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GORG

Ce palmipède est remarquable par les brillantes couleurs qui relèvent les différentes parties du corps. Un noir velouté couvre la tête et est limité par une sorte de cravate jaune doré, qui, diminuant de largeur jusqu’au milieu du cou, va se terminer au blanc argentin de la poitrine et du ventre. Le dos et les ailerons, que l’on devrait plutôt nommer nageoires, sont d’un gris bleuâtre ; un vernis brillant rehausse tout ce plumage. La queue est très-courte ; elle ne consiste qu’en une touffe de plumes déliées, roides, très-élasti-Ipies et propres à servir de siège à l’oiseau. La forme des ailerons justifie le nom de manchot qui a été donné primitivement à ces oiseaux par les navigateurs français. On assure que le gorfou s’sn sert quelquefois en guise de pattes, pour hîltnr sa marche sur la terre, ce qui le convertit momentanément en quadrupède. Lorsqu’on voit de loin le gorfou à terre ou en repos, on croirait qu’il est assis ; quand il est en marche, son allure est d’une excessive gaucherie ; à chaque pas, il fait un balancement du corps. Le grand gorfou n’a pas moinsde 3 pieds de haut, et souvent il pèse jusqu’à 30 livres et plus. Sa chair n’est guère mangeable ; elle est fortement rance, et plus elle est grasse, plus ce mauvais goût devient sensible.

GORGE s. f. (gor-je — du latin gurges, gouffre, la gorge ayant été comparée à une ouverture béante. Le latin gurges correspond à l’allemand gurgel, anglaisgtirgle, lithuanien gerkle, russe gorlo. Quelques-uns ramènent tous ces termes au sanscrit gargara, tourbillon, de la racine gar, avaler. Comparez le grec gargarisein. D’autres les rapportent à la racine Icare, fendre, creuser ; mais la première explication nous semble préférable). Partie antérieure du cou, chez l’homme et chez les animaux : Avoir la gorge enflée. Serrer quelqu’un à la gorgb. Il Gosier, avec le sens vague de ce mot, larynx ou pharynx : Un, sanglot qui moule à la gorgb. Avoir une inflammation à la gorge. Il lui est resté une arête dans la gorge. (Acad.)

— Seins d’une femme : Une femme qui a beaucoup de gorge. Le prophète Jsaie se plaignait, il y a déjà longtemps, que les filles d’Israël allaient tête levée et gorge nue. (Dider.)

Son écharpe, qui vole au gré de leurs soupirs, Laisse voir les trésors de sa gorge d’albâtre. La Foxtaine.

Gorge-de-pigeon. V. ce mot à son ordre alphabétique.

Coupe-gorge. V. ce mot à son ordre alphabétique.

Coupt’r la gorge à quelqu’un, L’égorger, le tuer : ftes voleurs lui coupèrent la gorge. (Acad.) Il Fig. Fairequelquechosequ’île ruine, qui le perd : Si vous ne pages ce pauvre homme, si Boni le mettez en prison, vous loi coupez la GORGB. (Acad.)

— Se couper la gorge, S’entre - tuer : Si vous n’allez pas apaiser la querelle, ils se couperont la gorge. (Acad.) Il n’est rien de plus juste que desn couper la gorgb avec quelqu’un qui vous marche sur le pied. (X. de Maistre.)

Prendre, saisir quelqu’un par la gorge ou à la gorge, le serrer à la gorge, Le retenir ou le serrer violemment par le cou : Mncaire fut pris A la gorgk par le chien d’Aubry de Mantdidier. (Pellegrin.) Il Le contraindre à faire quelque chose : S’il n’a pas d’argent pour vous payer, le Prendrez-vous À la gorge ? (Acad.) Le grand Coudé rREND la victoire et la raison A la gorgk pour les mettre de son côté. (La Kont.) Il Le tenir dans un état de cruelle anxiété ou de pénible nécessité : Le soin cl la crainte tiennent un empereur la gorge au milieu de ses armées. (Montaigne.) Malgré la vue de toutes nos misères, qui nous touchent et qui nous tiennent À la gorgk, nous avons un instinct que nous ne pouvons réprimer, qui nous élève. (Pasc.)

Napoléon n’est plus co voleur de couronne,

Cet usurpateur effronté Qui serra sans pitié, sous les coussins du trtne, La gorge de la Liberté.

