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multiplicateur. Pour avoir le produit total, il ne reste plus qu’à disposer les trois produits

Fartiels comme à l’ordinaire, et à en faire addition : on a pour résultat final le nombre 5,601,386.

41,846

179,34

5,380,2

5,601,386

Tout, dans cette multiplication, s’est donc réduit à de simples additions. — Soit maintenant à diviser 5,601,386 par 5,978. Après avoir disposé, comme ci-dessus, les règles qui portent en tète les chiffres du diviseur, on place à leur gauche la règle-index, qui doit servir à indiquer les quotients partiels, suivant les cases horizontales où se trouvent les dividendes. En exécutant la division selon la méthode vulgaire, on commence par chercher combien de fois 5,978 est contenu dans 56,013. Or, ce dernier nombre, ou du moins celui qui en approche le plus, est dans une des colonnes horizontales. Quelques tâtonnements apprennent que c’est dans la neuvième. Pour l’y reconnaître, on procède comme pour la multiplication. Écrivant à part 2, chiffre du triangle de droite de la dernière case, on dit : 7 et 3, 10 ; je pose 0 et retiens 1, qui, ajouté ko et à 1, donne 8 ; je pose donc 8 ; S et 5 font 13, je pose 3 et retiens 1, qui, ajouté à 4, donne 5. On a ainsi pour résultat 53,802, qui est le plus grand nombre au-dessous de 56,013. Le quotient est donc 9, mais il reste 2,211, différence de 56,013 et de 53,802. Prenant donc ce reste et écrivant à sa droite le chiffre 8 du dividende, on a le nombre 22,118, que l’on cherche dans une des colonnes horizontales. On reconnaît que la troisième contient 17,934, qui est le plus grand nombre au-dessous de 22,118. On en conclut que 3 est le second chiffre du quotient, et on récrit à la droite du 9 déjà trouvé. Il reste 4,184, différence de 22,118 et de 17,934. On place à la droite de ce reste 6, dernier chiffre du dividende, et l’on trouve que le nombre 41,846 ainsi formé est exactement contenu dans la septième colonne horizontale. Écrivant donc 7 à la droite des deux chiffres déjà trouvés, on voit que 937 est le quotient de 5,601,386 divisé par 5,978.— Depuis leur invention, les bâtons de Néper ont été modifiés de plusieurs manières, mais la forme ci-dessous, qui est la forme primitive, est la plus simple.

— Anecdotes. Voici une lettre énergique d’une femme irritée : « Maraud, si les coups de bâton pouvaient s’écrire, tu ne lirais ma lettre que. sur ton dos. »

Un fanfaron avait reçu des coups de bâton sans mot dire. Celui qui les lui avait administrés le craignait assez peu pour s’en être vanté. Quelque temps après, le bâtonné menace un poète, qui avait lâché quelque épigramme à son sujet, de lui donner une volée de coups de bâton : « Parbleu, répliqua le poète, cela ne vous sera pas difficile, puisque vous les avez reçus hier. »

Un auteur ayant fait une comédie, dans laquelle il avait glissé quelques traits équivoques qui pouvaient désigner un grand personnage étranger, fort riche, fut assailli, sur la brune, par trois spadassins qui vengèrent sur son dos l’offense supposée. Comme la pièce avait eu beaucoup, de succès, quelqu’un dit qu’elle avait valu à l’auteur mille écus.-Oui, répondit un autre, qui était dans le secret, sans compter le tour du bâton.

♦ *

M. de Stainville menaçait Clairval, acteur de la Comédie Italienne, qui vivait depuis longtemps avec Mme de Stainville, de lui administrer une correction, à M. de Stainville me menace de cent coups de bâton si je vais chez Sa femme, disait Clairval à ce propos ; madame m’en offre deux cents si je ne me rends pas à ses ordres. Que faire ? — Parbleu, répondit Caillot, ami de Clairval, obéir à la dame : il y a cent pour cent à gagner. »

Le marquis de Villette ayant écrit une lettre d’injures à Sophie Arnould, sa maîtresse, avec laquelle il s’était brouillé, reçut du comte de Lauraguais, son successeur, un manche à balai soigneusement empaqueté, et sur l’enveloppe duquel étaient ces deux vers que "Voltaire avait composés pour une statue de l’Amour :.

Qui que tu sois, voici ton maître : Il l’est, le fut ou le doit être.

