Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 2, part. 2, Be-Bi.djvu/196

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

614

BERT

Bertant fut un prélat austère, quoiqu’il se rappelât avec plaisir les inspirations anacréontiques de sa jeunesse. Après avoir travaillé à la conversion de Henri IV, il ne lit plus que des compositions religieuses. Avant de donner la liste de ses ouvrages, reproduisons un de ses madrigaux qui allié la simplicité à la netteté :

Quand je revis celle que tant j’aimai. Peu s’en fallut que mon feu rallumé N’en fit le charme en mon ame renaître, Et que mon cœur, autrefois son captif, Ne ressemblât l’esclave fugitif

À qui le sort fait rencontrer son maître.

Le premier recueil des œuvres poétiques de Jean Bertant fut publié en 1602, (in-8°, Paris), par Pierre Bertaut, frère de l’auteur. Il se compose de complaintes ou chansons, de stances, d’élégies et de mascarades. Des réimpressions furent faites en 1605, 1620 et 1623.

L’édition de 1605 contient une traduction en vers héroïques du liv. II de VEnéide, plu*sieurs cantiques, dont vin sur la Conversion de 'Henri IV, la paraphrase en vers de quelques psaumes, etc. Dans les éditions de 1620 et 16-23, on a ajouté un Recueil de quelques vers amoureux, un Discours funèbre sur la mort de Lysis et un poëme intitulé Panarette, etc. Bertant a laissé, en outre, une Oraison funèbre de Henri IV, la traduction de quelques livres de saint Ambroise, des sermons, des traités de controverse religieuse, etc. Ses contemporains l’ont célébré en vers français, latins et grecs,

BERTAUT (François), sieur de Fréanville, né à Paris en 1621, mort dans les premières années du xvmt siècle. Il était frère puîné de Mme de Motteville, par l’influence de laquelle il obtint la charge de lecteur de la chambre de Louis XIII. Il sut gagner l’amitié de ce prince, au point que celui-ci lui donnait souvent une partie à exécuter dans les concerts de guitare qu’il faisait presque tous les jours. Plus tard, le cardinal de Richelieu l’ayant forcé à vendre sa charge, Bertant en acheta une de conseiller au parlement. Il publia, en 1701, un ouvrage intitulé : les Prérogatives de la robe, et il avait déjà composé, en îessi, le Journal d’un voyage en Espagne, contenant la description de ce royaume (&9, in-4").

BERTAUT (Léonard), historien et religieux minime, né à Autun, mort il Chàlon en 1GG2. Il s’est occupé surtout de recherches sur l’histoire de la Bourgogne. On a de lui : la Très-ancienne et très-auguste ville d’Autun (1053) ; Histoire ancienne et moderne de Chalon-sur-Saône (1662, 2 vol. in-4o), qui contient des documents importants.

BERTAUX (M™» Léon), sculpteur français contemporain, née à Paris en 1828, élève de MM. Pierre Hébert et Dumont. Elle a exposé, pour son début, en 1857, le modèle en plâtre d’un bénitier décoré des figures de la Foi, de l’Espérance et de la Charité. Ce bénitier, exécute en bronze pour le ministère de la maison de l’empereur, a été donné à l’église de Saint-Gratieu (Seine-et-Oise). M""= Bertaux a pris part à toutes les expositions qui ont eu lieu à Paris, depuis 1857 : elle a obtenu une mention honorable, en 1863, pour un grand bas-relief en bronze représentant Y Assomption, et une médaille, en 1864, pour un Jeune Gaulois prisonnier, statue d’un sentiment distingué et d’une exécution virile. Ses autres ouvrages principaux sont : les Quatre saisons, bas-reliefs, dont un (V'Hiver) a été exposé en 1861 ; l’Amour dominateur (1865) ; une Nymphe entourée d’enfants, groupe monumental, formant le couronnement d’une fontaine inaugurée à Amiens, en 1864 ; la Navigation, bas-relief de la nouvelle aile des Tuileries ; Saint Matthieu et Saint Philippe, figures en pierre, en cours d’exécution, pour l’un des portails de l’église Saint-Laurent, etc. MIlie Bertaux a fait, en outre, des bustes, des médaillons-portraits et des modèles pour ^industrie des bronzes. Elle réussit particulièrement dans les figures d’enfants, qu’elle traite avec beaucoup de délicatesse.— Son mari, M. Léon. BuRTAUX, né en 1827 à Boury (Oise), s’est fait connaître par des bustes-portraits, dont plusieurs ont figuré aux expositions : oh a surtout remarqué, en 1SG5, celui du paysagiste Thuillier, qui est placé aujourd’hui dans la bibliothèque d’Amiens.

