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eux‑mêmes qu’à se procurer des avantages particuliers, et nullement à cesser la guerre ; à plus forte raison ceux qui avaient refusé leur soumission. Inutile d’ajouter que cet inextricable réseau d’insurrections qu’on appelait la guerre de l’ouest s’appuyait sur l’Angleterre et en recevait des secours de toute nature. La guerre continua donc en beaucoup d’endroits, jusqu’au moment où elle reprit partout par la trahison des chefs royalistes, qui avaient juré la paix. Nous citerons ici un passage d’une lettre du général Hoche qui peint en quelques traits le caractère de cette guerre ; il écrit à Aubert‑Dubayet :

« Je vais vous esquisser le genre de guerre que nous ont faite et que nous font encore des bandes composées de voleurs, de prêtres, de contrebandiers, d’émigrés, d’échappés des galères et de déserteurs. Réunis sous des chefs qui sont ordinairement du pays, les chouans se répandent imperceptiblement partout, avec d’autant plus de facilité qu’ils ont partout des agents, des amis, et qu’ils trouvent partout des vivres et des munitions, soit de gré, soit de force. Leur principal objet est de détruire les autorités civiles ; leur manœuvre, d’intercepter les convois, d’assassiner les patriotes des campagnes, de désarmer nos soldats lorsqu’ils ne peuvent les embaucher, d’attaquer nos cantonnements, postes ou détachements, lorsqu’ils sont faibles, et enfin de soulever les habitants des villes même en les affamant ; leur tactique est de combattre derrière les haies… Vainqueurs, ils égorgent et pillent ; vaincus, ils se dispersent et assassinent les bons habitants des campagnes, que la terreur et le fanatisme divisent. »

Lors de l’expédition de Quiberon, un grand nombre de chouans furent dirigés sur le point de débarquement pour prêter la main aux Anglais et aux émigrés. On sait quel fut pour le parti royaliste le résultat désastreux de cette tentative. La chouannerie en reçut un contre-coup terrible, mais n’en fut pas encore abattue. En outre, un peu plus tard, Charette et Stofflet rallumaient l’incendie en Vendée, espérant vainement une descente du comte d’Artois sur la côte ; mais, comme on le sait, le prince ne fit que poser le pied à l’Île-Dieu, et il fut définitivement arrêté dans son conseil privé qu’on ne pouvait exposer une vie aussi précieuse (octobre 1795).

Mais déjà, sur tous les points, l’insurrection était en décadence. Les continuelles dissensions des chefs, la découragement des soldats, les mesures aussi prudentes que vigoureuses de Hoche, finirent par dompter la révolte. Charette, Stofflet et d’autres chefs durent plier sous la nécessité. En avril 1796, la Vendée, qui, depuis longtemps, n’était plus qu’une chouannerie, fit sa soumission. De Scépeaux conclut le mois suivant un traité avec Hoche et parvint à obtenir l’adhésion de la Mayenne ; la Bretagne, accablée depuis Quiberon, se soumit à son tour, et la pacification fut complète.

La troisième époque de la chouannerie, qui porta aussi le nom de guerre des mécontents, commença vers le milieu de 1799 et se termina au mois de janvier de l’année suivante.

L’insurrection éclata à la fois dans toutes les contrées qui déjà avaient été si longtemps ensanglantées. Les principaux chefs étaient : de Bourmont, de Scépeaux, Georges Cadoudal, de Frotté, et autres, qui avaient déjà marqué dans la guerre civile. De brillants avantages signalèrent l’ouverture de la campagne, et entre autres la prise du Mans ; mais la fureur sauvage qui avait soulevé les hommes de l’Ouest dès 1792 était bien calmée ; ces malheureuses contrées étaient d’ailleurs épuisées, et il fut facile de prévoir l’issue de cette nouvelle lutte. En arrivant au pouvoir, Bonaparte tourna tous ses efforts de ce côté pour obtenir une pacification définitive. Après beaucoup de conférences infructueuses, ayant reconnu que les chouans ne cherchaient qu’à gagner du temps, il fit marcher des troupes nombreuses, et reçut enfin la soumission de la plupart des chefs. Le reste fut dispersé et désarmé. La chouannerie, qui d’ailleurs n’avait plus alors aucune force, fut complétement anéantie.

En 1815, lors du retour de l’île d’Elbe, quelques vieux habitués des guerres civiles, les Dandigné, les Moustache, les Sapinaud, etc., essayèrent de rallumer l’incendie, mais ils furent mis en déroute par Lamarque, après divers engagements.

