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chant, garde une sorte de gravité sentencieuse, qui rappelle un peu le ton de la polémique janséniste. « Au lieu de méditer la vie des saints et des apôtres, le monde a mis toute son étude à contempler et à tenir comme un trésor leurs os, chemises, ceintures, bonnets et semblables fatras, tant y a que le peuple qui se dit chrétien en est venu jusque-là qu’il a pleinement idolâtré en cet endroit, autant que firent jamais les païens. » En dressant le catalogue de ces saints dépôts, Calvin dénonce les prétentions rivales et s’amuse à mettre aux prises un corps avec deux ou trois têtes et cinq ou six bras. Ses impitoyables calculs donnent à une opération mathématique tout le piquant d’un bon mot et ruinent par l’ironie des chiffres le crédit des pèlerinages les plus respectés. « Tant y a qu’il y a un corps de sain ta Suzanne à Rome, en l’église dédiée de son nom, et un autre à Toulouse. Sainte Hélène n’a pas été si heureuse, car, outre son corps qui est à Venise, elle n’a guère de superabondant qu’une tête laquelle est à Saint-Gerion de Cologne. Sainte Ursule l’a surmontée en cette partie ; son corps premièrement est à Saint-Jean-d’Angely ; elle a ensuite une tête à Cologne, une portion aux Jacobins du Mans, une autre aux Jacobins de Tours, l’antre à Bergerac. De ses compagnes, qu’on appelle les onze mille vierges, ou en a bien pu avoir partout. » Cetto énumération, qui finirait par devenir monotone, est de temps à autre égayée par quelque anecdote plaisante, comme celle des bonnes gens qui offrent une chandelle au diable en même temps qu’à saint Michel, et qui ornent de fleurs, de chapeaux et d’affiquets les bourreaux de saint Étienne aussi bien que le saint lui-même. « Tout y est si brouillé, si confus, qu’on ne saurait adorer les os d’un martyr qu’on ne soit en danger d’adorer les os de quelque brigand ou larron, ou bien d’un âne ou d’un chat ou d’un cheval. » Les partisans des reliques répondaient bien que l’intention est tout dans cette affaire ; mais à quoi bon, dès lors, ces amas d’os à demi pourris que l’Église vend au poids de l’or et que les dévots crédules renferment dans des châsses magnifiques ?

RELIRE v. a. ou tr, (re-li-re — du préf. re, et de tire. Se conjugue comme lire). Lire de nouveau : Je n’ai jamais le courage de relire mes lettres, je ne me reprends que pour faire plus mal. (Mme de Sév.) Je relis l’Iliade ; ce tintamarre des dieux, des hommes, des chevaux, des chariots m’étourdit. (Mme Du Deffant.) Il n’y a de bon que ce qu’on peut relire sans dégoût. (Volt.) Malheur à tout livre qu’on n’est pas tenté de relire ! (D’Alemb.)

On relit un billet, monsieur, quand on l’envoie.

A. de Musset

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|| Lire de nouveau les livres de : Relire les auteurs latins. Lire et relire Voltaire.

— Fig. Repasser dans son esprit. : On ne comprend le livre de la vie que lorsqu’on a déjà tourné beaucoup de feuillets, et alors on n’a plus le temps de relire. (H. Lemonnier.) Une âme tranquille peut seule se plaire à relire sa vie. (Segur.)

Se relire v. pr. Etre relu : Il y a peu de romans qui puissent se relire. (Ch. Nodier.)

— Relire ce qu’on a écrit : Quel écrivain ose se relire sans trembler ? (Ch. Nod.)

RELIURE s. f. (re-li-u-re — rad. relier). Art du relieur La reliure est un des arts les plus importants pour conserver intacts les ouvrages précieux et originaux que les savants ont publiés et publient chaque jour sur les science, sur les arts, sur l’industrie et sur toutes les branches des connaissances humaines. (Lenormant.)

— Ouvrage du relieur ; couverture forte et rigide qu’on met à un livre, pour le préserver : Certains amateurs n’estiment dans les livres que la reliure.

Demi-reliure, Reliure dans laquelle le dos et les plats ne sont pas de la même matière.

