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NOUVELLE PRÉFACE

mêmes qui ne peuvent plaire qu’à des barbares, ou être reçues avec gravité que par des naïfs, je serai le premier à en convenir. Mais ce que j’ai essayé de faire comprendre au sujet de l’antichristianisme de Nietzsche s’appliquerait d’une manière générale à ces aspects rebutants de sa personnalité, à ces impulsions d’un démon dont il n’était pas le maître. Je n’ai pas le moindre goût pour les fureurs et les visions apocalyptiques de Zarathoustra, bien que, dans cet ouvrage même, les folies d’une forme effarante enveloppent parfois bien des grains de sagesse et, comme il disait, de « gai-savoir ».

Au surplus, il ne s’agit aucunement de présenter Nietzsche comme un Allemand renégat à sa patrie, comme un allié spirituel de la cause que nous avons défendue par les armes. Rien ne serait plus puéril, et là n’est point la question. Jean Moréas faisait ses délices de Nietzsche et lui empruntait souvent l’expression de ses pensées propres qui ne se distinguaient, je suppose, ni par le trouble ni par le désordre, ni par la brutalité. Moréas s’y connaissait. Il trouvait en Nietzsche un bon auteur, un maître, souvent agité et convulsif, mais supérieurement clairvoyant et ardent, de l’humanisme. Il ne s’agit pas d’autre chose. Que l’Alle-