A. Barbier. Il Mettre le couteau, le poignard, le pistolet, le pied sur ta gorge de quelqu’un, Le contraindre à faire quelque chose, le mettre dans une cruelle alternative.

Prendre à la gorge, Se dit d’une odeur forte, d’une chose d’un goût désagréable et persistant, qui affecte les voies respiratoires : L’odeur du bitume vous prend à la gorge.

Tendre la gorge, Livrer sa vie lans résistance :

De festons odieux, ma Mlle couronnai

Tend sa gorge aux couteaux par son père îppretés.

ÏUCINE.

Ici, la vertu pleure et l’audace l’opprime ; L’innocence a genoux y (end ta gorge au crime.

Voltaire.

/lire, crier à gorge déployée, à pleine gorge, Rire, crier de toute sa force : Rire à. gorge déployée, c’est la marque d’une muu’jûise éducation.

En avoir menti par ta gorge, Se dit pour donner un démenti énergique à quelqu’un : Tu en as menti par la gorge, truand/ (Gaillardet.)

Faire rentrer à quelqu’un les paroles dans la gorge, L’obliger à désavouer les propos of GORO

fensants qu’il a tenus : Il s’est permis sur mon compte des propos que je saurai bien lui faire rentrer dans la gorge. (Acad.)

— Géogr. Passage étroit et resserré entre deux montagnes : Les peuples qui demeurent dans les cavernes, dans les Ues, dans les marais, dans les gorges de montagnes, dans les rochei-s, conservent leur liberté, comme les Suisses, les Grisons, les Vénitiens, les Génois. (Volt.)

— Archit. Partie la plus étroite d’un chapiteau dorique ou toscan, appelée aussi gorgerin et colerin. Il Espèce de moulure dont le profil est une courbe concave, arrondie vers sa partie inférieure. b Partie d’une cheminée comprise entre la chambranle et le couronnement du manteau..

— Artill. Moulure arrondie qui sert d’ornement au canon.

— Fortif. Ligne qui joint les extrémités des côtés ou faces d’un angle saillant. Il Gorge d’un bastion, d’un redan, d’une cunetle, Espace compris entre les extrémités déce bastion, de ce redan, de cette cunette. Il Demigorge, Ligne menée de l’angle de la courtine au centre du bastion.

— Pyroteehn. Gorge d’une fusée, Grillée pratiqué à la base d’une fusée volante, pour donner passage aux gaz produits par l’inflammation de la charge.

— Mécan. Gorge d’une poulie, Creux demicirculaire qui règne sur la circonférence d’une

J poulie, pour recevoir la corde ou la chaîne.

— Techn. Pièce adaptée aux serrures soignées pour faciliter l’action de la clef sur l’arrêt du pêne. Il Partie intérieure d’un éventail, formée par la réunion des brins qui sont, en cet endroit, retenus par un clou. Il Premier tronçon qu’un coutelier coupe dans une corne ou dans une dent d’ivoire, il Large baguette de bois taillée en forme de gorge, que l’on fixe au bas d’une estampe ou d’une carte, et qui reçoit celle-ci lorsqu’elle est roulée. Il Eehanerure d’un plat à barbe. Il Morceau de bois échancré auquel les porteurs d’eau suspendent leurs seaux, il Partie antérieure d’une écritotre destinée à recevoir les plumes, les crayons, les canifs, etc. Il Gorge de démaigrissement, Entaille faite à angle aigu dans une pièce de charpente.

— Fauconn. Partie supérieure de l’estomac d’un oiseau de proie, appelée aussi poche. Il Viande qu’on donne à manger à l’oiseau. Il Enduire la gorge, Digérer trop vite les aliments. || Llonner bonne gorge, Repaître largement l’oiseau. || Donner grosse gorge, Présenter à l’oiseau de ia nourriture qui n’a pas été trempée dans l’eau. Il Voler sur sa gorge, Se dit de l’oiseau qu’on fait voler aussitôt qu’il est repu, h Rendre gorge, Se dit de l’oiseau qui vomit après avoir mangé, et Fig. d’une Personne contrainte de restituer ce qu’elle a pris, ce qu’elle a acquis par des voies illicites.