Encycl. On sait que chez les anciens les livres se composèrent d’abord de feuilles collées les unes à la suite des autres, et que l’ensemble qui en résultait se roulait autour d’une petite verge, adaptée à l’extrémité de la dernière feuille. Ces livres roulés, ou volumina (volumes), étaient serrés dans un étui en peau ou en parchemin, quelquefois en simple papyrus, et n’étaient pas reliés. Les livres carrés, ou codices, ne furent en usage que bien postérieurement. A l’époque de Cicéron, la forme carrée existait pour les livres de compte et d’administration ; elle n’était pas employée pour les ouvrages littéraires, pour les ouvrages placés dans les bibliothèques. Au temps de Martial, c’était encore une noweauté. Les livres carrés se reliaient. On en réunissait les feuilles en les collant ou les cousant, soit avant qu’elles fussent écrites, soit après. Photius attribue l’invention de l’assemblage des feuillets à un Athénien, nommé Phillatius, auquel ses compatriotes auraient élevé par reconnaissance une statue. Chez les Romains, l’assemblage était fait souveut par des ouvriers dont c’était la profession spéciale et qu’on nommait glutinatores. Quelquefois l’opération étuit faite par les copistes eux-mêmes. Ou enveloppait ensuite les livres dans un morceau d’étoffe ou dans une sorte de couverture en bois. On les fermait soit au moyen d’une courroie, dans le sens de


la largeur ou de la longueur, soit au moyen de fermoirs. Si nous en croyons saint Jérôme, il y eut, dès le ive siècle, des livres reliés avec un grand luxe et revêtus de pierres précieuses.

MM. H. Géraud, dans son Essai sur les livres, d’Israéli, dans ses Curiosities of literature, et Ludovic Lalanne, dans ses Curiosités littéraires, ont donné sur l’histoire de la reliure des détails que nous reproduisons en partie.

Au milieu du ve siècle, nous voyons, entre les mains des dignitaires de l’empire, des livres reliés, couverts en cuir vert, rouge, bleu ou jaune et décorés sur un des plats du portrait de l’empereur. Bélisaire trouva, parmi les dépouilles de Gélimer, un recueil des Evangiles, orné d’or et de pierres précieuses. Le manuscrit des Pandectes, appartenant à la bibliothèque Laurentienne de Florence et que l’on fait remonter au vie siècle, est relié avec des tablettes de bois couvertes de velours rouge et garnies d’ornements d’argent dans le milieu et aux angles. Un évangéliaire grec du ixe siècle, appartenant à la bibliothèque de Sienne, a une magnifique reliure ornée de nielles. La reliure, dit M. Lalanne, étant un des moyens les plus propres à conserver les livres, il est probable qu’au moyen âge, où ils avaient une si grande valeur, tous les livres étaient reliés. Charlemagne accorda à l’abbé de Saint-Berlin un diplôme par lequel il l’autorisait à se procurer par la chasse les peaux nécessaires pour relier les livres de son abbaye. Au milieu du ixe siècle, Geoffroi Martel, comte d’Anjou, ordonna que la dîme des peaux de biches prises dans l’île d’Oléron serait consacré à relier les livres de l’abbaye qu’il avait fondée à Saintes ; et Guibert de Nogent raconte qu’après une visite faite aux chartreux de Grenoble par le comte de Nevers, ce seigneur leur envoya des cuirs de bœuf et des parchemins dont ils avaient grand besoin. On voit à la bibliothèque Laurentienne, à Florence, la copie que Pétrarque avait faite lui-même des Epitres de Cicéron. La couverture en bois de ce livre, garnie de fermoirs et de coins en cuivre, avait en tombant tellement blessé Pétrarque à la jambe gauche, qu’il fut menacé d’une amputation. Timperley rapporte que le manuscrit du Nouveau Testament sur lequel tous les rois d’Angleterre, depuis Henri Ier jusqu’à Edouard VI, prêtèrent serment en prenant possession du trône, se trouve dans une bibliothèque particulière à Norfolk. Il renferme les quatre Evangiles, écrits sur vélin les lettres, belles et bien formées, se rapprochent des capitales romaines. Il semble avoir été écrit et préparé pour le couronnement de Henri Ier. La reliure originale, dans un parfait état de conservation, consiste en deux tablettes de chêne de près d’un pouce d’épaisseur, assujetties avec des bandes de cuir les coins sont revêtus de métal, et un crucifix est placé sur l’un des côtés. » L’inventaire des livres de la bibliothèque du Louvre, fait par Gilles Malet à la fin ou xive siècle, offre des particularités intéressantes sur l’état de la reliure à cette époque. En voici quelques passages :

« Une carte de mer en tableaux, faite par mamière de une table painte et ystoriée, figurée et escrite, et fermant de quatre fermoers (fermoirs).

