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cla l’armée annamite, et il ordonna le dépôt des armes aux chefs-lieux de chaque province, d’où les gouverneurs durent, sotts leur propre responsabilité, les diriger sur Hué. Convaincus que le général français saurait les mettre k I abri de toute agression du parti de la guerre, la reine mère, les oncles du roi, les princes de la famille royale et la plupart des mandarins demandèrent k revenir. Tbuyet, abandonné par la plupart de ses hommes, ne conserva à Cam-Lo que des contingents sans importance ; mais comme le roi était toujours son prisonnier, le génértl Caurcy jugea utile de réorganiser le

fouvernement. Tbox-Uan, oncle de Tu-Duc, ut désigné par la famille royale pour prendre la régence, le comat fut reconstitué avec ceux des ministres qui ne s’étaient pas montrés manifestement hostiles à notre influence, et M. de Champeaux, résident à Hué, reçut le portefeuille de la guerre. Nguyen-Van-Thuong, encore une fois convaincu d’intrigue, ne tarda pas à être mis en état d’arrestation, puis déporté. Enfin, le ï : s septembre, un nouveau roi fut couronné à Hué : il s’appelait Chan-Mong ; c’était un des neveux do Tu-Duc adoptés par ce monarque. En montant sur le trône, il prit le nom de Donc-Khanh, qui en langue annamite signifie « l’union des deux nations ». Il était le cinquième successeur dudit Tu-Duc, mort le 17 juillet 1883 et remplacé successivement par Duc-Duc, Hiep-Hoa, Mémen ou Kien-Phuoc et Ung-Lich.

Cependant, l’Annam se trouvait divisé en deux camps : d’un côté, Thuyet avec ses forces insignifiantes, mais en possession de la personne du roi déchu ; de l’autre, le nouveau roi et la famille royale, appuyés sur nos baïonnettes. Il importait de ne pas laisser l’insurrection naître et se développer. Déjà, k la fin de juillet 1885, la ville de Dong-Ho ! ou Dong-Heui, chef-lieu du Kouang-Binh, avait été occupée sans coup férir ; elle est située sur la rive gauche de la rivière de même nom, à une petite distance de laquelle les montagnes, très voisines de la côte, ne laissent entre elles et le littoral qu’un passage étroit. En l’occupant, le général de Courcy se proposait de couper l’îs communications entre les bandes de Thuyet et les provinces limitrophes du Tontin, en même temps qu’il se rendait maître de la route mandarine de Hué-Hanoï-Lang-Son. Restait une autre route, celle des montagnes, construite depuis le bombardement du fort de Hué (1883) pour mettre en rapport les troupes annamites et les forces qui nous disputaient le Tonkin : elle fut immédiatement confiée à la garde des tirailleurs indigènes. Une très grande effervescence régnait dans les provinces de Binh-Dinh et de Phu-Yen, situées entre Hué et la Cochinchine française. Cinq missionnaires et un nombre extrêmement considérable de chrétiens avaient été massacrés en Binh-Dinh, et 8.000 personnes s’étaient réfugiées à Qui-Nhone sous la protection de nos armes. La petite garnison que nous avions dans ce port fut bientôt comme bloquée par les lettrés fanatiques et par les bandes grossissantes, qui venaient de Binh-Dinh, capitale de la province, située k 22 kilom. dans l’intérieur. Le commandant en chef envoya donc « mr ce point menacé le général de brigade Prudnomme, avec quelques renforts, et une colonne de 600 hommes environ se mit en marche vers Binh-Dinh. Après trois jours d’opérations, où il rencontra l’ennemi résistant en nombre considérable, mais avec un armement défectueux, le général Prudhomme arriva à la citadelle, qui lui ouvrit ses portes sans combat (3 septembre 1885). Le 23, une garnison fut installée à Quang-Naro, centre commercial le plus important du royaume. Au mois de novembre, la saison des pluies obligea les troupes à prendre leurs quartiers d’hiver, et les Annamites antifrançais en profitèrent pour se fortifier et se préparer à la résistance, dès la reprise des opérations. L’Annam du Sud continuait a obéir aux lettrés et k refuser de reconnaître le roi, intronisé par le général de Courcy ; des bandes nombreuses, chassées des provinces voisines de la capitale se portaient dans le Khanh-Hoa et le Binh-Thuan, menaçant peut-être notre colonie de Saïgon. Ainsi, à la fin de l’année 1885, le royaume était encore en grande partie désolé par l’anarchie et l’insurrection, et le gouvernement rappela le général de Courcy dans les premiers jours de l’année 1886. La nomination de Paul Bert au poste de résident général de la République française en Annam et au Tonkin ne pouvait qu’avoir d’heureuses conséquences. « Je ne veux pas, disait-il quelques jours avant son départ pour l’Indo-Chine, d’escortes militaires, de ces escortes bruyantes qui semblent un défi jeté à tous les mandarins et à tous les ministres d’Annam. Nous avons recueilli tout récemment les tristes conséquences d’une exagération de ce genre. La seule arrivée du général de Courcy k la tête de son état-major et de ses zouaves a été le sujet de profondes terreurs à la cour de Hué ; on s’est inquiété, on s’est armé, on s’est affolé et nos soldats n’ont échappé que par des prodiges de bravoure au massacre qui s’en est suivi. La conséquence, la voici : Nous avions autrefois la question du Tonkin, elle suffisait a nos angoisses, et depuis l’arrivée du général de Courcy nous avons la