BERTAUX (Duplessis), habile graveur français, mort en 1815. On cite, parmi ses estampes, les Scènes de la Révolution et les campagnes de Napoléon en Italie, d’après Carie Vernet. Ces recueils sont très-estunés. Bertaux, qui avait été professeur a l’école militaire, se jeta avec enthousiasme dans le mouvement de la Révolution. Il fut aide de camp de Ronsin dans l’armée révolutionnaire.

BERTEÀU ou BERTAUT, BEUTHAULT,

BERTAULT, fondateur de l’école française do violoncelle, né à Valenciennes au commencement du xvme siècle, mort en 1750. Il pratiqua d’abord la basse de viole qu’il abandonna pour le violoncelle dès qu’il se rendit compte des ressources de ce dernier instrument. C’est en 1739 qu’il se fit entendre à Paris dans un concert spirituel, et son prodigieux talent excita le plus grand enthousiasme. Caffieux raconte à son sujet l’anecdote suivante. «Tandis qu’il jouissait à Paris de la gloire de n’avoir aucun égal, un ambassadeur, ami de la musique, l’engagea k venir faire les délices d’une nombreuse compagnie qu’il avait assemblée.

BERT

Le musicien complaisant obéit. Il se présente, il joue, il enchante. L’ambassadeur satisfait lui fait remettre huit louis et donne ordre de le conduire à, son logis dans son propre carrosse. Berteau, sensible à cette politesse, mais ne croyant pas ses talents assez récompensés par un présent si modique, gratifie, en arrivant chez lui, le cocher des huit louis pour la peine que celui-ci avait eue de le reconduire. L’ambassadeur le rit venir une seconde fois, et sachant la générosité qu’il avait faite à son cocher, il lui nt compter seize louis et ordonna qu’on le reconduisit encore dans sa voiture. Le cocher, qui s’attendait à de nouvelles largesses, avançait déjà la main ; mais Berteau lui dit : « Mon ami, je t’ai payé pour deux fois. ■ Berteau, dont le talent était de premier ordre, avait un goût immodéré pour le vin et ne fit jamais fortune. Il eut pour élèves Cupis, les deux Jeanson et Duport l’aîné, qui propagèrent en France la qualité de son et le large chant de leur maître. Cet artiste a composé quatre concertos pour violoncelle et trois livres de sonates pour violoncelle et basse, édités à Paris.

BERTAVELLE S. f. (ber-ta-vè-Ie). Pêche.

Nasse de jonc dont se servent les pêcheurs génois.

— Ornith. Syn. de bartavelle. V. ce mot.

BERTAZINE s. f. (bèr-ta-zi-ne). Ornith. Syn. de bruant.

BERTÈCHE (Lôuis-François-Vaillant), officier français, né à Sedan en 1754, mort vers 1830. Il fit la guerre d’Amérique, se distingua par un courage héroïque dans les guerres de la Révolution, et reçut quarante blessures à Jemmapes, où il sauva deux fois la vie a Beurnonville. En 1793, la Convention lui décerna une couronne de chêne. Nommé commandant de Sedan en l’an XII, il empêcha cette ville de tomber au pouvoir de l’ennemi, en 1815.

BERTEICHE s. f. V. bretèche.

BERTEL ou BERTELS (Jean), chroniqueur et théologien flamand, né à Louvain en 1559, mort en 1607. Il entra dans l’ordre des bénédictins et habita successivement le monastère de Luxembourg, dont il fut abbé, et celui d’Echternach. Il fut fait, en 1596, prisonnier par les Hollandais, qui ne le relâchèrent que moyennant une rançon considérable. Son principal ouvrage a pour titre : Historia Luxemburgensis, etc. (Cologne, 1685, in-4o).

BERTELLI (Ferrando ouFerdinando), graveur et éditeur d’estampes, travaillait à Venise dans la seconde moitié du xvie siècle. Il a gravé au burin : la Sainte Famille, d’après Battista Franco ; Jésus guérissant les malades, d’après P. Farinati ; ?énus et l’Amour, Andromède, d’après le Titien ; les Costumes de presque tous les peuples (Omnium fere gentium nostrœ rctatis habitus, nunquam antehac editi, etc. ; Venise, in-fol., 1563), recueil intéressant dont on trouve des exemplaires contenant près de 150 estampes. Les cinquante premières pièces, seulement, portent la marque de Bertelli.

