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tie aujourd’hui do notre musée national ; une troisième, au inusée du Belvédère, qui a été gravée par J. Maennl et qui mérite une mention toute spéciale, Car, bien qu’elle soit nue et de face, elle n’a absolument rien d’indécent ; son corps, en partie éclairé et en partie dans l’ombre, se penche en avant avec une grâce ingénue ; son visage, tourné vers l’un des vieillards, a une expression naïve d’étonnement et d’indignation. M. Viardot

Ïirétend qu’une Suzanne épiée par les vieilards, du musée de Madrid, est une des plus ravissantes créations de l’art, comme pensée, forme, expression, et qu’on ne peut réunir plus de modestie a plus de grâce, plus de pudeur à plus de séduction ; le calme parfait de cette belle jeune femme ne sert, d’ailleurs, qu’à mieux faire ressortir les agitations lascives des vieillards ; le plus âgé maintient avec précaution le feuillage a travers lequel il s’est glissé et fait signe à son complice d’éviter le moindre bruit ; celui-ci, a genoux et appuyé sur un bâton, s’avance comme en rampant... Un second tableau du Guerchin sur le même sujet est placé au palais Pitti. Dans un tableau du Bronzino, qui fait partie de la galerie des Offices et qui a été gravé par Fr. Dequevauvifter, le mouvement de Suzanne n’est pas exempt de coquetterie : assise au bord d’un bassin, un genou relevé et un pied dans l’eau, le dos gracieusement courbé et la poitrine tournée vers le spectateur, elle ramène son manteau rouge sur ses blanches épaules, sed cupit anle videri ; on aperçoit dans le fond sa camériste, qui s’enfuit en échangeant des regards de connivence avec les deux sénateurs blottis derrière une colonne. Il y a à la pinacothèque de Munich une gracieuse Suzanne au bain, par Annibal Carrache, qui a traité plusieurs autres fois ce même sujet en peinture et en gravure ; ses compositions ont été reproduites par d’autres graveurs, notamment par Gio-B, Mola, P. Monaco, Edme Jeaurat, J. Maennl. Un remarquable tableau de Suzanne et les vieillards, qui a fait partie de la galerie d’Orléans et de la collection Angerstein, se voit aujourd’hui à la National Gallery ; il a été gravé par J.-H. Watt, par A.-L. Romanet, etc. La National Gallery possède aussi une Suzanne du Guide, répétition d’un tableau qui a fait partie du cabinet de Reynst et de la galerie du duc d’Orléans et qui a été gravé par Corn. Visscher, P. Beljambe, Th. van Kessel, etc. Pour en finir avec les peintres italiens qui ont été tentés par la Chaste Suzanne, nous citerons : Martino Altamonte (galerie du Belvédère), le chevalier d’Arpino (gravé par J. Bouillard, dans la Galerie d’Orléans), Giovanni Biliverti (galerie de l’Académie des beaux-arts, à Florence), Guido dagnacci (gravé par J.-F. Beauvarlet, dans le Cabinet du comte de Br&hl), le Corrége (tableau appartenant au château de Rosenstein et qui a été gravé, vers 1864, par J.-Ch. Thévenin), le Dominiquin (au palais Corsini, à Rome), l’Empoli (au musée du Belvédère), Luca Giordano (dans la galerie de Dresde, gravé par J.-F, Beauvarlet, et au musée de Madrid), P.-F. Mola (gravé par J. Jenkins), Domenico Robusti (galerie de Dresde), Bernardo Strozzi (palais Spinola, à Gênes), le Titien (gravé en 1586 par G.-B. de Cavalleri), etc.

L’école espagnole ne nous fournit qu’un assez petit nombre de Suzanne au bain. Une des plus remarquables, peinte par Murillo, fait partie de la collection Madrazo, à Madrid ; c’est une belle créature, voilant sa poitrine avec ses bras croisés et levant vers le ciel des regards sûrs d’elle-même, tandis que les deux vieux débauchés cherchent à lui faire comprendre les inconvénients de la résistance.

