Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 2, Fj-Fris.djvu/338

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Mégrin, avait scrupuleusement pris le costume et la physionomie historiques du personnage : de là la mode de la barbe à la Saint-Mégrin. Quant à la tenue d’orgie, ce devait être un débraillé galant.

On crie, on jure ; un Jeune-France récite une Ballade de Victor Hugo. Une odeur magique de moyen âge se répand dans l’atmosphère ; les panoplies accrochées aux murs tressaillent. Reblo s’écrie : « O les anciens jours ! Époque d’aventures, où es-tu ? où es-tu, temps où elles fourmillaient ? »

. . . . . . . . Avoir des aventures !
Oh ! c’est le paradis pour les fortes natures.

Après Reblo, « un visage moresque…, faisant osciller son regard de maudit sur le conventicule, » se met a débiter des maximes de révolution à faire hurler les bourgeois et tressaillir la gendarmerie. « Si, dit-il, j’assassine par hasard l’insulteur de ma maîtresse,

Les sots, les vertueux, les niais m’appelleront
Chacal ! Tous d’une voix ils me décerneront
Les honneurs de la Grève ! …
. . . . . . . . . . . . A nous la guillotine !
A nous, qu’aux œuvres d’art notre sang prédestine !
A nous qui n’adorons rien que la trinité
De l’amour, de la gloire et de la liberté.
Ciel et terre ! Est-ce que les âmes de poëte [plète ?
N’auront pas quelque jour leur vengeance com-

Après ce féroce personnage, l’architecte se leve à son tour, et ce qu’il dit n’a, sincèrement,

que des rapports très-indirects avec l’art qu’il professe ; au lieu de construire, il veut démolir. Bien avant George Sand, il s’écrie d’une voix forte :

Battons le mariage en brèche ! Osons prouver
Que ce trafic impur ne tend qu’à dépraver.
L’intellect et le sens ; qu’il glace et pétrifie
Tout ce qui lustre, adorne, accidente la vie.

Là-dessus, si nous en croyons le poëte, les acclamations partirent :

Et jusques au matin les damnés Jeune-France
Nagèrent dans un flux d’indicible démence.
Echangeant leurs poignards, promettant de percer
L’abdomen des chiffreurs, jurant de dépenser
Leur âme à guerroyer contre le siècle aride.
Tous, les crins vagabonds, l’œil sauvage et torride,
Pareils à des chevaux sans mors ni cavalier,
Tous hurlant et dansant dans le fauve atelier,
Ainsi que des pensers d’audace et d’ironie
Sans le crâne orageux d’un homme de génie.

On le voit, le Jeune-France ne s’habillait pas et ne parlait pas comme tout le monde : tout, dans sa mise, comme dans son langage, comme dans ses opinions, était, destiné à heurter de front, le plus violemment possible, les idées reçues. Mais il y avait des Jeune-France d’opinions les plus diverses. Théophile Gautier énumere, au début d’un de ses contes, Elias Wildmanstadius, les variétés de Jeune-France. « Il y a, dit-il, le Jeune-France byronien, le Jeune-France artiste, le Jeune-France passionné, le Jeune-France viveur, chiqueur, fumeur, avec ou sans barbe, que certains naturalistes placent parmi les pachydermes, d’autres parmi les palmipèdes, ce qui nous paraît également fondé. Mais de toutes ces espèces de Jeune-France, le Jeune-France moyen âge est la plus nombreuse, et les individus qui la composent ne sont pas médiocrement curieux à examiner. » Le Jeune-France moyen âge s’imaginait avoir la cape, la dague et le pourpoint de velours, posséder des châteaux gothiques et voir les gentilles dames à robes armoriées venir au-devant de lui suivies de leurs varlets. Le bousingot, en gilet à la Robespierre, adorait Brutus et la Republique, se composait une tête sombre aux yeux caverneux, et ne sortait jamais sans son bon poignard… de Tolède. Le viveur ne rêvait qu’orgie échevelée. Le plus étrange de tous était le Jeune-France macabre. Veut-on un léger aperçu de son intérieur ? « Une tête de mort, des besicles sur le nez, une calotte grecque sur le crâne, une pipe culottée entre les mâchoires, faisait la grimace à un magot de porcelaine placé à l’autre bout de la cheminée ; deux mandragores difformes se tortillaient hideusement, pêle-mêle avec deux pétrifications et deux madrépores, sur un rayon vide de la bibliothèque. »

