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les derniers seront les premiers


Les derniers seront les premiers


« C’est le nouvel élu, faites grands les passages !
Écrasez-nous, coursiers ; qu’importe ? Ici les sages
Sont les heureux mortels qui vont, galonnés d’or,
De la boue au soleil, en un superbe essor !
Les sages, ce sont ceux dont l’orgueil nous écrase !
Ceux que l’amour du lucre ou des grandeurs embrase !
Ceux qui, pour s’agrandir, nous mettent sous les pieds !
Qui savent faire rendre aux antiques trépieds
D’iniques jugements ou de douteux oracles !
Qui commandent au ciel de complaisants miracles !…
Passez ! courez ! volez, attelages fougueux !
Qu’importe ? écrasez-nous, nous qui sommes des gueux ! »

Ainsi vociférait, au milieu de la foule,
Un homme à l’air sinistre et dur. Comme la houle,
Ou comme les épis que balance le vent,
Les têtes, pour le voir, se penchaient en avant.