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Le désespoir du vieillard navre Gaspard de Saverny ; il voudrait tout lai dire, mais Briehanteau l’en empêche ; il a vu rôder dans la maison un homme de mauvaise mine et tout de noir habillé, et le corbeau, dit-il, Est noir de même et vient à l’odeur du tombeau. Plus que jamais, tais-toi. C’est une face ingrate Et louche à rendre un fou prudent comme Socrate.

Tout est prêt pour les funérailles et un valet s’approche du marquis de Nangis pour savoir de lui l’heure qu’il a fixée pour la cérémonie et lui dire aussi qu’une troupe de comédiens demande asile. Pour des comédiens l’heure est assez mal choisie, fait observer Briehanteau ; mais l’hospitalité est tin devoir, et les comédiens sont introduits dans le château.

« L’auteur de ce drame, raconte Mme Victor Hugo travaillait souvent en marchant ; il n’avait qu’un pas à faire pour être sur le boulevard Montparnasse ; il se promenait là parmi les allants et venants nombreux qu’y attirent les cabarets des barrières, les boutiques en plein vent, les spectacles forains et le cimetière. En regard du cimetière, il y avait dans ce moment une baraque de saltimbanques. Cette antithèse do la parade et de i’enterrement le confirmait dans son idée d’un théâtre où les extrêmes se toucheraient, et ce fut là que lui vint à l’esprit le troisième acte de Marion Delorme, où le deuil du marquis de Nangis contraste avec les grimaces du gracieux. »

Le gracieux, c’est le comique de la troupe, Je boulibn enfin ; il y a un père noble aussi et une duègne ; il y a un Charlemagne, empereur d Occident, pour jouer la Bradamante de Garnier, et comme les comédiens n’ont pas de préjugés littéraires, le scaramouche vient d’engager pour représenter le Cid de Corneille un amoureux et une amoureuse de tragédie qu’il a rencontrés sur le pavé de la grande route. « Toi, tu feras les Chimènes à lœil noir, a-t-il dit à la jeune femme, et quant à toi, si tu veux d’un bon rôle, tu joueras les Rodrigues ;

C’est un rôle tragique, il t’irait, entre tous. »

Le scaramouche, parlant ainsi, ne pensait pas dire si bien, et si le nouvel enrôlé représente jamais sur la scène le héros castillan

; ui, pour l’amour de Chimène, tue en duel

on Sanche, en vérité il sera dans son rôle ; car, vous l’avez deviné, ce jeune homme qui fuyait sur le grand chemin, c’est Didier ; celle qui fuyait avec lui, c’est Marie.

Et les deux amoureux défient maintenant tous les espions de Son Eminenee de les reconnaître sous leur costume espagnol, et tous les capitaines quarteniers du royaume de venir les chercher dans la grange du château de Nangis. Aussi, tandis que les comédiens sont occupés, les uns à répéter leur rôle, les autres à préparer le repas du soir ; eux, les mains dans les mains, se regardent avec ivresse, parlent de leur amour, font des projets charmants, rêvent un avenir plein de délices.

Hélas t toute espérance est un roseau ; les deux amants ont compté sans le marquis Gaspard qui, toujours insoucieux et léger, s’en vient, tandis qu’on prépare son enterrement, rôder autour de la grange, afin de voir un peu les comédiennes, et reconnaît Marion Delorme. L’aventure est si étrange, l’histoire si folle, que le jeune seigneur, évaporé, grille déjà de la conter ; il la dirait aux arbres du parc s’il ne se trouvait là un auditeur tout disposé à en rire avec lui. Cet auditeur, c’est l’inconnu, l’homme noir que Briehanteau a vu rôder ; il trouve la chose plaisante en effet et il en rit avec le marquis de Saverny : mais son rire est étrange, il est sinistre ; c est le rire de l’espion qui vient de mettre la main sur la proie qu’il chassait.

Avec l’aide de Marion, Laffenas — c’est ainsi que s’appelle le renard — arrive bientôt à Didier, et de Didier à Saverny qui, s’apereevant de la sottise qu’il a faite, veut la réparer, sauver son hôie, et se perd. Alors le traître se démasque :

Mes maîtres.

Écoutez ! Je suis juge au secret tribunal, Lieutenant criminel du seigneur cardinal.

Et le lieutenant criminel ordonne aux gardes d’arrêter les deux jeunes gens.

