moyen de fils métalliques fixés à des plaques de cuivre plongeant dans les auges ex-U-êmes. La théorio de cette piVeest identique à celle de la pile à colonne. Elle présente ce | grand avantage qu’il n’y a pour la mettre en

Fie- 3.

service qu’à verser le liquide dans les différentes auges. On le vide aussitôt qu’on n’en fait plus usage pour éviter l’usure, devenue inutile, des plaques de zinc, sous l’influence de l’acide.

l’île ù tasses. La pile à tasses se compose d’une série de tasses rangées ordinairement en ligne droite et réunies les unes aux autres par des arcs métalliques formés do deux parties, cuivre et zinc, soudées par leurs extrémités. Le premier arc plonge dans la première tasse par sa partie cuivre et dansa seconde par sa partie zinc ; le second plonge de même par sa partie cuivre dans la seconde tasse et par sa partie zinc dans la troisième et ainsi de suite. Chacune des tasses a été préalablement remplie du liquide aci-.

dulé nécessaire pour établir la communication entre les différents arcs. Le courant se tonneau moyen de fils métalliques plongeant dans ia première et dans la dernière tasse.

l’île deWotlaston. La pile à tasses est la plus incommode ; aussi ne s’en sert-on pas habituellement- nous n’en avons dit un mot que parce qu’elle peut être considérée comme le type rudimentalre de la pile de Wollaston, qui a joui presque exclusivement pendant ongtemps de la faveur des physiciens. Dans la ptle de Wollaston ou pile à bocaux, les arcs métalliques de lapî’/e a tasses sont fixés à une pièce en bois qui permet de les manoeuvrer tous en même temps pour les plonger dans les bocaux ou les en retirer. Ces arcs ont reçu, d’ailleurs, une disposition nouvelle

qui permet d’atteindre à une beaucoup plus grande énergie : chaque plaque do ziiiu, sou

Fig, «.

dée par une languette à la feuille de cuivre ou même élément (selon lo système de Volta),

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est entourée sur les deux faces par la feuille de cuivre de l’élément suivant, de manière à l’approcher de très-près, sans toutefois le toucher. Cette disposition a pour objet de faciliter la formation du courant intérieur. La pile se termine à ses deux pôles par un élément cuivre, la première plaque de zinc étant suspendue à une languette de cuivre qui communique avec le premier rhéophore et la dernière étant entourée par la dernière feuille de cuivre qui communique avec le second rhéophore. Le pôle positif correspond au dernier élément zinc, c’est-à-dire & la dernière feuille de cuivre qui plonge dans le dernier bocal sans toucher le dernier zinc. On ajoute habituellement a l’eau destinée à remplir les bocaux un seizième d’acide sulfurique et un vingtième d’acide azotique.

l’île de Mûnch. La pile de Wollaston a reçu de M, Mûnch, professeur de physique à Strasbourg, une jttîsposition plus simple : M. Mttneh fait plonger dans une même auge en bois, mastiquée à l’intérieur et remplie du liquide acidulé, l’ensemble des couples de Wollaston fixés à un même cadre en bois. La pile de Miiuch’présente un volume beaucoup moindre que la pile de Wollaston et ses effets sont aussi énergiques ; mais le courant s’y affaiblit plus rapidement.

Piles sèches. Les piles sèches, proposées en 1812 par Zkmboni, sont des piles à colonne dans lesquelles les disques sont extrêmement minces et ouïes rondelles acidulées soat remplacées par du papier qui contient toujours un peu d’humidité. On étame ou argenté des feuilles de papier sur une face et on fixe sur l’autre, à 1 aide d’un corps gras, de la poudre fine de bioxyde de manganèse ; quelques-unes de ces feuilles étant empilées de manière qu’elles présentent toutes le même métal du même côté, on y découpe avec un emporte-pièce des disques de om,02 ou 01»,03 que l’on empile les uns sur les autres, de manière toujours que les deux métaux soient alternés, et on les comprime fortement entre deux disques de cuivre, reliés par une tige qui traverse normalement tous les disques en leur centre. Les deux disques de cuivre qui terminent la pile an deviennent les pôles. Le pôle positif correspond au dernier élément manganèse et le pôle négatif au premier élément argent ou étain. Il faut au moins i, zoo à 1,800 couples pour former une pile capable de quelques effets exigeant une très-petite force, comme de dévier une feuiiie d’or suspendue verticalement ou une tige légère horizontale terminée par un disque de clinquant et pouvant tourner librement autour de son centre de gravité. Les plus fortes piles sèches ne peuvent donner ni commotions ni étincelles. Bohnembeiger les a utilisées h la construction d’un électromètre très-sensible. Cet éieetromètre, muni d’un appareil condensateur, se compose simplement d’une feuille d’or suspendue verticalement à égale distance des pôles contraires de deux piles sèches de même force. Pour peu que la feuille d’or soit électrisée, elle est attirée par le.pèle voisin de l’une des piles et repoussée par l’autre. On s’est servi aussi des piles sèches pour la construction d’appareils à rotation continue pouvant servir de jouets. Une même pile sèche peut rester en activité pendant un grand nombre d’années.