Le maréchal de Duras ayant menacé Linguet de le faire périr sous le bâton, ce dernier lui répondit : « Monsieur le maréchal, vous n’avez pas coutume de vous en servir. » Cette anecdote donna lieu aux vers suivants :

Monsieur le maréchal, pourquoi tant de réserve ?

Quand Linguet le prend sur ce ton. Que ne le faites-vous mourir sous le bâton,

Afin qu’une fois il vous serve ?

De noblesse à noblesse, on sait la différence, Disait quelqu’un ; sans me vanter, Dans ma maison je puis compter

Jusqu’à douze hâtons de maréchal de France. C’est bien honnête !—Eh ! qu’est cela ? Dit un Gascon ; belle vétille ! Depuis cent ans et par delà,

Ce n’est qu’avec ces bâtons-lît. Que l’on se chauffe ea ma famille.

— Allus. litt. Le» bâtons douant», allusion

à la fable de La Fontaine, le Chameau et les Bâtons flottants.

On avait mis des gens au guet,

Qui, voyant sur, les eaux de loin certain objet,

Ne purent s’empêcher de dire

Que c’était un puissant navire. Quelques moments après, l’objet devint brûlot,

Et puis nacelle, et puis ballot,

Enfin bâtons flottants sur l’onde.

Et le fabuliste conclut par ce vers :

De loin c’est quelque chose, et de près ce n’est rien.

Quoique La Fontaine commette ici une hérésie d’optique, les bâtons flottants n’en sont pas moins passés en proverbe, pour désigner toute chose, ou plutôt toute personne qui perd à être vue de près. C’est, dans un ordre d’idées plus général, le major e longinquo reverenlia des Latins.

Bâtons flottant» (les), comédie en cinq actes et en vers, de M. Liadières, représentée à Paris sur le théâtre de la République, le 2S juin 1851. Ces bâtons flottaient sur l’eau depuis 1844, lorsqu’il fut donné enfin à l’auteur de les pousser au rivage, et au public de les saisir. 1 De loin c’est quelque chose, et de près ce n’est rien. «Jamais le vers du fabuliste ne se trouva plus cruellement réalisé, L’auteur, quoique un des serviteurs les plus zélés du trône de Juillet, officier d’ordonnance du roi, député conservateur et-’familier des Tuileries, avait eu quelque peu maille à partir avec la censure. Sa pièce photographiait l’époque et mettait en scène des ministres et des députés qui, par la force même des choses, devenaient de vivantes personnalités. M. Duchâte ! aurait bien désiré ne pas laisser jouer cet ouvrage ; d’un autre côté, il ne voulait pas désobliger l’auteur. On demanda à ce dernier d’atténuer la vivacité de certains passages. M. Liadières ne consentit qu’à ajourner la représentation de sa comédie ; mais, dans le

public, tant qu’ils étaient hors de vue, on parlait beaucoup de ces fameux bâtons flottants.

D atermoiements en atermoiements, ia révolution de Février arriva. L’auteur put donner librement sa comédie ; il la remania et la fit jouer en 1851. Mais ses portraits et ses satires avaient perdu de leur à-propos, et la versification molle, flasque et filandreuse de cet homme du monde improvisé poète, n’était pas faite pour intéresser le spectateur. Aussi les Bâtons flottants ne flottèrent-ils pas longtemps, a Par quel bout prendre ces bâtons ? écrivait, en juin 1851, M. Théophile Gautier. Traiteronsnous M. Liadières comme artiste ou comme homme du monde ? Ce serait une rigueur inutile et cruelle d’appliquer les règles sévères de l’art à quelqu’un qui ne les soupçonne pas, qui n’est pas du métier et n’a pas martelé sur 1 enclume, dès sa jeunesse, ce dur métal de la langue, si rebelle à prendre les formes qu’on veut lui donner ; le regarder comme un amateur agréable, abusant d’une facilité banale de rimer à peu près de la prose coupée en tranches d’alexandrins, et lui adresser quelques-uns de ces éloges vagues dont on est libéral envers les choses qui n’ont aucune importance, ce serait peut-être blesser plus vivement encore son amour-propre d’auteur accidentel... Si de simples auteurs, Balzac,

