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à la « braierie »


À la « braierie »


L’amour surprend le cœur qui ne fait bonne garde.
Et qui donc s’en défend ? On l’appelle s’il tarde.
Pour calmer le scrupule, on se plaît à conter
Qu’il descend du ciel même, et nous y fait monter.
Parfois, il est cruel. Cependant champs et villes
Se montrent à sa voix également serviles,
Et quand nous sommes, nous, courbés sur le sillon,
Nos âmes de semeurs sentent son aiguillon.

L’an dernier, quand le bois, sous les baisers du givre,
Effeuillait ses rameaux comme on fait d’un vieux livre,
Une mignonne enfant éclose en nos cantons,
Simone, aux arbres nus, aux caressants moutons,
Racontant le bonheur qu’elle avait d’être aimée,
Suivait d’un pas hâtif la sente accoutumée
Qui mène à la braîrie, au fond d’un grand ravin.
Jean était là… L’amour grise comme le vin.