« Messire Guillaume de Maureville, qui parle d’une partie des merveilles du monde et des pays, couvert de veluyau ynde (velours bleu).

« Marcus Paulus, couvert de drap d’or, bien escript et enluminé.

« Josephus, en deux grands volumes, couverts de cuir blanc, à queue et à bouillon.

« Josephus escript en françois, en lettre de note, couvert de veluyau azuré, à deux fermoers de cuivre dorez, à tissus de soye.

« Un livre couvert de cuir rouge à empraintes, qui a quatre fermoers d’argent des armes de la reyne, qui est de Genesis et du roi Ninus et autres choses.

« Titus Livius en un grand volume, couvert de soye, à deux grands fermoers d’argent esmaillez de France.

« Valerius Maximus, couvert de soye vermille, à queue, très-bien escript et ystorié. Julien Frontin, en un cahier de papier, couvert de parchemin.

« Godeffroy de Billon, de la conqueste d’outre-mer, à deux colombes (colonnes), couvert de cuir blanc, à queue.

« Les Croniques de France, en deux volumes, couvertes de soye ynde à queue, et sont en deux estuys de cuir escorchiez aux armets de France.

« Unes croniques de France en françois, couverte de veluyau, à fleurs de lys, et bouillons d’argent, bien escriptes.

« La guerre du roi Philippe et des Flamens, en ryme, escript de forme, couvert de cuir à empraintes, à deux fermoers de cuivre.

« Le Livre du sacre des Roys, en latin et en françois, tous les misteres, vestures et officiers figurez et historiez, couvert de drap d’or terré, à fermoers d’argent. (Le roy l’a prins pour son sacre.)

« Un livre fermant à clef, couvert d’un cuir vermeil, d’un avis comme le pape ne l’Eglise ne pueent ne doivent avoir aucune cognoissance en ce qui touche le temporel du roy, du royaume de France, de la couronne, ne des appartenances.

« Un livre, nommé Royal, en latin, à une


chemise blanche à queue, à deux fermoers d’argent, que list et donna ai roy le patriarche d’Alexandrie, et est du roy Pietre (Pierre) et du roy Henri.

On voit par ce catalogue et par ceux des, riches biblithèques des ducs d’Orléans et de Bourgogne que les livres de luxe étaient recouverts d’étoffes ou de cuir. Les étoffes employées le plus ordinairement étaient le velours, la soie, le satin, le damas, de différentes couleurs, le plus souvent vermeilles, ornées fréquemment de fieurs brodées en or et quelquefois d’un grand nombre de perles. Le cuir blanc ou vermeil était d’un usage fréquent, avec des clous ou des plaques d’or, d’argent, de vermeil ou de cuivre doré sur les couvertures. Des fermoirs ou des agrafes, adaptés aux livres ainsi reliés, portaient les armes du propriétaire.

Parmi les reliures dont l’histoire de la bibliographie a conservé le souvenir, il ne faut pas oublier celles qui appartenaient à la magnifique bibliothèque de Jean Grolier, l’un des quatre trésoriers généraux sous François Ier. Vigneul-Marville écrivait à ce sujet au xviie siècle « J’en ai eu pour ma part quelques volumes à qui rien ne manque. Ils sont tous dorés avec une délicatesse inconnue aux doreurs d’aujourd’hui ; les compartiments sont peints de diverses couleurs, parfaitement bien dessinés, et tous de différentes figures ; dans les cartouches se voit d’un côté, en lettres d’or, le titre du livre, et au-dessous ces mots qui marquent le caractère si honnête de M. Grolier : J. Grolierii et amicorum ; et de l’autre côté cette devise, témoignage sincère de sa piété : Portio mea, Domine, sit in terra viventium. Le titre des livres se trouve aussi sur le dos entre deux nerfs, comme cela se fait aujourd’hui. D’où l’on peut conjecturer que l’on commençait dès lors à ne plus coucher les livres sur le plat dans les bibliothèques, selon l’ancienne coutume qui se garde encore aujourd’hui en Allemagne et en Espagne, d’où vient que les titres des livres reliés en vélin ou en parchemin qui nous viennent de ces pays-là sont écrits en gros caractères tout le long du dos des volume. Les livres à la reliure de Grolier n’ont rien perdu de leur prix. Les meilleures bibliothèques publiques se font un honneur d’en posséder. L’empressement des bibliophiles à les rechercher va toujours en croissant, comme l’attestent les prix élevés qu’ont atteint, de notre temps, quelques-uns de ces volumes dans les enchères publiques. En 1854, le Recueil des lettres de Pline (Alde, 1508, in-8o) a été adjugé à 1,106 francs ; le De sole de Marsile Ficin (1490, in-fol.), à 1,500 francs ; le Virgile d’Alde (1527, in-8o), a 1,600 francs ; les Adages d’Erasme (Alde, 1520, in-fol.), à 1,720 francs. En 1556, le Catulle d’Aldo (1515) est monté à 2,500 francs. La Bibliothèque nationale de Paris possède de beaux Grolier. Ceux qu’avaient réunis Renouard et Coste ont été dispersés ; mais il en existe encore deux remarquables collections celle d’un Lyonnais, M. Yemeniz, et celle d’un. Anglais, lord Spenser.