Il Gorge froide, Viande des animaux morts, que l’on donne aux oiseaux de proie. Il Gorge chaude, Chair des animaux vivants ou récemment tués, que l’on donne aux oiseaux de proie ; proie vivante, en général : Mettez les hommes chacun à part soi, que sera-ce qu’une gorge chaude au reste des animaux, et un peu de sang qu’ils auront plus tôt répandu que désiré ? (Malherbe.) Notre bonne commère

S’efforce de tirer son hôte au fond de l’eau, Contre le droit des gens, contre la foi jurée, Prétend qu’elle en fera gorge, chaude et curée.

La Fontaine. Il Faire des gorges chaudes, S’égayer aux dépens de quelqu’un ou de quelque chose, s’en moquer, en rire : Kossuth fait des gorges chaudes du plan de Garibatdi. (Proudh.)

— Cost. Gorge ou Tour de gorge, Partie supérieure de la chemise d’une femme :

D’une fille il prit la coiffure, Le tour de gorge et le panier.

Voltaire.

— Pathol. Mal de gorge, Nom donné vulgairement à diverses angines.

— Ornith. Grosse gorge, Nom vulgaire du combattant. Il Gorge- blanche, gorge-bleue, rouge-gorge, etc. V. ces mots à leur ordre alphabétique.

— Moll. Ce qu’on peut voir de l’intérieur d’une coquille univalve en regardant par l’ouverture, c’est-à-dire à peu près le dernier demi-rour.

— Bot. Entrée du tube de la corolle du calice ou du périgone.

— Agric. Nom que l’on donne, dans les environs de Paris, au froment qui reste dans les gerbes après qu’on les a soumises à un léger battage, et qui n’est qu’un blé de seconde ou de troisième qualité. Il Gorge de la charrue, Partie antérieure du versoir.

— Syn. Gorge, col, <1dûlé, etc. V. COL.

— Epithètes. Naissante, blanche, de lis, d’albâtre, délicate, séduisante, charmante, ravissante, voluptueuse, large, volumineuse, puissante, énorme, terme, rebondie, ronde, grasse, polie, plate, pendante, flasque, émue, soulevée, couverte, voilée, découverte, nue.

— Encycl. Pathol. Sous le nom vulgaire de mal de gorge, on désigne les inflammations que nous avons déjà étudiées sous les noms d’amygdalite, d’esquinancie, d’angine, de croup, et que nous étudierons plus tard sous celui de laryngites. Il faut bien convenir

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toutefois que le mot mal de gorge exprime quelque chose de plus général que ces diverses lé-ions lociiles, et, à ce point de vue, pourrait mériter d’être adopté : ainsi le mot mal de gorge exprime souvent tout à la fois l’amygdalite, l’angine gutturale et la laryngite, trois lésions qui peuvent coïncider. D’autre part, les symptômes généraux sont les mêmes. Quant aux troubles fonctionnels et aux altérations locales, il suffit de réunir ce que l’on dit à chaque article pour se faire une idée de leur ensemble. Pour éviter des redites, nous renverrons donc à ces divers articles.

— Mœurs et Coût. Le marquis de La Fare, que Louis XV avait envoyé au-devant de sa belle-fille, la princesse de Saxe, étant venu lui rendre compte de sa mission, le roi lui demanda : t Et ma belle-fille, comment est-elle ? — Sire, j’ai trouvé Son Altesse fort bien ; elle a de grandes manières, un air fort distingué, de très-belles mains, des... — Ta ta ta, interrompit brusquement le roi, est-ce lace que je vous demande î A-t-elle de la gorge ? — Ah ! sire, répondit La Fare en balbutiant, je n’aurais jamais osé porter mes regarde jusque-là. — Eh bien ! monsieur le marquis, répliqua Louis XV, vous êtes un nigaud ; la gorge est toujours la première chose qu’il faut regarder chez une femme. »

