Page:LeMay - Tonkourou (nouvelle édition de Les Vengeances), 1888.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
180
tonkourou


Dans l’ombre de la nuit, trompant les sentinelles,
Comme un serpent se glisse à travers les halliers,
L’espion se glissa parmi les cavaliers
Et s’éloigna du camp, sans bruit, d’un pied alerte.

Deux heures il courut sur la route déserte.
S’arrêtant par moment pour écouter le bruit
Que pouvait apporter sur son aile la nuit,
Et collant chaque fois son oreille à la terre.

Il tressaille soudain et sa figure austère
Prend tout à coup, dans l’ombre, un radieux aspect.
Ce bruit qu’il entend là n’a-t-il rien de suspect ?
C’est un pas empressé, quelqu’un qui se dépêche.
Il ne voit rien pourtant car la nuit l’en empêche.
L’homme arrive.
— Angleterre ou Canada ? fait-il.

— Patrie et liberté ! dit l’espion subtil.

— Ah ! tu sers mon pays avec intelligence.

— Car tu fus le pardon et je suis la vengeance.

Et les deux conjurés s’étaient dit quelques mots
Que n’avaient point ouïs les tranquilles échos.