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français. À la clôture de 1783, les comédiens, alors fort improprement appelés italiens, quittèrent l’Hôtel de Bourgogne, qu’ils avaient occupé soixante-sept ans, et portèrent leur nom et leurs talents à la salle nouvellement bâtie sur un terrain dépendant des jardins de l’hôtel Choiseul, et qui prit le nom de Favart. Cette salle fut inaugurée le 23 avril 1783, et le 4 septembre suivant mourait le dernier arlequin de la Comédie italienne, le fameux Carlin. Quant à l’Hôtel de Bourgogne, qui avait été témoin des premiers tâtonnements de notre littérature dramatique, lui qui avait entendu les premiers éclats de rire de la Comédie et les premiers sanglots de la Tragédie, lui qui avait abrité dès sa naissance la muse souriante, gaie et tendre de la musique nationale, lui qui portait tant de gloire à son fronton et dont les échos répétaient encore les noms les plus illustres de l’art français, il vit un jour Thalie aux pieds légers, Melpomène en sa pourpre, Euterpe et Terpsichore, le quitter et fuir loin de lui en faisant tinter les grelots de la folie. On jugea que le dieu du commerce pouvait élire domicile dans le temple jusque-là réservé aux augustes filles de Jupiter. Approprié à sa nouvelle destination par l’architecte Dumas, l’Hôtel de Bourgogne devint… la halle aux cuirs. Ceci se passait en 1784. Mais ce n’était pas tout. Après avoir, durant quatre-vingt-deux ans bien comptés, prêté sa noble carcasse à MM. les corroyeurs, à MM. les peaussiers et à MM. les cordonniers, vu ses murs, ses escaliers et jusqu’à ses loges, encore imprégnés des plus délicats parfums, subir l’outrage quotidien d’un air empesté, on le dédaigne encore une fois, on le quitte de nouveau et, devenu gênant pour la circulation publique, sa chute définitive est décrétée (1866). Mais ses pierres pourront tomber, ses fondements pourront être arrachés du sol, et le lieu où il se dressait pourra devenir une place ou un boulevard, l’Hôtel de Bourgogne n’en sera pas moins toujours vivant dans la glorieuse histoire de l’art français. Corneille et Racine, Scarron et Marivaux, Favart et Sedaine, Grétry, Philidor et Monsigny sont des architectes qu’on n’exproprie point pour cause d’utilité publique, et le souvenir de leurs œuvres conservera à jamais celui du monument dont nous venons de rappeler l’histoire.


BOURGOGNE, bourg de France (Marne), ch.-l. de cant., arrond. et à 12 kiloin. N. de Reims ; pop. aggl. 904 h. — pop. tot. 1, 014 h. Filatures et tissus, tamis ; église du XIIIe siècle, classée au nombre des monuments historiques.


BOURGOIN (Bergusium), ville de France (Isère), ch. l. de cant., arrond. et à 15 kilom. de la Tour-du-Pin, sur la Boubre ; pop. aggl. 3, 752 hab. — pop. tot. 4, 851 hab. Tribunal de 1re instance. Filature de soie et de coton, taillanderie, tannerie ; commerce actif de toiles, chanvre, laine, et principalement de farines recherchées. On remarque à Bourgoin: l’église Saint-Antoine, les murs du château de Beauregard et deux jolies places ornées de fontaines. J.-J. Rousseau, exilé après la publication de l’Émile, se cacha pendant quelque temps au château de Montquin, situé à 2 kilom. de la ville.


BOURGOIN (Edmond), prieur des jacobins de Paris. Il se montra l’un des plus farouches ligueurs, et, dans ses sermons, il comparait le meurtrier d’Henri III, Jacques Clément, à Judith. En 1589, il prit les armes pour défendre Paris, assiégé par les soldats d’Henri IV, et fut fait prisonnier à l’assaut donné par eux à un des faubourgs. On le conduisit à Tours, et il fut condamné à mort ; quelques historiens disent qu’il mourut sur la roue, d’autres qu’il fut tiré à quatre chevaux (1590).