Le marquis de Nangis, qui a perdu Gaspard au moment où il venait de le retrouver, est fou de désespoir ; Marion Delorme est folle de douleur, et tous deux, le vieillard et la jeune femme, vont se jeter aux pieds de Louis XIII en criant : « Grâce ! » Mais le roi dévot a trop péché hier pour faire grâce aujourd’hui, et avec les mots « justice, exemple, » etc., que son cardinal maître lui a appris à répéter, le roi écolier renvoie en bâillant le père et la maitresse. Cependant Langely, le bouffon, a, par une supercherie, arraché la grâce des condamnés des mains de Louis X111. Mais à son tour le ministre arrache au roi l’ordre qui la révoque.

L’échafaud est prêt ; le bourreau attend, appuyé sur sa hache ; les gardes font la haie, et les deux jeunes gens s’avancent à pas lents : Gaspard est toujours plein, de gaieté, il a le sourire aux lèvres ; Didier est triste et pâle, et les mains croisées sur sa poitrine ; il tient la tête baissée. Ce n’est point la crainte de la mort qui le rend ainsi. Que lui importe la mort ? il sait à présent la vérité sur le passé

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de sa’maîtresse, il sait que Marie s’appela Marion et son cœur est brisé, tout son être anéanti, et tout bas il murmure : Oh ! malheureuse femme !

Oh ! n’as-tu pas frémi de me mentir ainsi, Moi qui laissais aller mon cœur à ta merci !

Cependant, la courtisane accroupie aux pieds de son amant, les yeux en larmes, les mains jointes, implore son pardon, et lui, qui vient de la maudire, se souvient que cette femme fut bonne et aimante, qu’elle fut la seule étoile éclairant son ciel noir, il se souvient qu’il l’a aimée, son cœur lui dit qu’il l’aime toujours, et, haletant, il se précipite vers Marie — oui, Marie encore — la serre dans ses bras et lui dit :

Écoute-moi : ma rie est déjà dénouée, Je vais mourir, la mort fait tout voir au vrai jour. "Va, si tu m’as trompé, c’est par excès d’amour ! Et ta chute d’ailleurs, l’as-tu pas expiée ? Ta mère, en ton berceau, t’a peut-être oubliée Comme moi. Pauvre enfant ! toute jeune, ils auront Vendu ton innocence !… Ah ! relève ton front ! Écoutez tous : à l’heure où je suis, cette terre S’efface comme une ombre, et la bouche est sincère ! Eh bien, en ce moment, du haut de l’échafaud,

— Quand l’innocent y meurt, il n’est rien de plus Marie, ange du ciel que la terre a flétrie, [haut-Mon amour, mon épouse, — écoute-moi, Marie-Au nom du Dieu vers qui la mort va m’entrainant, Je te pardonne !

Ainsi finit le roman des amours pures de Marion Delorme et de Didier.

Le but que s’est proposé le poète en écrivant l’œuvréque nous venons d’analyser n’a, pour ainsi dire, pas besoin d’être indiqué. 11 se fait deviner dès les premières pages aux yeux les moins attentifs : prendre une courtisane déboutée, sans pudeur, une fille de joie trafiquant de ses charmes, une Marion enfin que se disputent tous les amoureux du plaisir, mais que tous dédaignent au fond du cœur et méprisent ; mettre tout à coup au cœur de cette femme un peu d’amour, d’amour pur, d’amour vrai, et, par ce rayon intérieur de lumière divine laver de ses fautes la pécheresse, et faire de la vierge folle une vierge sage à laquelle tout honnête homme peut tendre la main, disant, comme Jésus, à ceux qui ne croiraient pas h la rédemption et s’étonneraient de l’indulgence : « Que celui de vous qui se croit sans péché lui jette la première pierre. »

Plusieurs de nos postes ont de leur plume d’or demandé grâce pour la femme tombée, et pardon et oubli pour l’ange déchu dont les ailes, au souffle d’un peu d’amour, ont repris leur essor vers les régions pures. Je ne veux en citer que deux : Alfred de Musset, avec son magnifique et triste poème Rolta, et Alexandre Dumas fils, avec la Dama aux Camellias, un poème aussi.

Bien souvent V. Hugo a essuyé un peu de la boue que jetaient les passants au visage pâle des prostituées. Bien souvent son cœur de poète a crié pitié, indulgence pour elles. Vous avez présente à la mémoire la poésie des Chants du crépuscule, qui commence ainsi :

Oh ! n’insultez jamais une femme qui tombe !

Avons-nous besoin de rappeler les vers suivants qui se trouvent dans les Feuilles d’automne ?

Le Seigneur nous relève, alors que nous tombons, Car il préfère encor le3 malheureux aux bons, Ceux qui pleurent à ceux qui prient.