Le peuple a fait de l’épithète de chouan une injure, flétrissant ainsi des entreprises insensées, appuyées sur l’étranger et qui mirent la France dans un si grand péril. Un écrivain royaliste, J. Duchemin‑Descepeaux a publié, en 1827, des Lettres sur l’origine de la chouannerie (2 vol. in-8°, Imprimerie royale). C’est une réhabilitation systématique, une glorification de cette guerre, que, même à cette époque, les royalistes honnêtes jugeaient sévèrement et distinguaient soigneusement de la Vendée. Toutefois, ce travail, fruit d’une enquête minutieuse, présente un grand nombre de renseignements curieux.

À notre tour, disons qu’il serait bon, qu’il serait français peut‑être, de ne pas se montrer trop sévère envers les chouans, envers la chouannerie. Ici le blâme tomberait sur des paysans ignorants et égarés ; il y aurait de la justice, de l’humanité, de la fraternité à ne point porter un jugement trop farouche sur l’un ou l’autre camp de nos guerres civiles ; et il est probable que si ce brave et honnête républicain qui s’appelle Hoche avait pu écrire les guerres de la Vendée et de la chouannerie, il aurait été de cette opinion.


CHOUANT s. m. (chou-an — abrév. de chat-huant). Ornith. Nom vulgaire de l’effraie. || On dit aussi chouart.

CHOUBE s. f. (chou-be). Agric. Paille de seigle avec laquelle on lie la vigne.

CHOUBRA, lieu de plaisance des vice-rois d’Égypte, créé par Méhémet-Ali, à 4 kilom. N. du Caire, sur les bords du Nil. Le chemin qui y conduit est planté d’acacias et de sycomores formant une ravissante avenue impénétrable au soleil. Les jardins de Choubra ont été dessinés en allées droites ; ils sont remarquables par les fleurs qu’on y a réunies, chose rare en Égypte, Le palais, les kiosques qui bordent un grand bassin en marbre de Carrare, un belvédère d’où la vue s’étend au loin sur le Nil et la campagne environnante, telles sont les principales parties de cette splendide résidence royale.

CHOUC s. m. (chouk — anc. haut allem. chouch, même sens). Ornith. Nom vulgaire du choucas noir.

CHOUCADOR s. m. (chou-ka-dor). Ornith. Nom d’un merle d’Afrique.

CHOUCALGYON s. m. (chou-kal-si-on — de choucas et alcyon). Ornith. Genre d’oiseaux, détaché des martins-pêcheurs : Le cri du choucalcïon géant ressemble, dit-on, à un bruyant éclat de rire. (Lafresnaye.)

— Encycl. Ce genre de passereaux, connu aussi sous le nom scientifique de dacelo et sous la dénomination vulgaire de martin-chasseur, est formé aux dépens des martins-pêcheurs, et présente les caractères suivants : bec très-renflé, très-ample, à mandibule supérieure évasée, voûtée, à bords très-sinueux vers la pointe, à mandibule inférieure fortement arquée en dessous et retroussée ; plumage lâche, soyeux et non lustré ; ailes assez amples, à troisième et quatrième rémiges dépassant les autres ; queue allongée, étagée ; tarses robustes. Ces oiseaux sont particuliers à l’Océanie. Ils se tiennent habituellement dans les forêts, et vivent d’insectes et 3e vers. Bien qu’ils aiment surtout les lieux touffus et humides, on ne les trouve qu’accidentellement au bord des rivières. D’un naturel assez sauvage, ils ne fuient pas cependant la société des autres oiseaux, et on les voit souvent disputer leur proie aux merles et aux moucherolles. Quand ils sont réunis en troupes, leurs cris sont quelquefois assourdissants. Ils nichent dans les troncs d’arbres morts ; la femelle pond quatre ou cinq œufs d’un blanc bleuâtre tiqueté de brun.

L’espèce la plus remarquable est le choucalcyon géant {dacelo gigantea). Cet oiseau dépasse tous ses congénères, qui sont pourtant en général d’assez grande taille ; il a environ 0 m. 40 de longueur totale. Son plumage est blanchâtre, avec le front, les moustaches, la nuque et le dos noirâtres. Cette dernière couleur s’observe aussi sur les ailes, qui présentent quelques taches d’un vert aigue-marine argentin ; le croupion est brun roux, ainsi que la queue, qui est traversée de bandes anguleuses noires, mais qui est blanche sur les côtés et à l’extrémité ; les pieds sont gris et les ongles noirs. La femelle a les plumes de la tête courtes, le dessous du corps blanc et les pieds bruns. Ce chottcalcyon habite l’Australie et la Nouvelle-Guinée ; il vit isolé ou en petites troupes ; son vol est vif, mais court ; son cri ressemble, dit-on, à un éclat de rire, ce qui lui a fait donner le nom d’oiseau moqueur. On l’élève quelquefois en captivité, en lui donnant de la viande crue pour aliment.