L’Angleterre possède aussi de riches reliures de la seconde moitié du xvie siècle, exécutées en partie d’après les ordres de la reine Elisabeth. On voit au Bristish Museum une Bible française imprimée à Lyon en 1566 et qui porte sur la couverture le portrait en miniature de cette princesse. Le Golden Manual of prayers, que la même reine portait suspendu à sa ceinture par une chaîne d’or, fut relié en or massif. Sur l’un des côtés est représenté le jugement de Salomon ; sur l’autre le serpent d’airain entouré des Israélites. Un autre livre, possédé par la bibliothèque Bodléienne d’Oxford, offre un précieux souvenir d’Elisabeth. C’est une traduction en anglais des épîtres de saint Paul. La couverture, en soie noire, fut brodée par la reine, à l’époque où elle était en prison à Woodstock, sous le règne de sa sœur Marie. Elle est remplie de devises. L’une des plus remarquables, placée au centre, à l’entour d’une étoile, porte ces mots : Vincit omnia pertinax virtus.

Les édits publiés contre le luxe en France vers la fin du xvie siècle n’y suspendirent que momentanément la richesse des reliures. Une ordonnance royale, signée par Henri III le 16 septembre 1677, excepta des édits la dorure des livres, en ne permettant toutefois que la dorure de la tranche, des filets d’or et une marque au milieu du plat. Cette ordonnance ne tarda pas à tomber comme les édits précédents ; mais on revint bien rarement aux reliures fastueuses qui donnaient à l’extérieur des livres l’aspect lourd et surchargé d’une chasse ou d’un reliquaire. Le goût n’y perdit pas. « À cette époque, dit Géraud, on avait déjà perfectionné au plus haut degré les reliures en cuir à filets et ornements d’or et de couleur ; la Bibliothèque du roi possède en ce genre des reliures de l’époque qui servent encore aujourd’hui de modèles. Vers le même temps, la sculpture et la ciselure avaient fait de rapides progrès. Les artistes s’exercèrent sur les reliures et revêtirent les missels et autres livres d’église de tablettes en bois, en ivoire, en argent, ciselées avec art et parfois incrustées de pierres précieuses. »

La reliure a fait peu de progrès dans les siècles suivants, sous le rapport de la beauté artistique ; mais sous le rapport de la main-d’œuvre elle a été heureusement modifiée par diverses inventions.


Nous allons maintenant entrer dans des,détails très-minutieux sur les procédés du métier, sans cependant avoir la prétention de faire un manuel professionnel sur l’art de la reliure.