Et ceux-ci encore dans les Contemplations : Malheureuse ! elle traîne une robe de soie Elle chante, elle rit… ah ! pauvre âme aux abois ! Et le peuple sévère, avec sa grande voix, Souffle qui courbe un homme et qui brise une femme. Lui dit, quand elle vient : « C’est toi ? va-t’en, infâme.. Nous avons dit quelle idée morale entre toutes et magnifique avait servi de thème au poète. Si l’on nous demande à présent d’apprécier, au point de vue de l’art, la façon dont il a rempli sa tâche, nous rappellerons que quelques mois auparavant il avait publie la préface de Cromwell, et nous dirons que Mariait Delorme est de tout point écrite d’après les règles de la poétique nouvelle. « Il y a de tout dans ces cinq actes, dit le critique du Journal des Débats (15 août 1831), du rire, des larmes, de la pitié, de la terreur et surtout de l’étonnement à l’aspect d’une conception si hardie… Singulier privilège de cet homme qui ; à force de mépriser son parterre, à force de violences faites au langage reçu, aux règles consacrées, aux convenances les moins disputées, à force de grotesque et de bizarre, arrive a des succès d’enthousiasme, à une époque où l’enthousiasme est mort ; homme puissant qui s’est trompé de siècle, qui s’est fait poète dramatique quand il n’y avait plus ni poésie ni drame ; hardi novateur qui, avant d’atteindre le but qu’il se propose, a tout à faire, son théâtre, ses acteurs, son public et jusqu’à la critique appelée à le juger. •

Le critique de la Bévue des Deux-Mondes (août 1831) résume son compte rendu par ces mots : « Jamais Victor Hugo n’a été plus poète, n’a vu de plus haut, n’a jugé plus largement. »

Le Moniteur du 15 août 1831 se montra plus sévère et, disons-le, injuste : « Un de nos jeunes académiciens disait dans son discours de réception : « Lorsque le talent s’affranchit des règles du goût, ce n’est pas

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parce qu’il s’élève, c’est seulement parce qu’il s’égare. » Voilà ce qu’on ne saurait trop répéter aux adeptes de la nouvelle école et surtout à leur chef, M. Victor Hugo, qui, encore à présent, ne parait pas plus disposé qu’aux jours t si gais » A’Hernani à reconnaître cette vérité ; tant de maladroits, d’imberbes séides de sa manière, essayent de lui persuader qu’il ne procède que par chefsd’œuvre, qu afin de le retenir abaissé à leur niveau (suit l’analyse) ! » Et le critique ajoute : « Jamais peut-être M. Victor Hugo n a rien imaginé de plus faible que cet ouvrage dont l’analyse a laissé entrevoir quelques singularités, mais aussi le commun et l’exiguïté du sujet, etc. »

Ne répondons qu’un mot à ce critique malveillant, et, pour montrer combien cette malveillance est injuste et systématique, citons de nouveau les noms des séides imberbes et maladroits qui applaudirent Marion Delorme rue Notre-Dame-des-Champs : Balzac, Alfred de Musset, Alexandre Dumas, Alfred de Vigny, Sainte-Beuve, Villemain, Mérimée, Soumet, Frédéric Soulié, Taylor, etc.

Au moment où fut joué le drame de Marion Delorme, la politique était l’occupation et la préoccupation de tous, les lettres n’en étaient

fuère que la distraction. On s’entretenait eaucoup des discours de La Fayette, de Cavaignac ou de Cabet, et très-peu des drames d’Alexandre Dumas ou de Victor Hugo. Le journal officiel du 11 août contient huit pages de trois colonnes, où sont reproduits les débats des Chambres, et n’a pas une ligne pour annoncer la première représentation de l’œuvre de notre poète. Cette œuvre cependant ne passa pas inaperçue : elle eut ses détracteurs et ses enthousiastes, ses batailles de feuilletons, comme Hernani, ses sifflets, ses applaudissements, ses orage3 au théâtre, d’où le nom de V. Hugo sortit en définitive plus grand que jamais.