Les deux plus grands maîtres de l’école flamande, Rubens et Van Dyck, Bous ont donné des Suzanne très-expressives, qui sont placées à. la pinacothèque de Munich ; elles méritent que nous leur consacrions des articles spéciaux. Celle de Rembrandt, que nous décrivons également ci-après, est belle surtout, par la lumière qui l’enveloppe. Les petits peintres de l’école hollandaise ont aperçu et mis en relief le côté égrillard de l’épisode biblique. Dans un tableau de W. Tan Mieris, qui est au musée de Bruxelles, Suzanne, près d’une fontaine ornée de la statue de l’Amour, se débat gentiment entre les bras des vieillards dont l’un lui tient le bras, tandis que l’autre arrache la dernière draperie qui la recouvre. Ce tableau a figuré successivement dans les collections Catalani,

Kaikbrenner et Le Roy. Un très-joli dessin de Mieris sur le même sujet, colorié sur vélin avec un fini précieux et daté de 1691, a figuré à la vente Simon (1862). Un tableau d’Adrien van der Werff, daté de 1715 et qui a fait partie des cabinets Beunengen, de Brunoy, d’Orsay, Poullain, etc., représente Suzanne assise sur un tapis de velours bleu galonné d’or et surprise par les vieillards au moment où elle puise des parfums dans un vase d’argent ; une pantomime expressive et une exécution minutieuse distinguent ce tableau, qui a été payé 4,300 francs à la vente Poullain, en ITilj et qui a été gravé par Avril l’aîné. Pour en finir avec les écoles du Nord, citons une petite Suzanne de Gottfried Schalken, payée 141 florins à la vente Van Eversdyke en 17G6, et une grande toile de l’Allemand PeV ; r de Strudel qui est au musée de Dresde.

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La plus célèbre des Su-anne de l’école française est celle de Santerre, qui appartient au Louvre, qui a été gravée par Porporati, par Gandoîfi, par Beisson, etc. (v. ci-après), et qui nous a valu une curieuse dissertation de Guizot. Cet austère puritain a cherché à prouver que les peintres avaient eu tort de représenter l’héroïne biblique dépouillée de ses vêtements et prête à entrer dans le bain : Il semble que rien dans le texte n’indique cette circonstance et qu’an contraire tout donne lieu de supposer que Suzanne n’avait point encore quitté ses vêtements. Ses jeunes filles venaient de sortir ; la porte du jardin était à peine fermée, car les vieillards s’étaient hâtés sans doute de saisir le premier moment ; ils n’en avaient point à perdre avant le retour des servantes... Une femme riche comme Suzanne n’anra-t-elle pas attendu pour se déshabiller l’arrivée des femmes dont l’habitude lui a probablement rendu le service nécessaire ? D’un autre côté, l’entretien des vieillards avec Suzanne porte un caractère tranquille et raisonné, peu d’accord avec la situation où les supposent les peintres. Ces hommes lui expliquent leur dessein et le danger qu’elle court si elle leur résiste. Suzanne, en soupirant, leur dit : « Je suis dans une grande angoisse ; si je commets ■ ce crime, je suis digne de mort ; et si je ne « le commets pas, comment échapperai-je à votre vengeance ? Mais il vaut mieux être punie sans l’avoirméritéque de péchercontre mon Dieu. » C’est là 1 expression triste, mais calme et résignée d’une situation cruelle ; mais des sentiments bien plus violents, bien plus troublés agitent la pudeur exposée aux regards qui la poursuivent, .. • Il va sans dire que Santerre s’est conformé à la tradition commune et a peint sa Suzanne toute nue ; cette composition était son œuvre de prédilection, et il avait entrepris de la reproduire lui-même en marbre, mais la mort l’empêcha de mettre ce projeta exécution ; il n’eut que le temps de faire un modèle en terre cuite, qui a appartenu au célèbre amateur Pierre Crozat.

