Page:Lassalle - Capital et travail.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est-à-dire, en d’autres termes : vous vous imaginez le travail social actuel tel qu’il l’était effectivement dans les temps éloignés du moyen âge, où chacun produisait avant tout ce qui lui était nécessaire à son propre usage, et échangeait ensuite l’excédant de ces produits, dont il n’avait plus besoin pour lui-même.

Ne comprenez-vous donc pas que le travail social d’aujourd’hui se caractérise précisément par là, que chacun produit ce qu’il ne peut pas employer pour lui-même ? Ne comprenez-vous donc pas que depuis l’avènement de la grande industrie cela doit être ainsi, qu’en cela consiste la forme et l’essence du travail actuel et que sans l’admission rigoureuse de ce point de départ, aucun côté de nos conditions économiques, aucun de nos phénomènes économiques ne pourrait être compris ?

Selon vous, M. Léonor Reichenheim, à Wüste-

    tient pas chez vous à une erreur de plume ou à un lapsus linguæ, — dans ce cas je n’en aurais pas dit un mot, — mais vous vous l’imaginez réellement comme forme du travail actuel. Vous dites déjà (p. 14) : Ainsi chacun peut être sûr que pour ce qu’il aura produit dans sa branche de travail au delà de ses besoins, il pourra recevoir des autres, en échange, tout ce qui est nécessaire à son existence. Et cela ne peut pas étonner de votre part Bastiat dit bien (Harm. écon., éd. Brux., p. 102) : « L’échange, disent quelques-uns, est l’échange du superflu contre le nécessaire ; cela est contraire aux faits qui se passent sous nos yeux, car qui oserait affirmer que le paysan, en cédant son froment qu’il a semé et récolté et qu’il ne mangera jamais, donne son excédant ? » Mais dans un autre endroit (si je ne me trompe gravement) que je ne puis indiquer en ce moment, quoique je me le rappelle exactement, Bastiat déclare formellement que le travail d’aujourd’hui est un échange de l’excès de production d’un producteur contre l’excès de production des autres producteurs. La contradiction entre ces deux endroits ne doit pas étonner les personnes qui liront ce que je fais remarquer plus tard sur les inadvertances et les contradictions continuelles de ce Monsieur.