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Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/47

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de Louise. Les gaietés turbulentes de Rose et de Paul, leurs gambades et leur babil l’intéressèrent. Devant les aspects et les étrangetés de ce pays si neuf pour eux, nés dans les plaines, la surprise des enfants se manifestait fréquemment par des interrogations drôles, des rapprochements imprévus, des réflexions d’une bizarrerie telle que Louise, distraite et réjouie, en oubliait son mal et s’habituait à sa nouvelle vie.

Souvent, assise à l’ombre, pour se reposer, elle retrouvait son sourire à voir son mari redevenir gamin, s’ébattre autour d’elle avec Rose et Paul. Même leurs éclats de rire la gagnaient lorsque Jean feignait de poursuivre Rose fuyant devant lui ainsi qu’un oiselet aux allures hésitantes, les bras étendus et battant l’air, comme de faibles ailes, poussant de légers cris, ou lorsqu’il se dissimulait prestement derrière un arbre, un buisson, un rocher pour s’en élancer brusquement, en criant : « Coucou ! Coucou ! » à la joie délirante des petits.

Jean, s’apercevant que Louise était plus gaie, moins rêveuse, après ces sorties, prétexta que ses occupations professionnelles l’absorbaient et insista, maintenant qu’elle connaissait un peu le pays et les gens, pour qu’elle fréquentât elle-même chez les fournisseurs. Louise y rencontra quelques femmes avec lesquelles elle s’arrêta à causer. Les attentions, les flatteries qu’on eut pour elle, un certain respect qu’elle remarqua chez ces paysannes, enchantées de lier conversation avec une si gentille « damette » et de cancaner sur les affaires d’autrui, lui furent autant de distractions qui lui rendirent le séjour de Maleval moins antipathique. Ses abattements journaliers, sans disparaître tout à fait, devinrent plus rares, moins profonds. Elle se plut à rapporter à Jean, par le menu, les causeries qu’elle avait, soit avec l’une, soit avec l’autre. Des relations même se nouèrent ; elle alla chez des voisines qui, à leur tour, vinrent coudre auprès d’elle, dans la salle de la mairie, qui servait peu et appartenait, en réalité, à l’instituteur.