BERTELLI (Pietro), graveur, éditeur d’estampes et libraire, probablement parent du précédent, vivait en Italie, à la fin du xvie siècle. Il publia, entre autres ouvrages ornés de gravures : les Costumes des diverses nations (Diversarum nationum habitus, etc., in-fol. ; Pavie, 1592 à 1596), recueil en trois volumes, comprenant environ 250 pièces ; la Description des villes d’Italie (Theatrum urbium italicarum ; lre édition, Venise, 1599 ; 2e édition, Vicence, 1616 ; 3° édition, Rome, 164E, in-4o oblong), contenant 59 pièces ; les Vies des empereurs dps. Turcs (Vite degli imperatori dei Turchi, etc. Vicence, 1599), petit in-fol. renfermant 50 portraits.

BERTELLI (Francesco), graveur et éditeur italien, fils du précédent, a publié à Padoue, en 1629, la Description des villes d’Italie (Teatro délie citte d’Italia, etc., in-4» oblong), contenant 79 pièces, dont quelques-unes reproduisent des planches de l’ouvrage publié sur le morne sujet par Pietro Bertelli.

—BERTELLI (Christophano), graveur et éditeur d’estampes, né à Rimini, travaillait à Modène, dans la deuxième moitié du xvi<> siècle. Il a marqué de son nom un certain nombre de pièces : la Conversion de saint Paul, d’après’G.-A. Licinio ; trois Madones entourées de saints ; les Ages de la femme, es Ages de l’homme ; etc.

BERTELLI (Luca), graveur et éditeur italien, travaillait à Rome et à Venise de 1550 à 1580. Parmi les estampes qui portent son nom, on remarque : le Mont Sinaï, le Jugement universel, d’après G.-B. Fontana ; le Peuplé d’Israël tourmenté par les serpents, le Crucifiement, d’après Michel-Ange ; le Repos en Égypte, la Vierge et l’Enfant Jésus, la Cène, YHomme de douleurs, la Vierge de douleurs, des sujets mythologiques et allégoriques, d’après le Titien ; la Flagellation, d’après P. Farinati ; la Présentation de la Vierge au Temple, la Descente du Saint-Esprit, d’après T. Zuccaro ; le Mauvais riche, le Denier de César, d’après D. Campagnola ; la Descente de croix, d’après G. Muciano ; les portraits de Pétrarque, d’Hippolyte de Gonzague ; etc. Luca Bertelli a édité des pièces de Béatricet, d’Augustin Carrache et de divers autres artistes ; presque toutes sont rares. — On pense

BERT

qu’il était frère de Bertelli (Orazio), qui vivait à Rome à la fin du xvie siècle et qui a édité, entre autres estampes, l’Ascension, gravée par Aug. Carrache, d’après Paul Véronèse. À la même famille appartiennent, sans doute, Domenico Bertelli, qui a édité a Rome une Vierge du rosaire, et Donato Biîrteli.i, qui a publié à Venise, en 1574, sous le titre de Civitatum aliquot insignium et locorum magis munitorum exacta delineatio (in-4" oblong), un recueil de 51 pièces dont 13 portent le monogramme de Nie. Béatricet.

bertère s. f. (ber-tè-re — du nom du botaniste Bertero). Bot. Genre de la famille des iridôes, ayant pour type le glaïeul des blés, mais qui n’a pas été adopté.

BERTEREAU (Martine de), femme minéralogiste. V. Beadsoleil (Martine de).

berteroa s. f. (bèr-te-ro-a — de Bertero, n. d’un botaniste). Bot. Genre de plantes crucifères, gui contient quatre espèces herbacées du midi de l’Europe et du nord de l’Asie, et dont M. A. de Candolle indique une cinquième espèce, du Pérou, mais en doutant qu’elle appartienne à ce genre : La berteroa est une plante bisannuelle, vivace ou fruticuleuse à la base, et couverte d’une tubescenec blanchâtre.

BERTERHAM (Jean-Baptiste), peintre e : graveur flamand, travaillait à Bruxelles à la fin du xvie siècle et au commencement du xvn». Il a gravé à l’eau-forte et au burin quelques sujets religieux (Saint Roch, l’Agneau pascal, le Credo en plusieurs pièces, les Miracle du saint Sang, etc.) ; des vues diî fêtes publiques données.à Bruxelles et ù Gand (feux d’artifices, cérémonies, etc.) ; un*» Allégorie en l’honneur de Charles 'VI, d’après I.-V. Duplessie ; a. Bataille de Luzsara (l~02), d’après D. Felipe Palota ; des frontispices et des planches pour des livres ; des portraits, entre autres, celui du prince Philippe de Rubempré, de Jean Hugues, archevêque-de

Trêves, etc.