BOURGOIN (Marie-Thérèse-Étiennette), comédienne française, née à Parisien 1785, morte en 1833. Elle fut présentée, presque enfant, à Mlle Dumesnil, la célèbre tragédienne, qui l’accueillit avec bonté, devinant l’avenir réservé à la jeune fille. Celle-ci débuta, en 1790, à la Comédie-Française, par les rôles d’Amélie dans Fénelon, tragédie de Chénier, et d’Agnès de YEcole des femmes. Les charmes de sa figure et la grâce de sa personne lui valurent un succès prodigieux ; cependant elle ne fut admise comme sociétaire qu’en 1801, sur la recommandation expresse du ministre de l’intérieur Chaptal. Elle jouait à la fois les rôles de jeune première dans la tragédie et la comédie ; on pouvait lui reprocher un peu de froideur comme tragédienne, et son talent se prêtait mieux à représenter les jeunes filles qui cachent un peu de malice sous un petit air déHimidité que l’habitude du monde n’a pu encore leur faire perdre. Appelée en Russie en 1800, Mlle Bourgoin parut sur le théâtre de Saint-Pétersbourg, fut vivement applaudie et reçut de riches cadeaux de l’empereur Alexandre et de plusieurs hauts personnages de la cour. À son retour en France, elle eut le bon goût de suivre les conseils et les leçons de Talma; on s’en aperçut bientôt par les progrès qu’on remarqua dans la manière dont elle jouait les rôles tragiques, surtout ceux d’Electre, de Clytemnestre et d’Antlromaqufi. Peu de temps après la mort de Talmu, M’ie Bourgoin, cédant à l’ennui que lui causèrent quelques intrigues de coulisses, demanda sa retraite. La nostalgie du théâtre aida, dit-on, à abréger ses jours, M’e Bourgoin avait beaucoup d’es—’

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prit naturel, et, dans l’intimité, elle savait trouver des mots très-piquants et quelquefois un peu libres, ce qui la fit comparer à la célèbre Sophie Arnould. Une grande dame de la cour, impériale, qui avait perdu un perroquet auquel elle tenait beaucoup, s’étant imaginé que M’ic Bourgoin avait cet oiseau chez elle, lui écrivit une lettre prétentieuse au bas de laquelle elle étala tous ses titres. Mlle Bourgoin prit sur-le-champ une feuille de papier et répondit : " Ni vu ni connu, » puis elle signa Tphigénie en Aulide. La chronique scandaleuse du temps a donné beaucoup d’amants à M" » Bourgoin. Napoléon lui-même passa pour avoir eu ses faveurs.

BOURGOING (NoSl), ecclésiastique et jurisconsulte français du xvie siècle. Il fut abbé de Bouries, trésorier du chapitre de Nevers, président de la chambre des comptes de la même ville, puis conseiller au parlement de Paris. Il fut l’un des principaux rédacteurs de la Coutume de Nevers, et eut pour neveu Gui Coquille.

IIOURGOING (François), dit d’Agnon, historien français du xvie siècle, de la famille du précédent. Il était chanoine de Nevers lorsque, ayant, embrassé la Réforme, il se rendit en 1556 à Genève, où il habita quelque temps. Il revint plus tard en France et fut pasteur des réformés à Troyes. On lui doit la traduction des œuvres complètes de Flavius Josèphe. (Paris, 1570), et une Histoire ecclé-' siastique, extraite en partie des Centuries de Magdebourg (Genève, 1560-1565, 2 vol. in-fol.).

BOURGOING (François), un des fondateurs de l’Oratoire et le troisième général de cette congrégation, né à Paris en 1585, mort en 1G62. Docteur en Sorbonne, puis curé de Clichy, il fut un des six prêtres que le cardinal de Bérulle s’associa pour établir la congrégation de l’Oratoire, et il en fut nommé général après la mort du P. Condren.(lfi4l). il vit son administration troublée par des luttes avec les pères de son ordre, luttes provoquées par l’abus qu’il était accusé de faire de son autorité. Il a composé des règlements et des statuts qui ont semblé, en certaines de leurs parties, minutieux et oppressifs. On a de lui quelques ouvrages de piété et de discipline ecclésiastique, plus estimables pour le fond que remarquables dans la forme. Les principaux sont : Verilales et sublimes excelleittiœ Verbi incarnati (Anvers, 1C30, 2 vol. in-S"), ouvrage qui a. été traduit en français sous le titre de:Vérités et excellences de Jésus-Christ, et qui a eu un nombre considérables d’éditions ; Homélies sur les évangiles des dimanches et fêtes (16-12); Homélies des saints sur le martyrologe romain (1651, 3 vol.).