Léon Gozlan, Méry, ou tout autre d’une littérature avérée, eussent fait une pareille pièce, comme on leur aurait dit que leurs personnages étaient d’invention, que rien de semblable ne se passait dans le monde, qu’ils ignoraient les affaires et prenaient leurs songes creux pour des réalités I M. Liadières, lui, a pratiqué les hommes et les choses dont il parle ; il était dans la coulisse, et bien placé pour voir ; ce n’était pas du fond de son cabinet ou du haut de sa mansarde qu’il étudiait ou plutôt qu’il supposait un monde formé pour lui. Dans quel ministère, dans quel couloir de la chambre, dans quelle rédaction de journal l’auteur des Bâtons flottants a-t-il rencontré Duvernay, Soligny et Montbrun, pâles silhouettes, incertaines découpures ? Ministre, député et journaliste, est-ce donc la peine d’avoir trempé si longtemps dans la politique, pour en savoir moins que les hommes d’État de M.Scribe ?» M.Liadières a fait, en effet, de ses héros de tristes silhouettes qui flottent, nagent et s’embarrassent à travers de plates périphrases. Une versification contournée, sans rhythme et sans rimes, détestable pastiche de la plus pauvre des poésies, celle de l’empire, enveloppe comme d’une brume opaque l’idée prétendue philosophique de l’ouvrage. Les Bâtons flottants, c’est le pouvoir qui n’est rien de près, si de loin il semble quelque chose. Après cela, l’auteur cherche à prouver que nul n’est plus malheureux qu un ministre, parce qu’on fait des articles contre lui dans les journaux, qu’il est calomnié et que son bonheur conjugal est troublé.

Le ciel de Duvernay n’est pas exempt d’orage.

Le pauvre homme ! L’auteur-député qui écrivait toutes ces jolies choses n’aurait pas voulu être ministre, sans doute, à moins pourtant qu’on ne l’eût violenté ; car il n’y a, pour sûr, a ses yeux que les.ministres qui soient malheureux en ménage ; eux seuls entre les hommes sont calomniés. Mais tirons le rideau sur cette comédie, qui avait la prétention de retracer les mœurs gouvernementales, et qui ne retrace absolument rien. Nous ne la mentionnons ici que parce qu’oD en évoque encore le souvenir de loin en loin, sorte de vitalité posthume qu’elle doit à la quarantaine un peu prolongée que lui a fait subir la censure.