N’oublions pas que cette bande hardie et bruyante marchait à la suite de chefs de file tels que Th. Gautier, Pétrus Borel, l’auteur des Rhapsodies, Gérard de Nerval, Célestin Nanteuil, Jehan Du Seigneur, etc. La bande tout entière vint soutenir la première représentation d’Hernani, d’orageuse mémoire. « Dès une heure de l’après-midi, dit un historien qui a vu les choses, les innombrables passants de la rue Richelieu virent s’accumuler une bande d’êtres farouches et bizarres, barbus, chevelus, habillés de toutes façons, excepté à la mode, en vareuse, en manteau espagnol, en gilet à la Robespierre, en toque à la Henri III, ayant tous les siècles et tous les pays sur les épaules et sur la tête, en plein midi. Les bourgeois s’arrêtaient stupéfaits et indignés. M. Théophile Gautier surtout attirait l’œil par un gilet de satin écarlate et par l’épaisse chevelure qui lui descendait jusqu’aux reins. » On sait quelle fut leur conduite dans cette soirée mémorable : ils contribuèrent au succès, disons mieux, ils donnèrent la victoire au poëte hardi qui venait d’ouvrir des horizons nouveaux à l’art. Ce soir-là, la Jeune-France ne mérita que des applaudissements, et l’on peut lui pardonner, en souvenir, quelques excentricités bien excusables.

Quand le but fut atteint, et même dépassé, quand les Jeune-France se virent envahis par une tourbe d’imitateurs qui n’avaient ni talent ni originalité, les chefs du mouvement commencèrent eux-mêmes à tirer sur leurs troupes. Voici la confession que Th. Gautier plaça dans la bouche d’un de ces Jeune-France : « Deux ou trois de mes camarades, voyant que je devenais tout à fait ours et maniaque, se sont emparés de moi et se sont mis à me former : ils ont fait de moi un Jeune-France accompli. J’ai un pseudonyme très-long et une moustache fort courte ; j’ai une raie dans les cheveux à la Raphaël. Mon tailleur m’a fait un gilet… délirant. Je parle art pendant beaucoup de temps sans ravaler ma salive, et j’appelle bourgeois tous ceux qui ont un col de chemise. Le cigare ne me fait plus tousser ni pleurer, et je commence à fumer dans une pipe assez crânement et sans trop vomir. Avant-hier, je me suis grisé d’une manière tout à fait byronienne. J’en ai encore mal à la tête… »

Autre part, il fait composer à son Daniel Jovard ces vers turbulents :

Par l’enfer ! je me sens un immense désir
De broyer sous mes dents sa chair, et de saisir.
Avec quelque lambeau de sa peau bleue ou verte,
Son cœur demi-pourri dans sa poitrine ouverte.

Il est bon de remarquer que Th. Gautier avait placé lui-même ces vers dans son premier recueil de poésies ; c’est assez dire que, les donnant sous son propre nom, il les considérait comme sérieux. Depuis, il les a fait disparaître des éditions nouvelles. Ainsi périt la Jeune-France ! Ses adeptes mêmes ne voulurent considérer que comme des charges ce que leur avait inspiré la première exaltation. V. bousingot.

FRANCE (île de), île de l’océan Indien, dans l’Afrique anglaise. V. Maurice (île).

FRANCE (Marie de), femme fabuliste française. V. Marie de France.

FRANCE (Joseph), publiciste français, né vers 1795, mort à Albestroff (Meuse) en 1868. Il était chef d’escadron de gendarmerie aux Antilles lorsqu’il publia vers 1846, sous le titre de : la Vérité et les faits ou l’Esclavage à nu, un recueil de procès-verbaux dressés par lui dans l’exercice de ses fonctions, et qui mettaient au jour l’odieuse conduite des colons envers les noirs. L’amiral Mackau, alors ministre de la marine et partisan de l’esclavage, suspendit pour ce fait M. France de ses fonctions. Après la Révolution de 1848, qui détruisit l’odieuse institution de l’esclavage dans nos colonies, les noirs de la Martinique nommèrent M. France député suppléant à l’Assemblée constituante.

