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Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/130

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rentra dans la salle de classe. Il s'assit devant son pupitre, sur son estrade, atteignit un cahier d'élève et essaya de corriger un devoir. Mais, malgré ses efforts, il lisait sans comprendre, ne tenant plus en place. En pensée, il supputait la somme qu'il allait trouver dans la malle et qui suffirait sans nul doute pour le tirer de sa misère honteuse. Soudain, il se surprit à calculer sur un bout de papier le montant de ses dettes.

— Pourquoi hésiter ? — fit-il alors à haute voix, — n'est-ce pas la vie!… Cette préoccupation qui m'obsède n'est-elle pas naturelle?… Non, elle ne peut avoir rien de coupable désormais.

Il se leva, grimpa prestement l'escalier, et se dirigea, non sans émotion, vers la chambre où se trouvait tout à l'heure le cercueil de Caussette.

Louise y était déjà. Malgré sa fatigue, elle avait fureté partout et son visage semblait soucieux d'impatience.

— Jean, — dit-elle, en voyant entrer son mari, — la malle est fermée… J'ai beau chercher, je ne sais où sont fourrées les clefs.

Les mains fébriles, il se joignit aux recherches de sa femme. Il tourna et retourna tous les objets, regarda sous les meubles, les déplaça même, sonda les murs et le pavé. A la longue, une impatience lui vint, ainsi qu'à Louise :

— Où diable les a-t-elle donc fichues? — fit-il d'un ton brusque, en fouillant de nouveau les poches de la dernière robe portée par la morte.

— Fais sauter la serrure, — s'écria Louise, nerveusement ; — on n'a pas besoin de clefs, après tout.

— Pourtant, elle ne les a pas emportées ! — répondit-il, en rôdant dans la chambre.

Il lui répugnait de suivre le conseil de Louise. Forcer la serrure, faire sauter le couvercle de la malle, cela lui produisait à l'avance l'effet d'une profanation, ne serait-ce pas