Lagrenée a exposé au Salon de 1763 une Suzanne au bain, qui a été gravée par Helmann et que Diderot a louée en ces termes : o La Suzanne est placée à gauche, sur le devant ; on la voit de face. À droite sont les vieillards, l’un derrière elle, l’autre à côté ; ils sont bien groupés, et leurs têtes sont belles. Celui-ci lui dit du geste qu’ils sont seuls et loin de tout témoin ; l’autre lui caresse l’épaule d’une main. L’expression de la Suzanne est grande et noble. Elle dérobe sa gorge avec ses bras ; l’autre retient des linges oui descendent et couvrent ses cuisses. Les chairs sont vraies, les séducteurs encore frais et verts.» Le malin critique s’empresse d’ajouter : « Avec tout cela, la chasteté de la belle Juive eût été encore mieux avérée s’il n’y en avait eu qu’un et qu’il eût été jeune. Mais ce n’est pas là le conte. » Diderot a décrit beaucoup plus longuement et apprécié plus éloquemment encore une Chaste Suzanne exposée par Carie Vanloo au Salon de 1765 : « Placée entre les deux vieillards, elle est penchée vers celui qui est à. gauche et abandonne aux regards de celui qui est a, droite son beau bras, ses belles épaules, ses reins, une de ses cuisses, toute sa tête, les trois quarts de ses charmes. Sa tête est renversée. Ses yeux, tournés ver le ciel, en appellent du secours... La belle figure ! La position en est grande ; son trouble, sa douleur sont fortement exprimés ; elle est dessinée de grand goût ; ce sont des chairs vraies, la plus belle couleur, et tout plein de vérités de nature répandues sur le cou, sur la gorge, aux genoux. Ses jambes, ses cuisses, tous ses membres ondoyants sont on ne saurait mieux placés. Il y a de la grâce, sans nuire à la noblesse, de la variété sans aucune affectation de contraste... Plus de chaleur, plus de violence, plus d’emportement dans les vieillards auraient donné un intérêt prodigieux à cette femme Innocente et belle, livrée à la merci de deux vieux scélérats... » Il y a sans doute beaucoup à rabattre des éloges accordés par Diderot à cette Suzanne ; aujourd’hui, elle paraîtrait bien molle d’exécution et un peu théâtrale dans son attitude. Ce fut la dernière production de Carie Vanloo ; à la vente de son atelier, qui fut faite après sa mort, elle atteignit le prix de 5,000 francs. Parmi les autres peintres français qui ont traité le même sujet, nous citerons J.-B. de Troy (gravé par Laurent Cars et par Avril l’aîné), Séb. Bourdon (autrefois dans le cabinet du baron d’Holbach), J. Blanchard (gravé par P. Daret), Laurent de La Hyre (autrefois dans la galerie Fesch), Simon Vouet (coll. La Caze, au Louvre), Louis Dorigny (musée de Bordeaux), Vien (gravé par Beauvarlet), J.-B. Forey (musée de Dijon). Ch. Le Brun a peint une Chaste Suzanne, qui a fait partie de la galerie Fesch, et une Suzanne accusée par les vieillards, qui était autrefois au Pillais de justice de Paris. Un tableau de NoEl Coypel représentant ce dernier sujet se voit au musée de Madrid, et un autre d’Antoine Coypel appartient au Louvre. Notre musée national possède également un tableau de Valentin, reÏirésentant VInnocence de Suzanne reconnue ou e Jugement de Daniel. Le même sujet a été peint par un Hollandais, Gerbrandt van Eeckhout, dont la composition a été gravée par W. Baillle. De notre temps, la Chaste Suzanne a été peinte par Eugène Delacroix,

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J.-J. Henner (v. ci-après), N. Diaz, Th. Chassériau (Salon de 1833), Orner Charlèt (Salon de 1833), Alex. Longuet (Salon de 1841), Jeanron (Salon de 1852), Bourbon-Leblanc (Expos, univ., 1855), Ch. Moench (Salon de 1857), A. de Boucherville (Salon de 1869), etc.

W Histoire de Suzanne a été représentée en bas-relief par Fr. Briot sur la panse d’une aiguière d’étain qui appartient au musée de Cluny (n° 1365). iDes statues de Suzanne surprise au bain ont été exécutées par P.-N. Beauvallet (Salon de 1810), Ph. Grass (Salon de 1850), J.-B.-P. Cabet (Salon de 1861), V. Hnguenin (Salon de 1859). Proudhon a dit de l’oeuvre de ce dernier : « La Suzanne de mon compatriote Huguenin, s’élançant indignée hors du bain aussitôt qu’elle se croit aperçue, n’est pas la femme molle qui s’abandonne à la Providence. Ses formes, légèrement carrées, sont d’un type très-ferme, très-beau et fort rare, type qui donne à tous l’idée de la femme forte et vertueuse. On sent qu’elle ne se taira pas devant la calomnie, qu’elle saura accuser et faire trembler ses accusateurs. Elle semble dire :■ Les lâches 1 » On a’ envie de détourner les yeux en la voyant, tant sa dignité impose. Une beauté ainsi conçue se fait respecter tout de suite ; on sent que la volonté, la prudence, la conscience, 1 énergie, tout est là. »

Snsnnne au bain, tableau du Tintoret ; musée du Louvre. Ce tableau, qui, bien qu’incomplet, a été à cause de son importance

placé dans le salon carré, est une fière et solide peinture d’une rare puissance de ton. À gauche, Suzanne, assise sous des arbres, près d’un bassin, pose le pied gauche sur le genou d’une de ses servantes, qui lui coupe les ongles ; une autre femme placée derrière elle lui peigne les cheveux. On aperçoit dans l’éloignement, à droite, les deux vieillards debout près d une table. Des grenouilles, des canards, une poule et une foule d’animaux se jouent dans l’herbe et sur l’eau. » Ce tableau fut peint, sans doute, pendant ces fièvres de travail, ces emportements d’exécution qui, dit M. Viardot, firent donner au Tintoret le surnom d’iï Furioso. • Mais on y reconnaît, au premier coup d’œil, le maître éminent qui ambitionnait de réunir le dessin de Michel-Ange et le coloris de Titien. Cette toile faisait partie de la collection de Louis XIV et a été gravée par Landon.