Ce mot est un peu cru, mais il exprime une vérité vieille comme le monde. Les femmes ont toujours regardé une belle gorge comme un de leurs attraits les plus enviables, témoin le soin qu’elles mettent à la montrer quand elles en ont, et à la simuler quand elles n’en ont pas. L’antiquité n’était ignorante ni de cette coquetterie ni de ces artifices. Les femmes portaient ce qu’on appelait le mamillure. C’était une bande en cuir mou, qui servait à entourer le sein et qui était destinée à relever la poitrine ou à la contenir quand elle prenait trop de développement. Ce mamiilure était bien différent de nos corsets modernes ; son but n’était pas de comprimer la taille et de lui donner une ténuité contre nature. D’ailleurs, toutes les femmes ne le portaient pas, mais seulement celles chez qui un grand embonpoint rendait cet appareil nécessaire. Il était porté sous la tunique et contre la peau ; les peintures antiques de Pompéi nous en offrent plusieurs spécimens. Alessaline, qui cherchait avant tout à faire saillir sa gorge, naturellement très-belle, avait soin, quand elle se rendait la nuit dans le quartier de Suburé, de se faire envelopper le buste nu d’un linge de fin lin, que ses femmes retiraient par le haut quand elle étai : complètement habillée ; en remontant cette sorte de chemisette, elles obligeaient la gorge à s’épanouir dans toute son ampleur.

On sait que les vraies musulmanes aiment mille fois mieux montrer leur poitrine que leur figure, et que, si elles sont suprises non voilées par un étranger, elles prennent n’im,porte quelle partie de leur vêtement pour se couvrir le visage. LO^dessus, d’ailleurs, chaque peuple a ses usages : ce que les Espagnoles ne veulent pas montrer, c’est leur pied : « Elles veulent marcher par-dessus leurs robes, dit Mm>= d’Aulnay, dans son Mémoire sur la cour d’Espagne, atin qu’on ne puisse voir le pied, qui est la partie de leur corps qu’elles cachent le plus soigneusement. J’ai entendu dire qu’une dame, après qu’elle a eu toutes les complaisances possibles pour | un cavalier, c’est en lui montrant son pied qu’elle lui confirme sa tendresse, et c’est ce qu’on appelle ici la dernière faveur, a

Des voyageurs modernes racontent de singulières choses sur la Servie, où les mœurs sont encore primitives. Les femmes et les jeunes filles sont habillées plus que légèrement, habitude que justifie la chaleur du climat, et, dan3 cette demi-nudité, elles ne sont pas plus embarrassées qu’Eve dans le paradis terrestre. C’est la coutume lorsqu’un étranger arrive, que la fille de la maison vienne lui offrir sur un plateau un verre d’eau et un pot de confitures, dont il prend une cuillerée pour faire honneur à l’hospitalité. Or, il arriva un jour qu’un voyageur peu au fait de cet usage, et ébloui par la beauté des seins de la jeune fille qui offrait à ses regards ses attraits presque sans voile, resta un quart d’heure absorbé par cette contemplation, et mangea tout le pot de confiture. La jeune beauté restait là rougissante sous ses regards ardents, n’osant se retirer de peur d’impolitesse. Des Français qui ont séjourné longtemps dans ce pays nous ont raconté ce fait, et nous ont aussi attesté le suivant. Toutes sortes de fêtes sont prodiguées à l’étranger ; quand on danse le coto, danse nationale, il est p.acé au milieu, toutes les femmes l’entourent comme d’une chaîne de fleurs, et il peut les contempler à son aise ; il peut même, si l’envie lui en prend, s’approcher des plus belles, et porter la main sur les trésors qu’on étale si libéralement a ses yeux. Loin de s’en fâcher, les pères, les frères et les maris sont très-fiers de son approbation, et de cet éloge peu équivoque donné à la beauté de leurs femmes.

L’abbé Boileau a écrit un petit traité intitulé : De l’abus des nudités de gorge, et dans lequel on trouve, entre autres, ce passage : « Je souhaiterais que toutes filles et toutes femmes fussent bien persuadées de ce qu’a dit saint Jean Chrysostome, et qui a été

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justifié par plusieurs histoires authentiques, qu’une image et une statue nue est le signe du diable ; elles conclueraient de là que, par leurs nudités, elles deviennent, non-seulement le siège, mais le trône de Satan ; que non-seulement il repose sur leur gorge, sur leurs épaules exposées aux yeux des hommes, mais qu’il y règne, qu’il y domine, qu’il y triomphe ; elles connaîtraient que leur corps à demi nu n’attire pas moins sur elles les démons que les yeux des hommes. Et comme il y a d’ordinaire plusieurs hommes qui regardent leurs seins, leurs épaules et leurs bras nus, il y a aussi plusieurs démons sur chacune de ces parties, dont ils prennent possession, et dont, pour ainsi parler, ils font leur ’ retraite et leur fort. >

