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tonkourou

— L’audace de cet homme est, dit-il, sans exemple :
Il faudrait le chasser comme un maudit du temple.

Surpris, terrifié par ce coup imprévu,
Ruzard avait pâli comme s’il avait vu
Devant lui se dresser l’effroyable potence.
Elle allait fuir encor cette heureuse existence
De richesses, d’amour sans fin et de plaisir,
Qu’il avait tant rêvée et qu’il allait saisir !

Les dalles résonnaient sous les pas des convives.
Ainsi, quand le vent souffle au jour des chaleurs vives,
On entend mille bruits s’élever dans les bois.
Léon quitte l’église. Une dernière fois
Il veut revoir pourtant la vierge trop aimée.
Il l’attend au dehors, sur la porte fermée ;
Puis quand Lozet paraît la tenant sans effort,
Comme on tient dans ses bras un jeune enfant qui dort,
Il s’avance près d’elle au milieu de la foule
Et, tout en essuyant une larme qui coule,
Il dépose un baiser sur son front pâle et froid,
Sachant bien, dans son cœur, qu’il en avait le droit.

Louise, s’éveillant à ce toucher suprême,
Ouvre des yeux hagards, soulève son front blême :

— Où suis-je donc, fait-elle, et que s’est-il passé ?