France et Marie, roman par H. de Latouche (Paris, 1836). On peut considérer ce roman, un des meilleurs de Latouche, comme composé de deux parties très-distinctes. La première offre un tableau de cette époque qui succéda aux secousses de la Révolution française, alors que Napoléon, premier consul, commençait à peser de toute sa puissance sur les agitations convulsives de la nation et cherchait à niveler, avec sa main de fer, le terrain si profondément remué. Quelques émigrés rentrent en France pour tenter un dernier etfort en faveur des Bourbons. Au milieu d’eux et à leur tête se dessine le caractère audacieux et héroïque de Georges, le conspirateur infatigable. Le héros du roman, Roger, est un jeune noble entraîné dans la conspiration plutôt par les circonstances que par conviction. Dominé par l’énergie de Georges, ce fils de paysan, dont la supériorité, ressortant au milieu de ces débris de l’ancien régime, semblait déjà prédire leur impuissance à rien restaurer, et proclamer, dans les rangs mêmes de la féodalité, le triomphe de la démocratie, Roger se voit bientôt compromis de la manière la plus sérieuse. Enfin, arrêté avec les autres conspirateurs, il est condamné à mort. C’est ici que l’auteur a abandonné le côté historique pour ne plus s’occuper que de l’action purement romanesque. Roger est sauvé par une femme qu’il aime et qui obtient sa grâce. Il l’épouse et part avec elle pour l’exil. Mais un vieil émigré, mort en Angleterre, avait confié sa fille au père de Roger, et, celui-ci étant mort à son tour, Marie devient la pupille de Roger lui-même. Dans leurs derniers entretiens, les deux pères avaient formé le projet d’unir leurs enfants, et Marie avait été élevée dans l’espoir d’être un jour la femme de ce jeune Roger qu’elle ne connaissait pas encore. Aussi lui suffit-il de le voir pour l’aimer, et cet amour ne tarde pas à venir porter le trouble dans l’âme de Roger. La femme qui l’a sauvé de la mort et qu’il a épousée a plutôt agi par dévouement que par amour ; aussi, dès les premiers mois qui suivent son mariage, elle n’a plus guère que de l’amitié à offrir à son mari en échange de son ardente passion, et Roger finit par la négliger pour porter toutes ses attentions sur Marie. Toute cette partie est très-finement observée et supérieurement rendue. Quant au dénoûment, il nous paraît exagérément mélodramatique. Marie, dont l’amour s’est accru jusqu’à la folie, tue l’enfant que Roger a eu de sa femme et se tue ensuite. Roger, après avoir blessé mortellement dans un duel le frère de sa femme, meurt aussi dans le délire d’une fièvre ardente. A part les rares taches semées çà et là dans ce livre, c’est, nous le répétons, un des meilleurs qui soient sortis de la plume de Latouche, et on le lit d’un bout à l’autre sans éprouver un seul instant de fatigue ou d’ennui.