CHOUCALLE s. f. (chou-ka-le — de chou, et calle). Bot. Nom vulgaire de la calle ou calla des marais.

CHOUCARI s. m. (ebou-ka-ri). Ornith. Genre d’oiseaux qui habitent les Indes et l’Australie, et que quelques-uns confondent avec les échenilteurs.

CHOUCAS s. m. (chou-ka. — Ce mot, ainsi que le constate Chevallet, est un dérivé de choe, cawe, kauwe, mots qui servaient autrefois à désigner cet oiseau. Il se rattache au sanscrit kâka, kûga, corbeau, corneille ; à l’indoustani, kâk ; au bengalais, kâk, kâg, etc. Evidemment c’est-une pure onomatopée ; aussi la retrouve-t-on dans les langues les plus diverses : en Europe : dans l’ancien allemand, chaha, caha ; le tudesque, caha ; l’anglo-saxon, ceo pour ceho, corneille ; le hollandais, kaa, haioo, kaame ; l’anglais, to kace, crier comme un chouca ; en Asie : dans le mandchou, kaha ; le géorgien, qvaqi ; l’arabe, ghâk ; le malais, gàijak ; le lampoung, kaka ; en Afrique : dans le barabras, kôka, corbeau, etc., etc.). Ornith, Nom vulgaire de la petite corneille des clochers : Le silence était interrompu par les ais des choucas nichés dans le sommet des clochers. (Balz.)

— Nom donné improprement à divers genres d’oiseaux appartenant à différentes familles. Il Choucas des Alpes, Choquard. || Choucas à bec et à pieds rouges, Crave d’Europe, il Choucas chauve, Gymnocéphale capucin. Il Choucas de la Jamaïque ou de Surinam.Espèce de tisserin. Il Choucas de la mer du Sud, Tyran cendré. Il Choucas de la Nouvelle-Guinée, Choucari à ventre rayé. Il Choucas d’Owihée ou du tropique, Phonygame noir. || Choucas des Phi- ! lippines, Drongo cul-blanc. !

CHOU

— Encycl. Le choucas est une espèce de corbeau, qui atteint o m. 40 de longueur totale. Son plumage est noirâtre, d’une teinte plus foncée sur les parties supérieures, avec des reflets verdâtres ou violacés ; le sommet de la tête est noir ; l’occiput et le dessus du cou gris cendré, l’iris blanc, le bec et les pieds noirs. La femelle se distingue du mâle par ses reflets moins apparents. Le choucas est répandu dans presque toute l’Europe et en Sibérie ; mais il quitte nos campagnes au printemps pour se retirer vers le nord, et il ne nous revient qu’à l’automne. Il est de passage dans le midi en hiver, et se mêle souvent aux troupes de corneilles, mais toujours en fort petit nombre. Dans la belle saison, il semble se plaire de préférence sur les clochers, les hautes tours j dans les bâtiments en ruine ; mais il a l’habitude d’aller coucher sur les arbres. Il vit en troupes "quelquefois très-nombreuses. On distingue trois variétés de

choucas.— la noire, la chauve et la cendrée. Il niche dans les vieux troncs ou dans le creux des murs ; souvent il forme des sortes de colonies composées de nids entassés en quelque sorte sur le même arbre. Il fait deux couvées par an, chacune de cinq ou six œufs verdâtres, tiquetés de brun. Il a, comme la corneille, beaucoup d’attachement et de fidélité conjugale, et une grande vigilance pour ses petits. Son cri est plus aigre et plus perçant que celui de la corneille. Sa nourriture consiste en fruits, en graines et en insectes ; rarement il mange de la chair, mais il est très-friand d’œufs, surtout d’œufs de perdrix. Il supporte très-bien la captivité, et s’apprivoise vite et facilement ; il apprend même a articuler et à répéter quelques mots. Il a l’habitude, quand il est rassasié, de cacher en terre le reste de son repas. Comme les pies et les corneilles, il a aussi la manie de dérober et de cacher les monnaies, les bijoux d’or ou d’argent et tous les objets brillants qui se trouvent à sa portée. Le choucas est devenu, pour quelques auteurs, le type d’un genre particulier (monedula), genre peu naturel dans lequel on a réuni non-seulement des espèces de corbeaux, mais encore d’autres oiseaux appartenant à des groupes très-différents. Le choucas des Alpes est le chocart ou choquard.