BOURGOING (Jean-François, baron de), diplomate et publiciste, né à Nevers en 1748, mort en 1811, était de la famille des trois précédents. Attaché de bonne heure aux légations et ambassades, il devint, en 1791, ministre plénipotentiaire près la cour de Madrid, entama à Figuières les premières négociations de la paix avec l’Espagne, fut chargé par Napoléon de la légation de Saxe, et assista en cette qualité au congrès d’Erfurth. On a de lui quelques ouvrages estimés:Tableau de l’Espagne moderne (1789) ; Mémoires historiques et philosophiques sur Pie VI (179S) ; une traduction de Y Histoire des flibustiers, de d’Archenholtz, etc. ; Histoire de l’empereur Charlemagne, traduite de l’Allemand Hegewiseh (1805); un roman intitulé:Correspondance d’un jeune militaire ou Mémoires du marquis de Lusigny et d’Hortense de Saint-Just (1778, 2 vol.) ; enfin Voyage du duc du Châtelet en Portugal (1S08, 2 vol.).

BOURGOING (Armand-Marc-Joseph de), fils aîné du précédent, né à Nevers en 1786. Après avoir suivi l’École militaire de Fontainebleau, il entra comme officier dans les dragons et se trouva à la bataille d’Austerlitz. lise distingua ensuite en Prusse, en Pologne, et sa bravoure attira l’attention de Napoléon, qui, pour la récompenser, donna la croix au jeune officier, et le nomma son ministre en Saxe. Devenu aide de camp du maréchal Ney, de Bourgoing fut fait prisonnier et ne put rentrer en France qu’après la Restauration.

BOURGOING (Charles-Paul-Amable, baron de), diplomate français, frère du précédent,. né k Hambourg en 1791, mort en 1864. Il servit dans la jeune garde pendant les dernières guerres de l’empire, entra dans la diplomatie sous la Restauration; fut attaché à diverses ambassades, et représenta la Fiance à Saint-Pétersbourg (1828-1832), en Saxe (1832-1835), enfin en Bavière (1S35-1S41). Nommé à cette époque pair de France, il siégea jusqu’à la révolution de Février, qui l’écarta momentanément des affaires. Le président Louis-Napoléon l’appela à l’ambassade d’Espagne en 1849, et au sénat en 1852. Il a publié quelques écrits, entre autres : Tableau des chemins de fer en Allemagne (1842), et les Guerres d’idiomes et de nationalités (1849), où il proscrit les guerres d’indépendance comme pouvant compromettre l’équilibre européen. On lui doit également des Souvenirs d’histoire contemporaine (1854), et des Souvenirs intimes., : <ecueil de faits relatifs pour la plupart à la vie de l’auteur, racontés avec bonhomie, et qui parurent seulement quelques mois avant la mort du baron de Bourgoing.

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BOURGOING DB VILLEFORE. V. Villb-

FORB.

BOURGOISAGE s. m. (bour-goi-za-je). Bourgeoisie, il Vieux mot.

BOURGON (Jean-Ignace-Joseph), historien français, né à i’ontarlier en 1799. Il obtint la chaire d’histoire à la Faculté de Besançon, et il a publié : Polybe considéré comme historien romain ; Histoire ancienne (1834) ; Histoire des Romains (1836) ; Abrégé de l’histoire de l’empire romain jusqu’à la prise de Constantinople ; Recherches historiques sur la ville et l’arrondissement de Pontarlier (1840).

BOURGONNIÈRE (château de la). Ce château est, assure M. Blancheton, un des plus anciens de l’Anjou, L’époque de sa fondation est incertaine. Presque détruit pendant la guerre de la Vendée, le bâtiment principal fut reconstruit dans le style moderne. Deux édifices qu’on aperçoit à chacun de ses côtés ont seuls échappé aux ravages du temps et des hommes. L’un est une tour dont les murs épais, les créneaux, le donjon qui la, surmonte, rappellent le génie guerrier dé nos pères ; l’autre est une chapelle qui jadis fut fortifiée. À l’extérieur, ses tours, ses ogives, ses murs couverts de croix de templiers ; au dedans, ses vitraux où se retrouve le même signe, avec la coquille du pèlerin et le cimeterre arabe, tout lui donne un aspect religieux et guerrier Une statue de proportions colossales attire les regards ; on ne sait si c’est celle de Jésus-Christ ou d’un templier. Les plus importantes familles de France ont possédé ce château, qui, du reste, offre peu de souvenirs historiques.

BOURGRAVE s. m. (bour-gra-ve). S’est dit quelquefois pour burgravl ;. V. ce mot.

BOURGTHÉttOULDE, bourg de France (Eure), ch.-l. de cant., arrond. et à 35 kilom. S.-E. de Pont-Audemer ; pop. aggl. 508 hab.