Piles à courants constants. La -pile de Wollaston, la plus parfaite de toutes celles que nous avons décrites jusqu’ici, présente deux inconvénients auxquels on a du chercher à porter remède : outre que l’énergie du courant y décroît assez rapidement, parce que le liquide en se saturant d’oxyde de zinc cesse de pouvoir remplir la fonction à laquelle il était destiné, ce courant même n’est que la résultante de deux courants opposés, 1 un seulement plus fort que l’autre. En effet, tandis que la force électro-niotriee qui se développe au contact des deux parties d’un élément cuivre et zinc oblige l’électricité positive à se porter sur le zinc et l’électricité négative à se rendre sur le cuivre, la réaction chimique, qui tend, il est vrai, à exciter à un plus haut point cette force électro-motrice, occasionne un courant inverse dans lequej l’électricité négative se porte sur le zinc et l’électricité positive sur le cuivre. Ce courant secondaire est dû à la décomposition de l’eau, dont l’oxygène chargé d’électricité négative s’unit au zinc, tandis que l’hydrogène chargé d’électricité positive se porte sur le cuivre pour se dégager ensuite eu bulles. Les piles dites à Courants constants, dont on se sert aujourd’hui, sont, non-seulement construites de manière à éviter les deux inconvénients qu’on vient d’iudiquer, mais encore elles présentent cet avantage particulier de ne fonctionner qu’autant que le circuit voltaïque est fermé, c est-à-dire précisément pendant que le courant est utilisé. Ce dernier perfectionnement a été obtenu en substituant au zinc ordinaire du commerce du zinc amalgamé. M. de La Rive avait déjà remarqué que le zinc parfaitement pur n’est attaqué par l’acide sulfurique étendu d’eau qu’autant qu’il se trouve en contact avec une lame de cuivre ou de platine plongée dans la dissolution et que les deux électricités peuvent se rejoindre ; on aurait donc pu éviter la déperdition du zinc et de l’acide, pendant que le courant n’est pas utilisé, en employant du zinc parfaitement pur ; mais un physicien anglais, nommé Kemp, a reconnu que le zinc amal PILE

gamô jouit do la même propriété que lo ziuc pur. Il suffit de le plonger une minute dajs le mercure pour lui faire acquérir cette espè*e de trempe.

l’île de Dauiell. La pile du chimiste anglais Daniell est la plus ancienne pile construite d’après les principes aujourd’hui en usage. Elle date de 1S36. La figure ci-jointe

Fig. B.

en reprêserite un élément. Cet élément se compose d’un vase en verre ou en porcelaine rempli d’une dissolution saturée de sulfate de cuivre, d’un cylindre de cuivre rouge ouvert aux deux bouts et percé, en outre, d’un grand nombre de trous, plongeant dans la dissolution saline, d’un vase cylindrique en terre de pipe assez poreuse, rempli d’acide sulfurique étendu d’eau et plongeant dans le vase de verre à l’intérieur du cylindre de cuivre, enfin d’un cylindre de zinc amalgamé» plongeant dans l’eau acidulée. La plaque de cuivre et le cylindre de zinc sont munis de pinces en cuivre dans lesquelles on peut fixer les fils qui doivent conduire le courant.

Aussitôt que les électrodes communiquent entre eux, le zinc est attaqué par l’acide sulfurique ; mais, tandis que la dissolution contenue dans le vase poreux s’appauvrit, comme dans la pile de Wollaston, par la production du sulfate neutre de zinc, elle se revivifie aux dépens de la dissolution de sulfate de cuivre, parce que l’hydrogène provenant de la décomposition de l’eau qui a dû fournir son oxygène au zinc, attiré vers le pôle négatif, traverse le vase poreux, décompose le sulfate dé cuivre pour s’unir k l’oxygène de l’oxyde et réformer de l’eau, et met en liberté une quantité d’acide sulfurique justement égale à celle qui s’est unie à l’oxyde de zinc. Cet acide sulfurique traverse le vase poreux pour se rendre au pôle positif zinc, et le cuivre mis en liberté se dépose sur le cylindre de cuivre.

La dissolution de sulfate de cuivre s’appauvrirait elle-même rapidement par î’effet de la réaction qu’on vient d’indiquer ; mois on a soin d’y plonger un excès suffisant de cristaux de sulfate de cuivre, renfermés habituellement dans une petite couronne cylindrique que porta à sa partie supérieure le cylindre de cuivre.

On obtient avec la pile de Daniel ! un courant presque invariable pendant plusieurs heures.

~l’île de Grave. L’élément de la pile de Grove se compose d’un vase de verre rpmpli d’acide sulfurique étendu d’eau, dans lequel plonge un cylindre de zinc amalgamé, ouvert à ses deux extrémités et fendu, en outre, dans toute sa longueur, et d’un vase pureux de terra de pipe rempli d’acide azotique ordinaire dans lequel plonge une feuille de pla Fig. 6.

tine recourbée en forme d’S. Dans cette pile le pôle négatif correspond au zinc et la pôle

ftositif au platine. L’hydrogène provenant de a décomposition de l eau passe dans le vase poreux, où il s’oxyde aux dépens de l’acide nitrique, qui passe a l’état d’acide hypoazoùque. La piïe de Grove est beaucoup plus puissante que celle de Daniel ! ; mais les effets sont moins constants, parce que l’acide azotique détruit n’est pas renouvelé.

— Piie de Bunsen. La pile de Bunsen, ou pile a charbon, ne diffère de la pile dé Grove qu’en ce que la feuille de platine y est remplacée par un cylindre de charbon obtenu pat