FRANCESCA (Pietro Borghèse, dit della), peintre italien, né à Borgo-San-Sepolcro en 1397, mort à Rome en 1483. Il ne connut pas son père ; mais sa mère, quoique jeune encore, voulut rester veuve pour se vouer tout entière à son éducation. Suivant l’usage italien, l’enfant avait été surnommé Pietro della Francesca (Pierre, fils de Françoise), nom que Borghèse, par reconnaissance pour le dévouement de sa mère, voulut porter toute sa vie. Jusqu’à l’âge de quinze ans, Pietro étudia les mathématiques avec un rare succès. A cette époque, on ne sait pour quel motif, il tourna toute son application vers l’art du dessin et y excella bientôt. Vasari, Lanzi, Baldinucci, qui parlent fort longuement de Borghèse, négligent, selon leur coutume, d’être clairs et précis. Le nom de son premier maître ne nous a pas été conservé ; ce fut sans doute quelque peintre obscur de Borgo. On ne sait pas également à quelle heureuse circonstance il dut d’être remarqué par le dernier comte d’Urbin, Guido Antonio di Montefeltro ; mais il est certain qu’il fut chaudement protégé par ce grand seigneur, qui lui fit donner une instruction exceptionnelle, et qu’il jouit constamment de la même faveur auprès du duc Frédéric de Montefeltro, successeur de Guido Antonio. Le comte d’Urbin l’employa à la décoration de son palais et lui commanda les portraits de divers membres de sa famille ; ces portraits signalèrent les débuts de Pietro, et il faut, avec Vasari, en regretter la perte, occasionnée par les guerres qui désolèrent l’Italie ; c’étaient de remarquables tableaux, de petites proportions, à en juger par les deux seuls qui sont arrivés jusqu’à nous : le portrait du duc Frédéric de Montefeltro et celui de sa femme, Battista Sforza ; on les voit à la galerie publique de Florence. Vasari parle aussi d’une chapelle de Saint-Augustin, peinte par Borghèse ; il l’a vue, dit-il, à Ancône, et en constate les grandes qualités, bien qu’elle fût déjà détériorée par l’humidité. Cette chapelle (elle n’existe plus de nos jours) était le dernier vestige de grandes fresques que Borghèse aurait exécutées au palais de Schifanoja pour le duc de Ferrare. Ce qu’il y a de certain, c’est que le peintre toscan, déjà auteur de travaux recommandables, fut choisi par Nicolas V pour décorer le Vatican. Il y peignit deux fresques immenses, dont on trouve la reproduction dans la bibliothèque Vaticane, et dans lesquelles il avait introduit un grand nombre de portraits de personnages célèbres du xvie siècle. Malheureusement, elles étaient déjà, en mauvais état au commencement du xvie siècle, quand Raphaël fut chargé de les remplacer par ses immortels chefs-d’œuvre. Il ne reste plus rien également des travaux de Borghèse à Milan, à Pesaro, à Borgo, et c’est sans aucune certitude que quelques auteurs lui attribuent des fresques de l’église Saint-André de Ferrare. Il existe cependant à Arezzo, dans l’ancien couvent des Augustins, une Résurrection du Christ, peinture à l’huile qui rappelle la manière du Pérugin, mais à un degré bien inférieur. Les qualités de cette composition n’en sont pas moins remarquables. Le Christ est d’un jet bien voulu et drapé comme on drapait alors, c’est-à-dire magnifiquement, avec un sentiment de la silhouette et des plis qu’on n’a jamais dépassé. Une reproduction ou une variante se trouve dans un formulaire italien, manuscrit du temps, illustré d’une foule de tableaux religieux très-intéressants. Ce volume précieux est à l’Arsenal. On cite encore de ce vieux maître un Songe de Constantin, dont Baldinucci et Tiraboschi font le plus grand éloge, et que la Biographie Michiaud signale comme existant encore à Arezzo. Justesse des raccourcis, entente parfaite des effets de lumière, connaissance spéciale du jeu des muscles, magnificence des draperies, telles sont les qualités que les auteurs attribuent aux compositions de Borghèse. La Résurrection du Christ, seule peinture qui nous reste de lui, ne justifie ces éloges que dans certaines limites, mais assez néanmoins pour faire vivement regretter que l’œuvre de ce vieux maître ait été aussi peu respecté. Pietro della Francesca avait près de soixante ans lorsqu’il peignit les fresques d’Arezzo, et il paraissait être loin de vouloir déposer encore le pinceau, quand il fut frappé de cécité. Obligé de renoncer à la peinture, il se consola dans l’étude des mathématiques, qu’il n’avait pas cessé d’aimer, et se mit à composer ses traités de géométrie et de perspective, que l’un de ses élèves, Fra Luca Paccioli, écrivit sous sa dictée, et dont la bibliothèque Vaticane possède des copies prises, dit-on, sur les manuscrits originaux. Borghèse eut de nombreux élèves, parmi lesquels, outre Paccioli, il faut distinguer Tolentino, Pietro da Castel et surtout le Cortonais Luca Signorelli. Avant de mourir, Pietro della Francesca exprima le vœu d’être inhumé dans son pays, près de la maison qui l’avait vu naître ; cette volonté fut exécutée religieusement. Ses élèves accompagnèrent ses restes de Rome à Borgo-San-Sepolero ; c’est à eux qu’est dû le monument qu’on voit dans l’église, et qui porte le nom de Francesca et la date de l’inhumation (1483). L’abbé de Fontenay, dans la notice consacrée à ce maître, le fait mourir en 1443 ; on voit que c’est une erreur grossière.

Francesca de Rimini (La mort de), tableau de M. Cabanel. V. Rimini

FRANCESCAS, bourg de France (Lot-et-Garonne), ch.-l. de cant., arrond. et à 13 kilom. S.-E. de Nérac ; pop- aggl. 397 hab. ― pop. tot. 1,063 hab. Nombreux vestiges de constructions romaines ; restes d’un château qu’habita La Hire. Dans l’église, mosaïque découverte au hameau de Mercadis.