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question de l’Annam : question autrement effrayante, parce que nous trouvons devant nous en état d’insurrection un pays stérile de 300 lieues de long sur 50 k 60 de large, peu peuplé, et dont la population jeune, hardie, guerrière, est douée de toutes les qualités nationales que paraît avoir perdues la population tonkinoise. » C’était indiquer clairement que le nouveau résident substituerait au régime militaire l’administration civile et s’efforcerait de gagner, par d’habiles transactions, les sympathies des mandarins ; c’étaitse poser ouvertement comme l’adversaire de cette idée anticoloniale, chère à l’état-major, que le Tonkin et l’Annam étaient un champ de manœuvres incomparable, puisque les troupes s’y aguerrissaient dans de vrais combats ; c’était enfin dire aux commerçants qu’on ne les considérait plus en Indo-Chine comme des tripotiers, des maltôtiers, et des forbans. Paul Bert quitta Paris te 12 février 1886 et arriva à Hanoï le 8 avril ; de là il se rendit à Hué pour remettre entre les mains de Dong-Khan ses lettres de créance (v. Bert). Paul Bert se proposa de rassurer les lettrés, de relever le prestige du roi et de se servir de l’aristocratie annamite pour parvenir à la pacification. Dans ce but, il institua une académie, il fit faire au jeune monarque un voyage solennel dans ses États, il prit, en un mot une série de mesures marquées au coin de la douceur et de la bienveillance, témoignant toujours les plus grands égards aux indigènes, grands et petits, lettrés ou non. Pendant que ses décisions administratives nous attiraient de jour en jour les populations, des colonnes traquaient les rebelles et le gouverneur de la C’ochinchine envoyait au Binh-Thuan et au Khanh-Hoa des troupes qui réussirent à y rétablir la tranquillité. La situation s’améliorait sensiblement lorsque le résident général, atteint d’une maladie mortelle, expira le il novembre saDS avoir eu le temps de mener à bien la rude entreprise dont il avait accepté la charge.

— Bibliographie. Aubaret, Code annamite (Paris, 1865, vol. in-8°) ; Michel Duc Chaigneau, Souvenirs de Hué (Paris, 1867, in-8°) ; Barbie du Bocage, Bibliographie annamite (Paris, 1867, in-8°) ; Aubaret, Grammaire annamite (Paris, 1868, gr. in-8°) ; Legrand de la I.iraye, Z> !ciioHnaire annamite-français (Paris, 1874, gr. in-S») ; Bouillevaux, l’Amiam et le Cambodge (Paris, 1874, in-8") ; Truong Yinh Ky, Cours d’histoire annamite (Saigon, 1875, 2 vol. in-8°) ; Luro, Cours d’administration annamite (Saïgon, 1875, in-8<>) ; Philastre, le Code annamite (Paris, 1876, 2 vol. gr. in-8°) ; Luro, le Pays d’Annarn (Paris, 1878, in-S") ; Dutreuil de Rhins, la Cote d’Annam et la Province de Sué (Paris, 1878, in-8"), le Royaume d’Annam et les Annamites (Paris, 1879, in-16) ; Devéria, Histoire des relations de laChine avect’Annam (Paris, 1880, gr. in-8°) ; Bouinais et Paulus, l’Indo-Chine française contemporaine (Paris, 1885, 2 vol. in-8«) ; Notices coloniales publiées par l’administration des colonies (Paris, 1885, 3 vol. in-8<>) ; Vial, l’Annam et le Tonkin (Paris, 1886, in-8°) ; A. des Michels, Mémoire sur les origines et le caractère de la langue annamite et sur l’influence de la littérature chinoise sur le mouvement intellectuel en Cochinchine et au Tonkin (Paris, 1887, in-8°).