Itûtoii (les coups de), dans les relations sociales, la littérature et les arts. Qu’on ne rie pas : ce titre est sérieux, et l’on renfermerait, au besoin, dans ce chapitre l’histoire philosophique de l’humanité. Lorsque le premier nomme s’éveilla à la vie dans l’Bden, il étendit les bras autour de lui, prit une branche d’arbre et la brandit dans sa main puissante. Sans doute, il y a loin de la canne d’Adam à la canne de M. de Balzac, mais, par cela même, que de faits curieux à tous les points de vue comblent la distance qui sépare ces deux bâtons ! Le bâton fut la première arme de l’homme et fut complice du premier meurtre. L’assassin et sa victime étaient enfants du même père et de la même mère. Aujourd’hui, Caïn dédaignerait la classique massue et renoncerait à assommer Abel. Est-ce donc que le fratricide a disparu de nos mœurs ? Non. Le crime est resté ; les moyens de le commettre se sont centuplés, voila toute la différence. Grâce à la civilisation, Caïn n’aurait que l’embarras du choin pour se défaire d’un frère incommode, soit en lui brûlant la cervelle, soit en le poignardant, soit en lui versant à dose calculée un lent, mais sûr toxique. Toutefois notre intention n’est pas d’écrire une monographie complète du bâton, monographie tour à tour attristante et comique, que nous laissons à d’autres le soin d’élaborer à loisir. Il y a d’ailleurs coups de bâton et coups de bâton, comme il y a fagots et fagots. Sganarelle s’apprétant à frapper sa femme.lui dit : 1 Voila, ma douce moitié, le vrai moyen de vous apaise»*, » et quand, aux cris de Martine, M. Robert intervient, l’épouse, relevant le chif non, déclare toutfièrementqu’il luiplait d’être attue, ce qui induit certaines gens à prétendre que la plus faible moitié du genre humain aime a être battue par la plus forte ; on a même écrit sur cet important sujet un livre intitulé ou à peu près : De l’utilité de battre sa feï.ime. Les coups de bâton, au dire de Sganarelle, qui semble s’y connaître, « ce sont petites choses de temps’en temps nécessaires dans l’amitié. • Je ne sais si beaucoup de femmes partagent cet avis. Plus d’une, qui a tâté du balai, ne s’en est pas amendée pour cela, au contraire. Ainsi le bon Montaigne nous conte l’histoire d’une femme qui, « pour aucunes corrections, menaces et bastonnades, ne cessait d’appeler son mari pouilleux, et qui, précipitée dans l’eau, haussait encore, en étouffant, les mains, et faisait, au-dessus de sa tête, signe de tuer des... » nous n’osons dire le mot. Les femmes, il est vrai, ont pris plus d’une fois leur revanche, non à la façon de Martine, mais autrement. Nous en avons pour preuve l’usage établi dans la plupart des pays de l’Europe, au moyen âge, de faire monter à rebours sur un âne, et parcourir la ville ou le village en tenant l’âne par la queue, ia femme qui avait battu son mari. Dans quelques endroits, les maris qui battaient leurs femmes étaient exposés au même châtiment. C’est du moins ce que nous apprend un conseiller au parlement de Dijon, Philibert Colin, qui a publié sur ce sujet un poëme latin intitulé : De Majmna festiaitate quœ fit maio nïense in duros maritos qui efferato trucique animo uxoribus plagas tnfligunt. (Dijon, 1571,1572, in-4°.)Ce n’est pas de ces coups de bâton, échangés sous le toit conjugal, que nous voulons parler, puisque entre l’arbre et l’écorce, on ne doit pas mettre le doigt ; mais seulement des coups de bâton qui appartiennent à l’histoire. Certes, Chicaneau disant, en frappant sur le dos de l’Intimé : «Ouida, je verrai bien s’il est sergent, » et l’Intimé tendant l’échiné et s’écriant : » Frappez, j’ai quatre enfants à nourrir » nous oflrent, au point de vue des mœurs, des types aussi curieux a étudier que celui de la Rissole, disant dans une comédie de Boursault : ■ J’ai des démangeaisons de te casser la gueule, » ou bien encore « lorsqu’on me veut railler, je donne sur la face ; » nous les négligerons pourtant, ainsi que tant d’autres dont le théâtre est plein, car il nous est prescrit de nous borner. Qu’on songe seulement, si l’on veut se reporter aux bastonnades mémorables de la comédie, que le sabre de bois du satyre grec et du bouffon romain, devenus plus tard 1 arlequin italien, n’est autre chose qu un bâton déguisé. Le paysan grec et l’esclave romain, dont l’épaule est encore meurtrie, viennent rire sur la scène de leur misérable condition, et se vengent sur un personnage fictif des châtiments que le maître leur infligea. Ce maître, c’est peut-être Platon ou Plutarque, car nous savons que Plutarque et Platon ne se faisaient pas faute de corriger leurs esclaves ; c’est, si on l’aime mieux, Auguste, lequel fit fouetter Hylas, pantomime qui s’était permis des personnalités dans Son jeu, ni plus ni moins qu’un acteur du xixe siècle, comme Dioclétien fit bâtonner l’acteur Genest, qui, en jouant le chrétien, le devint et endura le martyre. Chez nous, Arlequin se fuit grand seigneur et rosse Pierrot, c’est-à-dire le peuple ; Pierrot, par sa gaucherie, faisait briller Arlequin petit-maître ; Arlequin, sous le règne des Pompadour et des Du Barry, a le sarcasme à la bouche, des vices nombreux et de l’esprit à pleines mains ; mais cet esprit s’épuise dans les nuits de débauche, et pendant qu’Arlequin s’enivre de Champagne entre les bras des grandes dames qui se prostituent à lui, Pierrot cultive son intelligence, lit les philosophes au clair de la lune, apprend à dérober le sabre de bois, et frappe celui qui l’a tant de fois et si injustement frappé. Pierrot est le maître maintenant, et Arlequin n’a laissé qje des rejetons rachitiques.et impuissants. N’avions-nous pas raison de dire au début que l’histoire philosophique de l’humanité tiendrait au besoin dans le titre de cet article ? Qui nous empêcherait, en effet, de montrer par des exemples l’intelligence populaire, trop longtemps abaissée, trop longtemps courbée sous le bâton, et son émancipation progressive ? Que de fois le peuple dut, comme Ésope, se sauver du châtiment par quelque trait de subtilité ! Ahl le bâton, éternel symbole du droit du plus fort, où ne le retrouv< :-t-on pas ? quede nobles épaules ont frémi à son brutal contact : Molière, Voltaire, Racine, Beaumarchais, et avant eux et après eux combien d’autres encore qui sont la gloire du monde entier, ont dû baisser la tête et dévorer l’outrage devant la toute-puissance du bâton ! Aujourd’hui, fort heureusement, cette toute-puissance est singulièrement amoindrie ; mais il a fallu toute une révolution pour proscrire de nos mœurs cette ultima ratio des grands seigneurs de tous les temps, devant laquelle s’inclinent encore, a