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l’affaire sougraine

volonté. Rarement il se montrait si loquace. Il était probablement heureux ; on est aimable envers tout le monde quand on est heureux. L’abbé lui demanda, en se levant pour prendre congé, s’il était vrai qu’il allait bientôt épouser une jeune et jolie fille… Le notaire, gonflé de joie, n’osa pas nier.

— Je ne doute pas que cette jeune fille ne vous apporte son amour, lui dit-il avec intention.

Le notaire eut un soupçon et répondit froidement :

— Quand on se marie c’est signe que l’on aime.

L’abbé lui fit observer que malheureusement le contraire arrivait quelquefois et qu’alors la bénédiction divine ne descendait pas sur ces mariages. Il n’y avait que des peines au foyer, des remords, des reproches.

— Je ne parle pas pour vous, disait-il, car je suppose que vous êtes aimé…

Et il continuait à faire une peinture redoutable des tortures de toutes sortes qui sont réservées à ceux qu’un amour sincère n’a pas réunis.

Le notaire écoutait tout rêveur. Il sentait bien qu’il disait vrai et c’était pour cela qu’il souffrait