Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/155

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avoir protesté de sa reconnaissance et de son dévouement ; mais, ô trahison ! il revient bientôt, sous son vrai nom de Tristan et entouré d’un luxueux appareil, demander la main de la jeune fille pour son oncle le roi Marke. Les parents d’Iseult acceptent l’alliance pour leur fille, qui par obéissance doit partir sous la conduite du chevalier pour les États de son futur époux.

Mais son âme est secrètement rongée par la douleur : car ce héros qu’elle a sauvé et qui la trahit si indignement, elle s’en croyait aimée, et l’aime sans se l’avouer, en dépit du passé sanglant qui se dresse entre eux.

Tel est l’état des choses quand le rideau s’ouvre pour le premier acte.

Nous l’esquisserons, ainsi que les deux autres, à très grands traits et brièvement. Les situations sont simples, et les péripéties peu nombreuses dans le poème de Tristan. Tout l’intérêt du drame réside dans les états d’âme des héros. Comment les expliquer sans atténuer la poignante émotion qui en résultera à l’audition ? Ne vaut-il pas mieux laisser chacun la percevoir et la sentir selon sa propre nature, que la déflorer en insistant inutilement sur des détails d’ordre purement psychologique ?

1er  Acte.

Scène i. — Iseult est sur le navire qui la mène en Cornouailles ; une tente formée de riches tapisseries est dressée sur le pont et complètement fermée au fond. La princesse est étendue sur un lit de repos ; la mélancolique chanson qu’un matelot fait entendre dans la hune la blesse et l’irrite, et elle laisse éclater son désespoir en apprenant de sa suivante, Brangaine, que la terre est proche et que le voyage touche à son terme.

Scène ii. — Elle envoie sa compagne ordonner à