Le premier soin de l’ouvrier relieur doit être de s’assurer si l’impression du volume est assez ancienne pour qu’il puisse le battra sans risquer de faire décharger, l’encre et de maculer les pages. Les cahiers mis en ordre, l’ouvrier en prend un certain nombre pour les battre. Cette opération doit se faire sur une pierre spéciale qui a reçu par suite de sa destinàtion le nom de pierre à battre ; elle est en pierre de liais ou en marbre. La pierre de liais est préférable parce qu’elle est plus lisse ; cependant, en mettant une chemise en papier fort à chaque buttée, l’inconvénient du marbre disparaît. La buttée se fait au marteau et à la main. Le marteau de relieur est une masse de fer dont la base carrée, nommée platine, a environ 0m, 10 de côté ; les arêtes sont arrondies dans tous les sens afin de ne jamais risquer de couper les feuilles en frappant d’aplomb. Cette disposition de la platine est nommée panse la pause donne plus de force au coup dans le milieu de la battée et ne permet pas l’écrasement des bords. Le marteau ordinaire pèse 5 kilogr. Pour battre, il faut beaucoup de force et d’adresse de la part de l’ouvrier ; tenant d’une main les cahiers, il lui faut constamment avec l’autre main soulever le marteau et le laisser retomber bien parallèlement à la surface de la pierre en ayant soin que chaque coup de marteau donné couvre les deux tiers du coup précédent. La battée se commence par le milieu et l’ouvrier tire à lui jusqu’à l’extrémité de la feuille ; il retourne alors le haut en bas, recommence le travail par le milieu et répète cette opération autant de fois qu’il est nécessaire pour faire passer chaque cahier de la battée sous l’effort du marteau. Si le marteau ne tombe pas bien d’aplomb, il produit dans le cahier des pinçures très-difficiles à faire disparaître. Après le battage, les battées mises en ordre sont soumises à une forte pression pendant plusieurs heures, sous une presse qui n’offre aucune disposition particulière et qui le plus souvent est mise en mouvement par un moulinet. En Angleterre d’abord, puis depuis peu d’années à Paris, le battage, qui exige beaucoup de soins de la part du batteur, est remplacé par un laminage entre deux cylindres polis. Ces machines réalisent une grande économie sur la main-d’œuvre, mais les ouvriers prétendent que le travail est moins bien fait. C’est après le battage que les gravures et les plans, s’il s’en trouve dans l’ouvrage, sont mis à la place qu’ils doivent occuper ; les mettre en volume avant le battage serait les exposer à être détériorés. Les volumes sont alors grecgués. Grecquer un livre, c’est faire sur le dos des cahiers des entailles destinées à loger la ficelles qui doit soutenir les coutures et qu’on désire ne pas laisser paraître au dos. Le grecquage se fait en plaçant entre deux ais le volume et donnant un trait de scie peu profond sur le dos à chacune des places où seront les nerfs. On ne doit grecquer que très-peu, ce système ôtant à la reliure une partie de sa solidité en rendant les feuilles plus faciles à déchirer. Les livres grecqués sont portés au cousoir. Le cousoir se compose d’une table dans laquelle on a pratiqué une fente transversale de 0 m, 01 ou 0 m, 02 de largeur, sur une longueur facultative. Aux deux extrémités de cette ouverture se dressent deux montants soutenant une barre qui les relie entre eux ; cette barre est mobile et cette partie du cousoir représente assez exactement un métier à tapisserie. Des ficelles pendent de la barre et passent au travers de la table par la fente indiquée plus haut. Les choses étant en cet état, la couseuse tend les cordes à l’aide de chevilles qu’elle place sous la table elle remonte ou descend la barre de soutien et s’assure de la rigidité de ses cordelettes. Les ficelles ont été placées à des distances calculées à l’avance pour coïncider avec les traits de scie du grecquage. On introduit les cordes dans les entailles et l’ouvrière coud alors les cahiers entre eux, en ayant bien soin d’entourer les ficelles d’un nombre de points de couture suffisant pour les fixer solidement aux cahiers. Les livres cousus, les ficelles sont coupées, en laissant de grands bouts des deux côtés ; ce sont ces bouts de cordes qui serviront à réunir les cahiers aux cartons. L’opération du cousage est la même pour les livres non grecqués et dans lesquels les ficelles cousues feront l’office de nerfs ; on remplace parfois les ficelles par des rubans de fil ou de soie pour les livres sans nerfs et non grecqués. À ce point du travail, on colle les gardes de couleur ; les gardes sont les feuilles de papier qui précèdent le titre à l’ouverture du volume et qui suivent la table à la fin. L’ouvrier coupe les couvertures de carton, les bat, les rogne du côté du dos, ou mors, et colle dessus une bande de papier plus ou moins large qui enveloppe l’épaisseur du carton à la partie rognée ; cette opération s’appelle raffiner le carton. Les couvertures ainsi préparées, on les place sur le volume ; en face de chaque ficelle, on perce trois trous obliques, le premier et le dernier du dedans au dehors, celui du milieu du dehors au dedans ; les cordes sont passées par ces trous et ramenées le plus fortement possible à l’intérieur du volume. Ce lacé fixe les couvertures


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