FRANCESCHETTI (Domenico-Cesare), général français au service de Naples, confident de Murat, né à Bastia en 1776, mort en 1835. Il passa à Naples, sous l’Empire, en qualité de capitaine, témoigna un dévouement sans bornes à Murat, en reçut le grade de général, partagea sa mauvaise fortune en 1814 et 1815, accompagna la reine Caroline à Trieste lors de l’envanissement du royaume de Naples par les Autrichiens, puis se retira en Corse. Il donna l’hospitalité à Murat fugitif, prit une part active à sa folle entreprise pour reconquérir la couronne, et, lorsque l’ex-roi de Naples eut trouvé la mort sur les plages de la Calabre, Franceschetti erra quelque temps, puis, mourant de faim, vint se livrer lui-même aux tribunaux. Envoyé en France par Ferdinand, il fut rendu à la liberté. Il intenta plus tard une action judiciaire contre la veuve de Murat, à qui il réclamait une somme de 30,000 francs prêtée à son mari pour sa dernière et fatale expédition ; mais il perdit son procès (1827). On a de lui : Mémoires sur les événements qui ont précédé la mort du roi Joachim Ier (1826, in-8º) ; Supplément aux Mémoires ou Réponse à M. Napoléon-Louis Bonaparte (I829, in-8º).

FRANCESCHINI (Baldassare), peintre italien, né à Volterre en 1611, d’où son surnom de Il Volterrano, mort en 1689. Il étudia sous Matteo Rosselli et Pierre de Cortone, se perfectionna dans un voyage qu’il fit à Bologne, à Parme, etc., par la contemplation des chefs d’œuvre, puis travailla quelque temps, avec son condisciple Giovanni da San-Giovanni, aux décorations du palais Pitti, à Florence. Franceschini, porté par ses goûts vers la peinture monumentale et décorative, exécuta un nombre considérable de fresques et de tableaux à l’huile, remarquables par l’entente de la composition, la correction du dessin, l’ampleur du style et l’éclat du coloris. La plupart de ses œuvres se trouvent à Volterre et à Florence, où il passa la plus grande partie de son existence. Parmi ses tableaux à l’huile, nous citerons : Saint Bruno offrant à la Vierge le dessin de la Chartreuse, à la Chartreuse de Pise ; une Purification, à Volterre ; Sainte Catherine pleurant devant le Christ, Saint Pierre repentant, et son portrait, dans le musée de Florence. Les palais de cette ville renferment un assez grand nombre de toiles de cet artiste. Parmi ses fresques, nous mentionnerons : à Volterre, son beau plafond de l’abbaye de Saint-Sauveur, représentant Élie nourri par l’ange dans le désert, œuvre de la jeunesse de l’artiste et cependant du plus grand style ; à Florence, les belles fresques de la chapelle Niccolini à Santa-Croce, et le Couronnement de la Vierge à la coupole de la même église ; l’Aveuglement humain éclairé par la Vérité, beau plafond du palais Gherardesca ; Elie enlevé au ciel, figure que rendit célèbre un étonnant raccourci, à Sainte-Marie-Majeure ; la Sainte Trinité recevant la Vierge dans le paradis, excellente et gigantesque composition, à l’Annunziata, etc.

FRANCESCHINI (Marc-Antoine), peintre italien, né à Bologne en 1648, mort à Gênes en 1720. Elève, parent et ami de Carlo Cignani, il fut presque son sosie, son autre lui-même, tant il l’imitait avec une rare et stricte perfection. Comme chacun de ces deux peintres signait indifféremment les œuvres de son ami, les amateurs contemporains n’étaient jamais sûrs d’avoir la toile originale de Cignani ou de Franceschini. Depuis, la confusion s’est fort accrue, et il faut aujourd’hui des yeux bien clairvoyants pour distinguer ce qui est du maître de ce qui appartient à l’élève. On peut affirmer, cependant, que la coupole et la voûte de Saint-Barthélémy à Bologne, sont tout entières de Franceschini, ainsi que le plafond de la salle du grand conseil, à Gênes ; celui de la chapelle des Philippins et quelques décorations dans le palais Spinola de la même ville. Les biographes racontent que le morceau saillant qu’on remarque surtout dans cette dernière résidence est un immense tableau où l’on voit Rébecca recevant les présents d’Abraham. Cette œuvre dont les figures, grandes comme nature, révèlent par leur allure ferme et décidée la sûreté d’intention, la hardiesse de parti pris d’un esprit Sain et vigoureux, fut exécutée, dit-on, en 1728, époque où l’artiste ne comptait pas moins de quatre-vingts ans. L’âge ne fait rien à l’affaire. Ingres a bien peint sa Source dans ses dernières années, et ce chef-d’œuvre déborde de jeunesse. Franceschini, malgré la médiocrité de son talent, n’en eut pas moins une grande vogue, une véritable célébrité. Le pape fut un de ses admirateurs. Presque tous les princes italiens lui demandèrent des travaux ; mais ses ta-