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Page:Le Bidois - La Vie dans la tragédie de Racine, 1922, 4e éd.djvu/276

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LA STRUCTURE ET LE STYLE

tragédie, celui d’où dépend la constitution du drame et son succès. Il est évident que tout aboutit là, et que c’est une pièce capitale. Mais, tandis que chez Corneille le cinquième acte est souvent aux autres dans une relation de cause à effet, chez Racine, il n’est qu’un dernier effet ou proprement un terme.

On conçoit très bien que, dans le système de Corneille fondé sur l’admiration, il s’agisse avant tout de tenir longtemps en haleine l’esprit du spectateur, et de réserver les coups les plus forts pour le dénouement. A trop avancer au contraire dans l’intérieur du drame ces miracles du vouloir qui sont sa matière favorite, il lui deviendrait difficile de maintenir le reste de sa pièce à une hauteur suffisante ; l’intérêt aurait plus de chance de faiblir que d’augmenter. Il échappe à ce péril, dans le Cid et dans Polyeucte, par un prodige d’imagination pathétique ; mais de telles prouesses ne sont qu’une hasardeuse exception, qu’un bonheur du génie. L’auteur d’Horace s’en aperçoit bien ; il nous en fait apercevoir aussi : combien son dernier acte le cède aux autres en beauté ! Aussi, dès Cinna, se range-t-il à la formule qui tendra bientôt à régir ses tragédies. L’action essentielle et qui donne son nom à la pièce, l’héroïque triomphe de « la clémence d’Auguste », est repoussé jusqu’au cinquième acte. Tout le reste n’est plus qu’un acheminement — un peu lent parfois — à cet événement décisif. Telle la constitution de Cinna, telle aussi, la plupart du temps, celle de