— pop. tôt. 715 hab. Commerce de bestiaux et de toiles. Magnifique château dont il ne subsiste plus que le pavillon d’entrée et le colombier. L’église a conservé une tour carrée du xve siècle et quelques beaux vitraux de la Renaissance.

BOURGUÛBUS, village de France (Calvados), ch.-l. de cant., arrond. et à 10 kilom. S.-É. de Caen ; pop. aggl. 185 hab. — pop. tôt. 278 hab. Belle église du xin » siècle ; le chœur appartient au premier style gothique, tandis que la porte ogivale du sud est du xv « siècle. La corniche extérieure du chœur est ornée de feuillages, au milieu desquels se montrent des figures en relief d’hommes et d’animaux.

BOURGUËIL (Burgalium), ville de France (Indre-et-Loire), ch.-l. de cant., arrond. et à 17 kilom. N.-O. de Chinon, sur la rive droite duChangeau ; pop. aggl. 1, 553 hab. — pop. tôt. 3, 416 hab. Commerce de porcs, chanvre, vins et bestiaux. Restes d’une ancienne abbaye de bénédictins, fondée en 990 ; église du xne siècle, dont l’abside surtout est fort remarquable.

BOUHGUEIL (N.), vaudevilliste français, né à Paris en 1763, mort en 1802. Il a fait représenter un assez grand nombre de pièces, dont celles qui eurent le plus de succès sont : le Pour et le contre, en un acte (isoi) ; Gesner, en collaboration avec Barré, Radet et Desfontaines, deux actes (1800) ; Monsieur Guillaume ou le Voyageur inconnu, deux actes (1800), avec les mêmes collaborateurs ; le Mur mitoyen ou le Divorce manqué (1802), avec Barré. On trouve aussi des chansons de Bourgueil dans les Dîners du Vaudeville.

BOURGUEMESTRE s. m. (bour-ghe-mèstre

— rad. bourgmestre). Ornith. Espèce de goéland des mers du Nord.

BOUHGUET (Louis), naturaliste et archéologue, né à Nîmes en 1678, mort à Ncufchàtel en 1742. Sa famille avait été exilée de France par la révocation de l’édit de "Nantes. Il fit de nombreux voyages en Italie, et en rapporta de riches collections d’antiquités. L’archéologie et l’histoire naturelle lui doivent quelques progrès. Ses principaux ouvrages sont:Dissertation sur les pierres figurées (1715) ; Traité des pétrifications (1762) ; Lettres philosophiques sur la formation des sels et des cristaux (1729), écrits dans lesquels il émit quelques idées judicieuses et neuves sur les fossiles, la formation des cristaux, les révolutions géologiques, etc. Comme archéologue, il a rendu des services réels à la paléographie étrusque. On lui doit notamment la découverte de l’alphabet étrusque. Membre des Académies de Berlin et de Ûortone, Bourguet entretenait une correspondance avec Leibniz, qui l’estimait fort pour ses connaissances en philosophie; car il avait étudié à fond tous les systèmes. Il termina ses jours dans la ville de NeiiRhâtel, où il s’était marié et où l’on avait créé pour lui une chaire de philosophie et de mathématiques. Outre les ouvrages déjà cités, Buuiguet a laissé des Opuscules mathématiques (Leyde, 1794) et un grand nombre de mémoires et d’articles insérés dans le recueil de l’Académie des sciences, le Journal helvétique, etc.

BOCRGCEVILLE (Charles de), sieur de Bras, antiquaire et écrivain français, né à Caen en 1504, mort en 1593. II fut attaché a la cour de François Ier et suivit ce monarque dans un voyage où il parcourut toutes les parties de la France. Il obtint ensuite la

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charge de lieutenant général do Caen. Son ouvrage le plus important est intitulé : les Recherches et antiquités de ta province de Neustrie, à présent duché de Normandie, comme des villes remarquables d’icelle et spécialement de la mile et université de Caen (158S). On lui doit en outre : Version française de Darès en Phrygie ; Discours de l’Église, de la religion et de la justice ; l’Athéomachie et discours sur l’immortalité de l’âme et la résurrection des corps.

BOURGUIÈRE s. f. (bour-ghi-è-rc). Pêch. Nasse à petites mailles.

BOURGUIGNON, onne adj. et s. (bourghi-gnon ; gn mil.) Géogr. Qui est de la Bourgogne, qui a rapport à la Bourgogne ou à ses habitants : Type bourguignon. Mœurs bourguignonnes. Le pays BOURGUIGNON. Si on veut retrouver encore quelque chose du type gaulois, il faut le chercher chez le Bourguignon.