Les parodies aussi s’en mêlèrent : parodie aux Variétés, parodie au Vaudeville ; ici, Une nuit de Marion Delorme, là, Cothon du passage Delorme, et les auteurs ont nom ; pour celle-ci Dupeuty et Duvert, pour celle-là Theric et Girau. Certes la parodie peut quelquefois, avec un peu d’esprit ; un peu de gaieté, un peu de raillerie, mais de raillerie fine et mesurée, servir de prétexte à un charmant lever de rideau, et nous ne sommes point de ceux qui répudient ce genre de littérature, quoique faux et bâtard. Cette fois on ne fit à V. Hugo les honneurs de la parodie que pour se moquer grossièrement, stupidement de son œuvre, morale entre toutes, nous l’avons dit, et magnifique. L’ineptie de ces pseudo-auteurs comiques alla même si loin que Jules Janin, le critique indulgent entre tous, écrivit, indigné, les lignes suivantes : « Figurez-vous qu’ils ont dégradé Marion à plaisir. Ils l’ont dépouillée, non pas seulement de sa robe à ceinture d’or, mais de sa poésie, de son idéal, de ses tendres émotions, de son mol abandon, de ses larmes, de son amour, de tout ce qui en faisait encore une femme. Us l’ont affublée d’estirit et de gros sel, la courtisane parfumée. Ils l’ont prise, la pauvre fille qui combat son amour, pour la jeter à la tète d’un amant de carrefour ; nous avons senti la pipe et le tabac de la régie dans le drame de M. V. Hugo. La vile prose a remplacé les vers passionnés d e Marion Delorme ; la charge s’est glissée entre tous ces personnages si fantastiques, si mouvants, si spirituels, brodés sur toutes les coutures, brodés à jour, véritables Français qui vivent, pensent et se disputent sous une loi de fer. L’ignoble a frappé sur tous ces détailsde poète ; le grivois a pesé sur toutes ces têtes sévères ; l’esprit a gâté tout ce drame. Ils ont fait un curé de village de Richelieu, et de Louis XIII un sous-préfet. Profanation ! • (Journal des Débats, 2 septembre 1831.)

DELORME (Thomas), poëte français, avocat au parlement de Grenoble, né à la Côte-Saint-André, vers 1642. II défendit les Dauphinois, ses compatriotes, contre l’injuste prévention de Richelet. Il a publié : la Muse nouvelle ou les Agréables divertissements du Parnasse (Lyon,’1665, in-12) ; Y Apologie de ta muse nouvelle à Atcandre (Lyon, 1667, in-12) ; Recueil mêlé de toutes sortes de sujets (in-4°).

DELORME (Pierre-Claude-François), peintre d’histoire, né à Paris en 1783, mort dans la même ville en 1859. Élève de Girodet, il borna son ambition à continuer docilement la manière de son maître, et la Mort d’Abel vint révéler, au Salon de 1810, l’impression indélébile que l’auteur ù’Endymion avait laissée dans 1 esprit de son disciple. En effet, n’était l’exécution moins serrée, moins savante, moins hardie et moins sûre, on eût dit que Girodet avait peint cette toile : même style dans l’arrangement, même type cherché dans l’antique ; même froideur d’exposition, même gamme de couleurs. Le publie accueillit sympathiquement le tableau de Deforme. Aussi 1 artiste, fort de ce premier succès, se mit-il à marcher résolument dans la voie qu’il avait choisie.

En 1814, M. Delorme exposa la Mort de Héro et de Léandre. On remarqua une plus grande correction et plus d’expérience dans cette seconde composition, semblable, sous les autres rapports, à la première. Cette seconde édition de Girodet trouva des partisans dans les hautes régions, et le gouvernement "confia des commandes à ce talent consciencieux,

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quoique sans originalité. Aussi le Salon de 1817 mit-il à la place d’honneur la Résurrection de la fille de Jaîre, que l’on voit encore aujourd’hui à Saint— Roch. Il en fut de même en 1819 pour le Jésus-Christ apparaissant dans tes limbes qui fait partie des peintures de Notre-Dame. En 1822, Céphale enlevé par l’Aurore fut acheté pour le Luxembourg. Ces grands travaux avaient fait à l’auteur une véritable notoriété ; aussi les célébrités contemporaines affluèrent-elles dans son atelier pour solliciter l’honneur déposer devant lui. Delorme fit donc des portraits en grand nombre ; il lui fallut même plusieurs années pour satisfaire à toutes les exigences. Quand il eut terminé cette série de portraits, aujourd’hui oubliés, il reparut au Salon de 1833 avec Sapho récitant à Phaon l’ode qu’elle vient de composer ; en 1834, avec Eve cueillant le fruit défendu ; en 1835, avec la Madeleine au tombeau de Jésus-Christ. Au Salon de 1839, dans Adam et Eve après leur désobéissance, il y eut comme un effort tenté dans le sens de l’idée moderne ; mais cet effort ne se renouvela plus. M. Delorme fut ensuite chargé de décorer la chapelle de la Vierge à Saint-Gervais. Ce travail, commencé en 1846 et achevé vers la fin de 1847, prouva une fois de plus que le peintre se résignait à la tradition classique. En 1850, enfin, le Repos en Égypte, vint réveiller au Salon le souvenir presque évanoui de cette école impériale si sévèrement jugée de nos jours. Une deuxième médaille et la croix sont les récompenses obtenues par Deforme dans la première moitié de sa carrière ; quelque temps avant 1848, il obtint une mention honorable.