ANNAY, commune de France (Pas-de-Calais), arrond. et à 20 kilom. de Béthune, cant. et à 6 kilom. N.-K. de Lens ; 1.841 hab. La vie industrielle est assez active dans ce bourg, qui est desservi par le canal de la Haute-Deule, car on y trouve une briqueterie, une fabrique de toiles, une fabrique de sucre, etc.

    • ANNEAU s. m. — Encycl. Technol. Anneau nasal. Sorte de pince nommée communément

mouchettes, dont les deux branches sont recourbées eu demi-cercle k leur extrémité libre, et forment en se rapprochant un anneau complet. On se sert de cet instrument pour maintenir les bœufs ou les chevaux. À cet effet, on serre avec la pince, à laquelle est fixée une corde, la cloison du nez de l’animal.

— Phys. Anneau de garde. Anneau métallique plan qui encadre, aussi exactement que possible, sans toutefois le toucher, le disque mobile de l’électromètre ubsolu de Thomson, afin qu’il n’y ait pas accumulation d’électricité sur les bords de ce disque et qu’on puisse y considérer la distribution électrique comme rigoureusement uniforme,

— Anneau de Pacinotli ou de Gramme. Noyau annulaire de fer doux autour duquel sont enroulées les bobines induites dans certaines machines d’induction. V. machine.

Anneau oculaire. Image ou cercle conjugué de l’objectif d’une lunette par rapport à l’oculaire de cette lunette ; on dit aussi et plus justement disque oculaire (v. disque). Les noms à’anneau oculaire et de disque oculaire ont été donnés à cette image parce qu’elle marque la position que doit occuper l’œil pour embrasser à la fois tout le champ ou la plus grande partie possible du champ.

Anneaux de Newton. On appelle ainsi les anneaux colorés que l’on aperçoit par réflexion ou par transmission de la lumière dans une lame mince dont l’épaisseur croît lentement et d’une f ; içon régulière autour d’un centre. Le phénomène des auneaux de New ANNE

ton, qui a été étudié sommairement an mot interférence (v. au tome IX du Grand Dictionnaire), est un cas particulier des phénomènes de coloration des lames minces ; quelques détails sur ces colorations seront données au mot lame.

Les anneaux de Newton fournissent la méthode la plus sensible que l’on connaisse pour évaluer de très petites différences d’épaisseur. L’approximation est de l’ordre de grandeur des longueurs d’onde et par conséquent des millionièmes de millimètre. M, Fizeau a pu fonder sur ce principe son élégante méthode pour la mesure de la dilatation des cristaux et des corps dont on ne possède que des échantillons très petits, et cette méthode est appliquée couramment au bureau international des Poids et mesures. Les anneaux de Nobili, comme les anneaux phonéidoscopiques, sont des anneaux de Newton produits dans des circonstances particulières, qui ont donné lieu entre les mains de M. A. Guébhard à d’intéressantes recherches.

Anneaux de Nobili. Les anneaux décrits pour la première fois par Nobili sous le nom d’apparences électrochimiques, et étudiés depuis p ; ir Becquerel, se forment quand on prend une lame métallique polie comme électrode pour l’électrolyse et qu’on promène l’autre électrode devant cette lame. Lorsque la lame forme l’électrode positive et que la substance soumise à l’action du courant est oxygénée, les colorations qu’on obtient sont dues à une mince couche d’oxyde. Dans tous les cas, elles sont produites par la formation d’une couche très mince d’un composé transparent k la surface du métal.