CHOUCHEMENT s. m. (chou-che-manrad. chouc). Chass. Cri de la chouette : Les appeaux à frouer imitent, lorsqu’on souffle dessus, le cri d’un oiseau, ou son vol, ou le chouchement de la chouette. (Baudrillart.)

CHOUCHETTE s. f. (chou-chèt-te — dimin. de chouc). Ornith. Nom vulgaire du choucas.

CHOU-CHOU S. m. V. CHOU.

CHOUCHOUTÉ, ÉE (chou-chou-té) part, passé du v. Chouchouter : Moi, je te donne à Bizou comme un de mes oncles venus d’Allemagne en faillite, et tu seras chouchouté comme un Dieu. (Balz.)

CHOUCHOUTER v. a. ou tr. (chou-chou-té

— rad. chou-chou, terme d’affection familière). Néol. Choyer, dorloter : Au lieu de vous chouchouter, elle vous fait aller comme un valet. (Balz.)

CHOUCOU s. m. (chou-kou — rad. chouc). Ornith. Espèce de chouette d’Afrique.

— Encycl. Le choucou est une espèce de chat-huant, qui fait partie de la section des Surnies ou chouettes épervières. Cet oiseau est de la grosseur d’un pigeon ; son plumage est d’un gris roussâtre en dessus et d’un blanc pur en dessous ; ses ailes, ainsi que sa queue, qui est étagée, sont mouchetées de blanc. La tête est arrondie. D’iris a une couleur orangée, brillante. Le bec, qui est assez court, et les pieds sont noirs. Le choucou habite l’Afrique australe, et particulièrement les environs du Cap de Bonne-Espérance. Essentiellement nocturne, il a des habitudes et des mœurs semblables à celles des autres chouettes.

CHOUCOUHOU s. m. (chou-kou-ou). Ornith. Espèce de chouette d’Afrique.

— Encycl. Le choucouhon (strix nisuella) habite le Cap de Bonne-Espérance. Sa taille est celle d’une corneille ; son plumage est presque partout d’un brun plus ou moins blanchâtre, varié et tacheté de blanc ou de gris ; la gorge présente une plaque de plumes blanches ; la queue et les ailes ont des barres grises ; les plumes des jamhes sof/i de cette dernière couleur ; l’iris est d’un très-beau jaune ; le bec, qui est caché dans les plumes, et les pieds sont noirâtrès-Cet oiseau présente une particularité remarquable dans son genre : il voit clair, sort et chasse pendant le jour ; de là son nom vulgaire de chouette de jour. C’est probablement le hulul de Levaillant. v

CHOUCROUTE s. f. (chou-krou-te — allem. sauerkraut ; de sauer, aigre ; kraut, chou. Ce mot doit sa forme à cette disposition qu’ont toutes les langues, mais surtout la langue française, à assimiler l’inconnu au connu, ce qui est une source inépuisable de paronymes. De sauer, acide, nous avons fait chou, et da kraut, herbe, chou, nous avons fait croûte. Quelque absurde que soit ce.travestissement d’expression, MM. les Allemands n’auraient pas fort bonne grâce de s’en moquer, car ils en ont fait plusieurs qui valent bien choucroute. Les Grecs donnaient le nom de kentaureia, l’herbe du centaure, aune certaine plante fort usitée en médecine ; à leur exemple, les Latins la nommèrent cenlaurea ; nous l’appelons centaurée ; les Allemands ont dé CHOU

composé centaurea en centum aurea, cent pieces d’or, et ils ont traduit ce mot par tausend-gùlden-kraut, herbe aux cent écus. C’est identiquement le procédé de l’écolier qui traduisait abii summa diligentiayarje suis parti sur l’impériale). Choux hachés qu’on a mis fermenter dans le sel : Un plat de choucroute. La choucroute est un aliment aussi sain qu’agréable. (Grimod.) [| Préparation de citrouilles faite d’une façon analogue.

— Pop. Tête de’choucroute, Mangeur de choucroute, Allemand.