BERTHAULT (Pierre - Gabriel), graveur français, travaillait à Paris dans la deuxième moitié du xvme siècle. Il a gravé, à l’eauforte et au burin, un assez grand nombre de planches pour des publications illustrées, notamment pour le Voyage de Naples et de Sicile, de Saint-Non, pour le Voyage en Syrie, de Casias, pour l’ouvrage sur la Salle de spectacle de Bordeaux, de Louis (in-fol., 179 ! !, Paris).

BERTHAULT (René), sieur de la Grise, littérateur français, mort en 1536. Après avoir été secrétaire du cardinal de Grammont, qu’il accompagna dans ses ambassades à Madr’.d et à Rome, il habita quelque temps la cour de la sœur de François Ier, Marguerite de Navarre. Il dédia à cette princesse sa traduction du Livre d’Or de Marc-Aurèle (Paris, 1531, in-fo), qui eut un grand succès et fit paraître une espèce de roman intitulé la Pénitence d’amour en laquelle sont plusieurs persuasions et réponses très-utiles pour ceux qui veulent converser utilement avec les dames, etc. (1557, in-16).

BERTHAULT (Pierre-Gabriel), graveur français, travaillait à Paris dans la seconde moitié du xvine siècle. Il a exécuté, k l’eauforte et au burin, un assez grand nombre de planches pour des ouvrages illustrés, entre autres pour le Voyage en Syrie, de Cassas, pour le Voyage de Naples et de Sicile, de Saint-Non, pour la Salle de spectacle de Bordeaux, de Louis ; etc.

BERTHAULT (J.-P.), peintre et graveur français, mort à Paris en 1850, élève de Jean-Victor Bertin. Il a exposé, de 1810 à 1838, des paysages à l’huile et à l’aquarelle, représentant des vues prises, pour la plupart, aux environs de Paris. Il a gravé a 1 eauforte, une suite de dix sujets du même genre, et plusieurs pièces ont été exécutées d’après ses dessins par Louis Marvy.

BERTHAULT (Louis - Martin), architecte, né à Paris en 1771, mort en 1823. Il était sans rival comme dessinateur de jardins ; et, sous ce rapport, il mérite d’être appelé le Lenâtre du xixe siècle. Le dessin du parc de la Malmaison, pour l’impératrice Joséphine, est le premier par lequel il se soit fait connaître. On lui doit aussi ceux de Saint-Leu, du Rainey, de Condé, de Saint-Brice, de Navarre, de Château-Margaux, de Compiègne, de Bondy, de Ruslay, d’Armanvilliers et de beaucoup d’autres qui ont été tracés sur ses plans, etc. Il avait commencé, à Rome, avant les événements de 1814, la construction d’un gigantesque palais pour le fils de Napoléon.

Bertault était architecte du château de Compiègne, qu’il restaura. Il construisit ou restaura beaucoup d’hôtels somptueux à Paris, et fournit les plans d’un grand noir.bre de constructions pour divers pays de l’Europe.’Il était architecte de l’Empereur et chevalier de la Légion d’honneur. Il a gravé à l’aqua-tinta une suite de vingt-quatre Vues de jardins anglais.

BERTHE s. f. (bèr-te — n. pr.) Cost. Sorte de collet ou de pèlerine étroite, que les femmes portent par-dessus leur robe : Elle lui mit une charmante robe de soie à reflets rosés, ornée d’un haut volant de dentelle et d’une berthe semblable. (Cl. Robert.) || Natte, bandeau de faux cheveux que les femmes ajoutent aux leurs, quand elles les trouvent insuffisants. || À la Berthe, En doubles bandeaux plats, les cheveux divisés sur le front : De chaque côté de la figure d’Ursule, qui se coiffait naturellement elle-même À la berthe, ses cheveux fins et blonds abondaient en grosses nattes aplaties. (Balz.)