Suinnns au bain, tableau de Paul Véronèse ; musée del Rey, à Madrid. Suzanne debout près d’une vasque, entièrement nue et voilant à moitié ses charmes sous les plis d’une draperie en soie blanche brochée d or, est sollicitée par les deux vieillards. Au fond on voit un palais et des jardins. Santerre, Carrache, le Guerchin et d’autres peintres ont traité ce sujet avec un grand talent, mais aucun ne peut lutter avec celui-ci pour la fraîcheur des tons et la richesse de la couleur. Comme toujours, suivant le goût vénitien, Paul Véronèse a donné à ses personnages des costumes de convention. « La vertueuse Suzanne, dit Duchesne, ne paraît témoigner aucun mécontentement ; elle semble s’expliquer avec tranquillité, et les vieillards ne paraissent pas non plus animés par une passion bien vive. » D’une autre part, ■ c’est, dit M. Viardot, une composition tourmentée, invraisemblable, où l’expression semble fausse de part et d’autre et comme intervertie, mais dont les défauts sont rachetés par l’irrésistible magie de la couleur, qu’il est difficile de porter à un plus haut degré de puissance. > Ce tableau a été lithographie par Paul Guiglielmi.

Suzanne on bain, tableau de Rubens, h la pinacothèque de Munich. La belle Israélite, assise sur un linge au bord de l’eau, se retourne avec effroi pour saisir ses vêtements ; un épagneul a éventé l’ennemi et accourt en aboyant ; l’un des vieillards regarde Suzanne à travers les branches d’un arbre ; l’autre,

Elus rapproché, escalade la balustrade du assiu et tend la main vers la baigneuse. Celle-ci a les formes plantureuses et les carnations affectionnées par Rubens. « Eclairé par un coucher de soleil à travers les arbres et fait au premier jet, sans corrections, sans retouches, ce tableau, dit M. Viardot, est un des miracles du coloris. » Il a été gravé par P. Pontius.

Rubens a traité plusieurs fois ce sujet, notamment dans des tableaux que l’on voit au Palais-Royal, à Gênes, et au palais Bartolommei, à Florence, et dans un très-beau dessin au bistre, terminé à l’huile, qui appartient au musée du Louvre. Des compositions représentant Suranné surprise par les vieillards ont été gravées, d’après lui, par Michel Lasne, par Quirin Marck, par Lucas Vosterman, par Christophe Jegher, par Spruyt, par Simon.

Suzanne au bain, tableau du Guerchin, au musée del Rey, à Madrid. Le Guerchin a très-heureusement rendu le plus charmant épisode du livre de Daniel. Les deux juges du peuple, que peut-être à tort on représente toujours comme deux vieillards, bien que le titre d’anciens que leur donne la Bible s’applique plutôt à leur dignité qu’à leur âge, au moment de Burprendre la jeune femme dans son bain, s’arrêtent pour contempler cotte chaste beauté. Entièrement nue sur le bord d’un bassin, la femme de Joachim, rem-

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plie de grâce et de séduction, est à la fois pleine de pudeur et de modestie. « Je reprocherai cependant à Guerchin, dit M. Viardot, la coiffure de Suzanne ; elle semble avoir les cheveux coupés d la Titus, ce qui la rend moins femme que si de longues tresses tombaient sur ses épaules. Sauf ce léger défaut d’arrangement, le personnage de Suzanne est une des plus ravissantes créations de l’art, comme pensée, forme, expression ; et par l’éclat de la lumière, par la force vraiment incomparable du clair-obscur, le tableau tout entier est une des œuvres les plus prodigieuses du maître qui fut appelé par ses contemporains le Magicien de la peinture. Elle égale assurément la Sainte Pétronille du Capitole. •

Suzanne au bain, tableau de Van Dyck, à la pinacothèque de Munich. La chaste baigneuse, assise près d’une fontaine, les cheveux épars, le visage effaré, se penche vivement en avant pour se dérober a l’attouchement de l’un des vieillards qui lui a mis la main sur l’épaule, tandis que l’autre lui arrache la draperie rouge dont le bas de son corps est couvert, et lui fait un geste de menace. « Cette femme, dit M. Lavica (Musées d’Allemagne), pourrait être plus belle de visage et de forme, mais le peintre a su rendre d’une façon saisissante l’horreur dont elle est saisie et l’énergie de sa défense. > Ce tableau a fait partie de la galerie de Dusseldorf et a été gravé dans le recueil consacré à cette collection.