— Encycl. La choucroute peut se préparer avec toute espèce de choux, mais on emploie de préférence le cabus blanc. Après avoir enlevé les grandes feuilles pendantes de la tige, on coupe les tètes des choux., au moyen d un couteau à bascule ou d’une colombe de tonnelier, en tranches minces qui se divisent elles-mêmes en rubans sinueux. Cette opération préliminaire terminée, on étend au fond d’un grand pot de grès, ou mieux d’un tonneau oui a contenu du vin, du vinaigre ou de l’eaude-vie, une couche de sel de cuisine, par-dessus laquelle on en place une autre de choux divisés, épaisse d’environ o m. 10, et que l’on aromatise avec du poivre en grains et des semences de genièvre ou de carvi. On ajoute une seconde couche de sel, puis une seconde couche de choux de même épaisseur semblablement aromatisée, et l’on continue ainsi jusqu’à ce que le vase où l’on opère soit plein. Seulement, il faut que la dernière couche soit une couchéde sel. De plus, dès la troisième couche, il est nécessaire de bien comprimer les choux, et l’on obtient ce résultat, soit en les foulant avec un pilon jusqu’à ce que leur hauteur se trouve réduite au tiers, soit, comme c’est l’usage dans les pays où la préparation de la choucroute a lieu sur une très-grande échelle, en les faisant piétiner par un homme. Dans tous les cas, on répète ce foulage à chaque couche. Le remplissage du vase ou du. tonneau étant achevé, on couvre le dernier lit " de sel avec des feuilles vertes, sur lesquelles on étend une toile humide, et l’on met par-dessus un couvercle que l’on charge d’un poids suffisant pour empêcher la masse de se soulever pendant la fermentation. Elle ne tarde pas, en effet, à se développer. Avec le sel et les autres matières qu’elle entraîne ou dissout, l’eau de végétation forme un liquide verdâtre, fétide et boueux, qui surnage et que l’on enlève tous les cinq ou six jours, dans les premiers temps, pour le remplacer par une saumure nouvelle, de manière que les choux soient toujours couverts d’une couche de" 0 m. 07 à 0 m. 08. On continue les mêmes soins jusqu’à ce que la saumure ne contracte plus de mauvais goût, ce qui arrive au bout de douze à dix-huit jours, suivant la température du lieu, laquelle ne doit pas être trop élevée. Il faut généralement six semaines ou deux mois, à partir de la mise en tonneau, pour que la choucroute soit bonne à manger.

La choucroute se consomme de plusieurs manières ; mais, en général, on la fait cuire avec de la graisse de rôti, du lard ou du petit salé, en la mouillant légèrement soit avec de l’eau chaude, soit, ce qui est préférable, avec du bouillon. Au sortir du tonneau, on la soumet toujours à plusieurs lavages à l’eau fraîche, pour la débarrasser de la saumure et des autres substances étrangères qu’elle peutcontenir. On la passe ensuite à l’eau bouillante, si elle est trop salée. Préparés en choucroute, les choux sont beaucoup plus digestibles qu’à l’état ordinaire. Ils ont une saveur particulière, acide et presque vineuse, ainsi que des propriétés légèrement excitantes, qui les font rechercher dans tous les pays du Nord, où ils constituent un aliment en quelque sorte national. Ils sont, en outre, très-sains, très-faciles-à conserver, et ces circonstances, jointes à des qualités antiscorbutiques qu’on leur attribue généralement, leur font jouer, surtout en Angleterre, un rôle assez important dans les approvisionnements maritimes. C’est, assure-t-on, à la choucroute que le capitaine Cook dut l’état de santé dans lequel il maintint son équipage pendant une navigation de plus de trois ans ; il en faisait distribuer à ses hommes deux ou trois fois par semaine. La choucroute destinée à être embarquée est enfermée et bien foulée, avec de la saumure nouvelle, dans des barils autres que ceux où elle a été préparée. En mer, quand on craint qu’elle ne fermente de nouveau, on réussit ordinairement à prévenir cet inconvénient en renouvelant la saumure, ou bien, quand on ne peut Se procurer de la saumure fraîche, en faisant bouillir l’ancienne, puis la remettant dans le baril après l’avoir laissée refroidir. Quelques millièmes d’acide sulfureux introduits dans le baril facilitent beaucoup la conservation.

La choucroute dite de potiron ou de citrouille, que l’on consomme dans quelques localités, se prépare à peu près de la même manière que la choucroute proprement dite. Après avoir débarrassé les citrouilles de l’écorce, des filaments et des pépins, on les divise en bandes très-minces, que l’on enferme, par couches successives, saupoudrées de sel et aromatisées avec quelques grains de poivre ou des baies de genièvre, dans des pots de grès ou de faïence ou dans des barils. On descend ces pots ou ces barils à la cave, et, nu bout de cinq à six semaines, on peut en consommer le contenu. Lu choucroute de citrouille est loin d’avoir les mêmes propriétés que celle de choux.