BERTHE, fille de Caribert, comte de Laon, surnommée Berthe au grand pied, parce qu’elle avait, dit-on, un pied plus grand que l’autre, morte à Choisy en 783, dans un âge avancé, enterrée à Saint-Denis auprès de Pépin le Bref, son époux. Son tombeau, restauré par les soins de saint Louis, portait cette unique inscription : Berta, mater Caroli Magni. Les poètes et les légendaires français ont célébré sur tous les tons Berthe au grand pied. Les uns en font la fille d’un empereur de Constantinople ; les autres la font descendre de Flore, roi de Hongrie, et de la reine Blanche-Fleur. Pépin, ayant entendu louer les vertus et les charmes de la jeune princesse de Hongrie, fit demander sa main, et Berthe partit pour la France, sous la garde de son cousin Tybers, et en compagnie de deux femmes, ses suivantes, Margiste et Aliste, fille de cette dernière, qui avait avec Berthe une extrême ressemblance do traits ; ressemblance qui devait être fatale à la jeune princesse. En effet, Margiste conçut la pensée de tromper le roi de France et de substituer, dans sa couche, Aliste à sa noble maîtresse. Pour parvenir à ses fins, elle persuade à Berthe que Pépin est une sorte de monstre qui étouffe dans ses bras les vierges qui sont l’objet de ses premiers embrassements, et lui propose de changer de nom, pour quelques jours seulement, avec Aliste, qui reprendra son rang inférieur aussitôt que le danger sera passé. Berthe accepte toutes ces conditions, et la serve est conduite dans la couche royale. La nuit même, des traîtres gagnés par Margiste, et à leur tête Tybers, saisissent la véritable Berthe, qu’ils entraînent dans une forêt près du Mans, et où ils allaient lui trancher la tête, quand l’un d’eux, nommé Morant, écoutant la voix du remords et de la pitié, obtient de ses complices qu’ils laisseront fuir la princesse. Celle-ci, devenue libre après de mortelles angoisses, s’en va frapper à la porte d’un garde-chasse nommé Simon, qui la recueille avec bonté et la confie aux soins de sa femme et de sa fille. Elle y resta longtemps comme simple chambrière, et passa huit années à filer la quenouille.

Cependant Blanche-Fleur, qui avait vu mourir tous ses enfants, désira revoir sa fille, et juger par elle-même du bonheur qu’elle éprouvait sur le trône de France. Aliste fut épouvantée de cette résolution, car elle comprenait qu’il lui serait difficile de tromper les yeux d’une mère. Sur ce trône où elle était montée par un crime, elle s’était rendue odieuse à toute la nation par son avarice, son insolence et sa méchanceté. Sur toute sa route, Blanche-Fleur recueillit les malédictions du peuple. « Voilà, s’écriait-on de toutes parts, la mère de la plus méchante reine qui fut jamais. » Blanche-Fleur, qui connaissait sa fille, était étonnée et douloureusement surprise. Enfin, elle fait son entrée dans Paris ; le roi Pépin va à sa rencontre, et lui dit que sa fille est malade et ne peut supporter l’éclat du jour, ni même la lumière des flambeaux. Pourtant Blanche-Fleur pénètre dans les appartements, et entend sortir de la couche royale des mots d’impatience et de dépit. « Qu’entends-je ? s’écrie-t-elle ; non, ma fille ne peut m’accueillir ainsi ; non, celle-là n’est point ma fille. Ma fille m’aurait ouvert ses bras et pressée sur son cœur. » En prononçant ces mots, elle écarte fiévreusement la couverture et regarde les pieds d’Aliste : « Non, non, s’écrie-t-elle de nouveau, ce n’est point là ma fille. Mais qu’en a-t-on fait ? On me l’a tuée. » Le roi Pépin entre sur ces entrefaites ; Aliste, dans son trouble, avoue tout ; et comme le roi en a eu deux enfants, elle est enfermée dans un couvent, et Margiste brûlée vive. Alors le bon Morant fait connaître toute la vérité, et Pépin brûle de retrouver la véritable Berthe ; mais toutes ses recherches sont inutiles. Un jour que, triste et pensif, il était emporté par l’ardeur de la chasse dans la forêt du Mans, il s’égara et se vit tout à coup séparé de ses compagnons. C’est alors qu’il aperçut au pied d’une croix, élevée à l’endroit le plus profond de la forêt, une jeune femme agenouillée, dont la beauté le frappa vivement. Pour sauver son honneur, Berthe se fit reconnaître : « Arrêtez, dit-elle, je suis la fille du roi Flore, je suis Berthe au grand pied ! » Son retour à la cour fut un véritable triomphe. Elle eut du roi Pépin six enfants, dont l’aîné fut Charlemagne.

Tels sont les faits popularisés par des légendes qui semblent remonter jusqu’au xiiie siècle, et sur lesquels un roman rimé, de la seconde moitié du xiiiie siècle, a été composé par un ménestrel nommé Adenès. Ce roman est écrit en vers de douze syllabes et à couplets monorimes. Il n’y a, dans ce poëme, aucun artifice de composition ; les événements y sont racontés avec une grande simplicité et dans l’ordre où ils se sont succédé. Ce qui en fait le charme, c’est la candeur, l’abandon et la confiance naïve du poète, qui ne laisse échapper aucune occasion d’exprimer sa colère contre l’orde vieille (Margiste), la fausse royne (Aliste) et le traître Tybers ; pour eux, il n’a pas as-