Suzanne (la. chaste), tableau de Valentin ; musée du Louvre, n° 583. Le jeune Daniel a mis au grand jour l’innocence de Suzanne ; c’est ce moment qu’a rendu Valentin dans son tableau. À gauche, Daniel, assis sur un trône et se tournant vers la droite, étend la main vers un groupe placé en face de lui et semble donner l’ordre à un soldat de s’emparer du vieillard le plus rapproché de Suzanne. Celle-ci, les mains croisées sur sa poitrine, est accompagnée de ses deux enfants, dont le plus jeune la tient par sa robe. Toutes les figures, à l’exception de vcelle de Daniel, ne sont nues que jusqu’aux genoux. Au dire des plus grands critiques, ce tableau assigne au peintre un rang distingué parmi les plus grands coloristes. En outre, l’action est forte et animée, comme il convenait à ce pinceau énergique. Le vieillard ie plus rapproché de Daniel semble se récrier contre sa condamnation. La brutale passion dont il fut animé se révèle encore sur le visage du second accusateur, dont les soldats vont s’emparer. Quant à la chaste fille d’Helcias, si elle n’offre point à nos yeux une beauté accomplie, en revanche elle présente à notre admiration des traits empreints de candeur et d’innocence, et ses deux enfants sont dignes du Dominiquin. Le bras de Daniel, dit-on, est lourd et semble dessiné avec négligence, mais on s’accorde à considérer les mains, presque toutes en raccourci, comme des chefs-d’œuvre de vérité ; le ton général est ferme, chaud comme ceux des maîtres vénitiens, vif et habilement varié ; on voit enfin dans les chairs l’expression de la vie, et l’on admire avec quel art Valentin a su passer des teintes légères et transparentes aux ombres les plus fortes.’ Ce tableau, qui faisait partie de 1 ancienne collection, a été gravé parE.-G. Kruger dans le Musée français.

Suzanne au bain, tableau de Rembrandt, au musée de La Haye. Debout, un peu courbée en avant, Suzanne retourne vers le spectateur son visage qu’encadre une abondante chevelure rousse ; de la main gauche, elle ramasse vivement une draperie blanche, et elle ramène son bras droit devant sa poitrine, par un mouvement de surprise et d’effroi. Un de ses pieds est chaussé d une sandale brune, l’autre est nu ; elle a un collier et des bracelets de perles et une ferronnière d’or sur le front ; derrière elle, on ajperçoit sa robe rouge et sa chemise qu’elle vient de quitter, au bord de l’escalier du bassin, une aiguière d’or sur une pierre sculptée. Le visage de l’un des vieillards apparaît, au fond, k travers un feuillage sombre, et, sur la gauche, s’élève un palais d’architecture bizarre. « Tous ces entourages, dit Vf. Biirger, sont très-sacrifiés pour faire valoir la figure nue et lumineuse, qui n’est pas laide du tout et rappelle un peu la femme aux cheveux d’or du musée de Paris (n° 419). Peut-être bien est-ce le même modèle... Cette Suzanne, que Smith appelle ■ une production très-finie, » est, à la vérité, dessinée et modeléé avec soin, mais chaudement colorée, dans une gamme de tons roux qui monte du marron d’inde k l’orange. » Le tableau, daté de 1632, n’a guère plus de 1 pied et demi de haut. Reynolds, qui le vit dans la galerie du prince d’Orange en 1781, le considérait comme une étude pour une composition de plus grande dimension qu’il possédait lui-même et qui a été gravée par R. Earlom,

Suzanne curprfze parlez vlelllartfa, tableau

de Théodore Chassériau, « La belle jeune femme est entrée jusqu’aux genoux dans le bassin d’une fontaine abritée par l’ombrage opaque d’un figuier aux larges feuilles. Bien qu’elle se croie seule, elle n’a pas laissé tomber tout à fait sa draperie. On dirait que son corps pudique frissonne sous les regards ardents des vieillards cachés derrière les racines monstrueuses de l’arbre. Ses cheveux blonds, entremêlés de fils de perles, glissent