M. Guébhard a remarqué qu’on obtient des colorations de même nature quand la plaque, au lieu de former une des électrodes, est isolée dans l’électroiyte. Les colorations de lames minces affectent des formes diverses, suivant lu forme et la position des électrodes, en particulier quand l’électrode positive est une lame plane et l’électrode négative une tige recttiigne terminée en pointe et placée perpendiculairement k la première k une petite distance de sa surface ; les bandes colorées sont circulaires et présentent l’aspect des anneaux de Newton. Ce sont, en réalité, des anneaux de même nature, mais de disposition inverse, produits par une mince couche d’oxyde transparent qui se forme à la surface du métal et dont l’épaisseur est d’autant plus grande qu’on est plus près de la pointe devant laquelle se trouve le centre des anneaux. L’acétate de plomb, et surtout les matières organiques conviennent spécialement pour répéter ces curieuses expériences électrolytiques.

M. Guébhard a constaté que, dans tous les cas où l’on peut déterminer par d’autres procédés, et notamment par le calcul, les lignes équipotentielles de la plaque métallique, on a trouvé la plus complète identité entre ces lignes et les anneaux de Nobili ; on peut donc admettre, avec M. Guébharr1, que ces anneaux dessinent les lignes équipotentielles dans tous les cas et en faire une méthode de recherche de ces lignes toutes les fois que la détermination n’a pu être faite directement. Nous reproduisons ici, d’après les travaux de l’auteur et de plusieurs autres savants qui ont appliqué sa méthode, quelques-unes des figures qu’il a obtenues.

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— Anneaux phonéidoscopiques. On appelle ainsi les anneaux colorés qui se produisent sur une surface polie, telle qu’un bain de mercure quand on émet un son de voix en

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Anneaux de Nobili.

Les lignes grasses indiquent les contours de la plaque et de l’extrémité de l’électrode négative qui est en regard de celle-ci. Les lignes maigres reproduisent la forme des anneaux obtenus. Il est facile de se rendre compte que ce sont bien les diagrammes des ligues équipotentielles.

Anneau paonéidoscopique fig.rant le son i.

plaçant la bouche k une petite distance de U suiface. Ce sont des anneaux de Newton dus k la condensation de la vapeur d’eau k la surface du mercure en couches d’une épaisseur très petite et variable suivant l’intensité du courant d’air dans chaque direction. H faut que la surface du mercure soit bien nette ; mais il est avantageux que le mercure soit impur. M. Guébhard, ayant remarqué que chaque son donnait lieu à des courbes colorées de forme caractéristique, a étudié parce moyen les voyelles. Nous donnons ici l’aspect d’une des figures obtenues, celle qui correspond au son », et un tableau de figures schématiques dans lesquelles les ligues pointilléesmarqueut la position des bandes obscures.

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Figures schématiques d’anneaux phonéidoscopiques.

Ce procédé est plus sensible qu’aucun de ceux qui sont fondés sur l’emploi de matières pulvérulentes.

Anneau (i’) e»le livre (The Ring and the Book], par M. Browning (1869, 4 vol.). Le poète anglais a choisi ce titre un peu singulier parce que son oauvre, dit-il, est comme un anneau qui relie l’Angleterre à l’Italie, et que l’idée de ce poème lui vint en feuilletant un vieux livre trouvé par hasard chez un antiquaire de Florence. C’est l’histoire du comte Guido Franceschini. Ce seigneur, après avoir épousé pour sa dot une jeune et belle Florentine, eut l’idée de se débarrasser de la comtesse dans un but que l’on devine. En traître qu’il était, il essaya de mettre les apparences contre la pauvre femme, et encouragea les assiduités d’un jeune abbé qui la compromettait, de telle façon que l’on put croire, après le crime, à une vengeance d’époux outragé. Tel est, en résumé, le canevas sur lequel M. Browning a écrit douze monologues. Dans le premier, il raconte la trouvaille du bouquin qui devait lui fournir son sujet, il fait assister le lecteur à la gestation de l’idée et U l’éclosion du poème. Puis viennent les discours de deux personnages, dont l’un croit à la version donnée par le comte, el dont l’autre soupçonne que la comtesse était innocente. Une troisième personne expose ensuite les arguments pour et contre et tes résume. Puis Guido- lui-même plaide sa cause. Ensuite c’est la famille de la victime qui porte et développe son accusation. Les avocats des deux parties prononcent chacun une plaidoirie. Ou défère la cause au pape Innocent XII ; le pape instruit le procès, cherche la vérité, pèse les griefs et condamne le comte. Celui-ci, dans le dermermonologue, fait bien voir que le pape a eu raison, car il dévoile ses vrais sentiments et avoue son crime ; il regrette la vie, mais U meurt impénitent,