Les femmes ne furent point arrêtées par les malédictions de l’abbé Boileau, et, redoutant moins de voir nombre de diablotins se nicher sur leurs épaules et sur leur poitrine que de se priver du plaisir de montrer leurs attraits, elles allaient largement décolletées ! Les femmes n’avaient point alors des couturières, mais des tailleurs, qui faisaient leurs robes, leurs corsets et qui les essayaient. Cet usage a souvent donné lieu à des intrigues galantes où des amants se substituaient aux tailleurs. Une gravure d’après Lancret, intitulée Vlissai du corset, représente fidèlement cet usage. C’était le tailleur de la reine qui, chaque matin, laçait Sa Majesté ; Marie-Thérèse demanda à son époux la permission de renoncer à cet usage, qu’elle n’osait abolir de sa propre autorité. Celui-ci ne voulut point y consentir ; il lui représenta que le droit de lacer la reine appartenait & des gens qui avaient payé leur charge, et qu’il ne lui appartenait point d’en altérer les prérogatives. Marie-Thérèse représenta qu’on pouvait trouver au moins fort bizarre que, par respect pour les bénéfices d’un emploi de la chambre, une reine fût obligée do montrer sa gorge à des hommes, quelquefois à des libertins, qui, Sous prétexte de maladresse, se plaisaient à prolonger le plaisir que leur causait cette vue. Le roi, observateur rigide do l’étiquette, tint bon. prétendant que, même dans le monde, la gorge des dames se produit à peu près nue, et que, pour ce qu’un valet pouvait en voir de plus en laçant la reine, ce n’était pas ta peine d’en parler. D’ailleurs, c’était le temps où les grandes daines se faisaient mettre au bain par leurs laquais, disant qu’un valet n’était pas un homme. Au reste, lisez les écrivains de cette époque, toutes les fois qu’ils font la description d’une femme, ils n’oublient jamais de dire si sa gorge était bien ou mal faite.

Terminons cet article par quelques anecdotes qui n’ont pu trouver place au courant de la plume.

Rappelons d’abord le mot de Voltaire à une vieille marquise qui s’était présentée chez lui fort décolletée. Le voyant jeter les yeux sur sa poitrine, elle lui dit en minaudant : « Eh quoil monsieur de Voltaire, à voire âge vous regardez encore ces petits coquins ? — Ah ! madame, répliqua le malin vieillard, ces petits coquins sont bien les plus grands pendards que je connaisse. »

Tout le monde connaît l’histoire de sainte Agathe, vierge et martyre, à laquelle le préteur fit couper les deux seins. I. un d’eux est conservé dans une église de Palerme et exposé à la vénération des fidèles ; quand arrive un noble visiteur, on l’admet à l’honneur de le baiser. C’est ce qui fut fait pour le duc d’Ossuna, vice-roi de Naples, qui, avant d’accomplir co pieux devoir, eut soin de se retourner vers sa femme et de lui dire : ■ Avec votre permission, madame ! »

Des voleurs attaquèrent un soir Mma Cornue], fort en réputation du temps de Mme de Sévigné, par ses saillies et ses bons mots. L’un d’eux, entrant dans son carrosse, commença par lui mettre la main sur la gorge ; mais elle lui repoussa le bras sans s’effrayer, lui disant : • Vous n’avez que faire là, mon ami, je n’ai ni perles’ni tétons. » (Tallemant des Réaux.)

Le pape Pie VI, se promenant dans les galeries du Vatican, vit passer une dame fort décolletée et qui portait au cou une belle croix en diamant. « Saint-Père, voyez donc la belle croix, lui dit le cardinal qui l’accompagnait. — Oui, repartit le pontife, la croix est fort belle, mais le Calvaire est encore plus beau que la croix. •

Dans une fête donnée à la maréchale de Luxembourg, le chevalier de Boufflers, rencontrant la charmante duchesse de Lauzun déguisée en boulangère, lui tourna aussitôt un madrigal où se trouvaient les vers suivants : « Charmante boulangère, lui disait-il,

Que j’aime In tournure Des petits pains au lait. Que la simple nature A mis dans ton corset ! »

Au temps où la beauté d’Anne d’Autriche était dans tout son éclat, raconte Mm<> de