Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tannhauser, d’un air sinistre, lui demande le chemin, qu’il connaissait si bien autrefois, mais qu’il ne retrouve plus, du Vénusberg. À ces mots, Wolfram est frappé d’épouvante ; son ancien compagnon n’a donc pas été à Rome implorer la grâce divine ? La colère de Tannhauser éclate alors, et, dans un récit d’une poignante désespérance, il retrace les étapes de son douloureux voyage, son humilité, son désir de souffrance qui lui faisait multiplier les épreuves et les difficultés de la route ; puis son arrivée à Rome, son immense espoir à la vue du Pontife qui promettait la rédemption à tous les repentirs, et enfin l’effondrement de tout son être après qu’ayant confessé, éperdu, ses crimes passés, il s’est vu, seul parmi des milliers de pécheurs, repoussé impitoyablement par le représentant de Dieu, par le Souverain Pontife, qui l’a déclaré à jamais maudit et lui a prophétisé les souffrances d’une fournaise infernale dans laquelle l’espérance ne refleurirait pas plus que ne reverdirait jamais son bâton de pèlerin.

Tel fut à ce moment l’excès de son désespoir, qu’il tomba inanimé, expirant, sur le sol ; mais maintenant, revenu à lui, il mesure l’étendue de sa misère ; une seule issue lui reste, vers laquelle il se précipite avec l’âpreté de la douleur : à lui Vénus, à lui l’enchantement corrupteur de ses ardentes voluptés !

Scène iv. — En vain Wolfram veut-il arrêter l’évocation maudite sur les lèvres du malheureux et l’entraîner avec lui : Vénus a entendu l’appel qui lui a été fait, elle s’empresse d’accourir. Un nuage léger envahit la vallée, de délicieux parfums emplissent les airs, on aperçoit dans l’atmosphère voilée de rose les dansée des nymphes séduisantes ; bientôt on distingue dans la lumière brillante la déesse étendue sur un lit de repos. Elle appelle à elle Tannhauser enivré, lui rappelant les plaisirs sans nom-