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vivres sur cette grève vaste et vaseuse, se replia vers le rivage ; je me blottis à terre dans cette espèce de demi-jour que la brume engendrait, lorsque tout à coup à la suite d’une décharge d’arme-à-feu, j’entendis le plomb qui crépitait sur la vase tout autour de moi. Je m’aperçus que j’étais devenu un point de mire pour les autres chasseurs qui entendant la réclame de mes plans, nous avaient pris pour une volée d’outardes.

Bientôt nous fûmes salués d’une seconde décharge, la situation devenait scabreuse : je grimpai de suite sur une banquise échouée et garnie des ajoncs du lac St-Pierre ; j’agita mon arme, je criai comme un possédé. Finalement une idée lumineuse me vint ; je tirai un coup de fusil pour prouver à ces malotrus, que je n’étais pas une outarde. Voilà, mon jeune ami, un des mauvais pas où ma présence d’esprit, vint à ma rescousse, pendant ma récente partie de chasse.

Il y a bien d’autres modes pour capturer les outardes qu’avec les plans domestiques ; ainsi, à l’Île du Prince Édouard, à l’entrée du golfe, on trompe l’œil de la volatile, au moyen de canots d’un faible tirant d’eau, dont on recouvre les bords d’herbes ou de branches vertes.

On emploi comme moteur, une roue à l’arrière de la nacelle, comme la roue dans un petit steamer ; le chasseur s’assied dans le canot, sous les herbes ou les branches, appuie le canon de son fusil sur la pince du canot et laisse manœuvrer son compagnon, qui se dissimule, lui aussi, dans l’arrière partie de l’embarcation ; de cette sorte, le canot fait l’approche et le chasseur, avec sa grande canardière chargée de gros plomb, d’un seul coup de fusil, abat plusieurs gros gibiers ; mais, avant de te lire « les dix commandements du Chasseur » que je t’ai promis, et que je te prie de graver dans ta mémoire, je vais te raconter