— Art culin. Qualification donnée à plusieurs mets préparés au vin : Bœuf bourguignon.

— Hortic. Variété de raisin. Syn. de bou-

CARÈS OU DAMAS.

— S. m. Mar. Glaçon isolé, dans la mer du Nord. • « »

Bourguignon salé, Expression populaire que l’on retrouve dant le quatrain suivant :

Bourguignon salé,

L’epiîe au côté,

La barbe au menton.

Saute, Bourguignon.

C’est un trait satirique à l’adresse des Bourguignons, qui furent presque constamment les alliés de l’Angleterre pendant, les guerres séculaires que la France eut à soutenir avec ses redoutables voisins. La plupart des origines que l’on a données de co dicton proverbial sont contradictoires. Nous n’avons pas la prétention d’indiquer celle qui présente le plus d’authenticité ; nous nous bornerons à les faire connaître à nos lecteurs.. Quelques auteurs, parmi lesquels Olivier de Serres, prétendent que, en 1422, Jean de Châlons, prince d’Orange, s’empara d’Aigues-Mortes et y laissa, pour le compte de Philippe, duc de Bourgogne, trois compagnies de Bourguignons. Les bourgeois, qui supportaient difficilement leur joug, firent un jour main basse sur la garnison, et la passèrent tout entière au fil de l’épée. Soit que, en ce temps de terribles représailles, ils aient voulu conserver les cadavres pour les présenter à leur roi légitime comme un trophée de leur fidélité, soit qu’ils aient craint que de cet amas de corps en putréfaction il résultât une de ces épidémies pestilentielles si fréquentes à cette époque, ils les coupèrent en morceaux, les salèrent et conservèrent dans une cuve ces atroces débris.

Le Glossaire alphabétique, placé à la suite des Noëls bourguignons, publiés à Dijon en 1720, attribue l’expression de Bourguignon salé à ce que ce peuple fut le premier de tous les peuples de la Germanie qui embrassa le christianisme, d’où ses voisins, restés païens, leur donnèrent la qualification de salés, à cause du sel que l’on met, de nos jours encore, dans la bouche de ceux que l’on baptise.

Le Duchat pense que l’appellation qui nous occupe vient de la salade ou bourguignotte, espèce de casque particulier à la milice bourguignonne, ou, peut-être, do la rivière la Saale, sur les bords de laquelle ce peuple a pris naissance.

Enfin M. Lepère, qui ; en 1857, a fondé à Auxerre l’almanach le Bourguignon salé, faisant du mot sel le synonyme du mot esprit ; prétend que les Bourguignons ont mérito cette épithète par la finesse et. la vivacité de leurs reparties.

Quoi qu’il en soit de toutes ces versions, nous les préférons à colle qui est adoptée dans quelques régions de la France, qui, jalouses de la Bourgogne et de ses vins, font de ses habitants des disciples d’Épicure, et, donnant au mot une extension que rien ne justifie, appellent Bourguignon salé'l’animal tpropter convivia natum •.

Bourguignonne* (les), opéra-comique en un acte et en prose, paroles de M. Henri Meilhac, musique de M. Louis Deffes, représenté pour la première fois à Bade, puis à l’Opéra-Comique, le 16 juillet 1S63. Manette est venue passer quelques jours à la ferme de son cousin par alliance, Landry, dont la femme Thérèse a le tort de faire la besogno de son homme, ce qui permet à celui-ci de se livrer k une oisiveté dangereuse pour la paix du ménage. Heureusement, Manette est une fine mouche. Elle éconduit Landry, qui cherche a lui conter fleurette, et, grâce à ses coiv seils, Thérèse écarte à temps le danger qui menace son bonheur conjugal. Manette apprend à la jeune femme le secret du ménage, c’est-à-dire l’art de tenir un époux en haleine, en inquiétant son orgueil et son cœur. Ce petit poème ne manque ni d’esprit ni d’habileté. C’est un agréable marivaudage en sabots. Le sujet est usé jusqu’à la corde, mais les variations ont presque le mérite de la nouveauté. Cette agréable saynète eut d’ailleurs l’avantage de servir de début, à l’Opéra-Comique, h MU » Girard, la seule Dugazon de notre époque, qui chantait avec un brio incomparable -■—. Tends ton verre, la Bourguignonne.-On

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