DELORT (Jacques-Antoine-Adrien), général français, né à Arbois (Jura) en 1773, mort en 1846. Il fit toutes les campagnes de la Révolution, reçut plusieurs blessures à Austerlitz (1805) et se signala en Espagne, où il devint général de brigade. En 1814, il couvrit la retraite de Suchet, fit quatre régiments ennemis prisonniers à la bataille de Montereau, action d’éclat qui lui valut la grade de général de division, eut le commandement des cuirassiers pendant la campagne de 1S15, et se couvrit de gloire à Ligny et à Waterloo, Delort resta en demi-solde pendant toute la Restauration, et devint, après la révolution de 1830, aide de camp de Louis-Philippe, député et pair de France (1837).

DELORT (Joseph), historien français, né à Mirande (Gers) en 1789. Il se rendit fort jeune à Paris, où il obtint en 1814 un emploi au ministère de l’intérieur. On a de lui plusieurs ouvrages, dont les principaux sont:Mes voyages aux environs de Paris (Paris, 1821, 2 vol. in-8°), en prose et en vers ; Essai critique sur l’histoire de Charles VU, d’Agnès Sorel et de Jeanne Darc (1828, in-8°) ; Histoire de l’homme au masque de fer (1825, m-8°) ; Histoire de ta détention des philosophes et des gens de lettres à la Bastille et à Vincennes (1829, 3 vol. in-8°)

DÉLOS, aujourd’hui Dili ou Sidili, une des Cyclades, dans la Méditerranée, au N. de Naxos ; appelée aussi par les anciens Lagia (lie aux lièvres), Ortygie (île aux cailles), Pyrpyle (porte de feu), Cynthie et Pélasgie. Les Grecs modernes lui donnent le nom de Dili, ainsi qu’à l’île de Rhénée, à l’E. de laquelle Délos est située, tandis qu’un étroit bras de mer la sépare de Myconos au N.-E.

Cette île a 80 kilom. carrés de superficie ; au milieu s’élève le mont Cynthus; elle est aujourd’hui tout à fait abandonnée à cause de l’insalubrité de son climat. Elle a joué un rôle important dans les croyances religieuses de l’antiquité. C’est là que naquirent Apollon et Diane. « Au milieu de la mer Egée, dit Virgile (Enéide, 1. III, v. 73 et suiv.), est une île révérée, chère à Neptune et à la mère des Néréides. Jadis elle flottait errante lo long des rivages:mais Apollon reconnaissant la fixa entre les hauteurs de Mvrane, do Gyare et de Mycone, et voulut qu’immobile, ^ habitable, elle pût mépriser les vents. »

Latone, portant dans son sein Apollon et Diane, poursuivie partout par le serpent Py-thon, ne trouvait pas de lieu où elle pût faire ses couches. La jalousie de Junon lui avait fermé le Ciel ; la Terre avait promis de ne pas la recevoir. Neptune, dit-on, touché des tourments de Latone, tira l’île de Délos du sein des eaux et y recueillit l’infortunée. C’est là que naquirent Apollon et Diane ; Apollon, principalement révéré par les insulaires, y rendait des oracles ; on lui avait construit dans cette Ile un temple fameux.

La ville de Délos était bâtie dans une plaine fertile, au pied du mont Cynthus. De là les noms de Delien et de Cynthien qu’on donnait à Apollon. Le sol est aujourd’hui tellement encombré par les ruines du temple, des théâtres et des portiques de Délos, qu’il est presque inculte; parmi ces ruines, on voit encore plusieurs belles colonnes sur pied. Le mont Cynthus est formé de marbre granitique, ressemblant au marbre d’Égypte.

Callimaque, dans son Hymne à Délos (v. 36 à 54), explique comme il suit l’origine du nom de cette île :

■ Ton ancien nom fui Astérie, parce que tu t’élanças brillante comme un astre du haut du ciel au fond des eaux, pour échapper aux poursuites de Jupiter. Jusqu’au temps où Latone vint se réfugier dans ton sein, tu gar-