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le cantique du bon pauvre

Après elle traînant sa lamentable escorte,
La misère en haillons s’est assise à ma porte,
Je suis de ses amis.

Que le riche demeure à l’abri des orages ;
Que la froide saison réserve ses outrages
Pour tous ceux qui n’ont rien ;
Que chaque heure qui vient m’apporte sur son aile
Un pénible regret, une angoisse nouvelle,
Si Dieu le veut, c’est bien.

Celui dont le regard veille sur tous les êtres,
Qui nourrit l’araignée au coin de mes fenêtres,
Le grillon au foyer,
Pourrait-il, en voyant son enfant, sur la terre,
Élever vers le ciel un cœur pur et sincère,
Ne pas s’apitoyer ?

Si la vie à mes yeux n’offre guère de charmes,
Si je mange mon pain détrempé de mes larmes,
Mon âme est dans la paix.
Quand à mon crucifix mes regards se suspendent,
Des soucis dévorants, des douleurs qui m’attendent
Je ne crains plus le faix.