Page:Le Bon - Lois psychologiques de l’évolution des peuples.djvu/44

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idées qui précèdent sur la différenciation des individus et des races, et pour la justification desquelles je n’ai invoqué ici que des raisons psychologiques. Les deux ordres d’observation conduisant aux mêmes résultats, je me permettrai de rappeler quelques-unes des conclusions de mon premier travail. Elles résultent de mensurations exécutées sur plusieurs milliers de crânes anciens et modernes appartenant à des races diverses. En voici les parties les plus essentielles :

Le volume du crâne est en rapport étroit avec l’intelligence, lorsque, laissant de côté les cas individuels, on opère sur des séries. On constate alors que ce qui distingue les races inférieures des races supérieures, ce ne sont pas de faibles variations dans la capacité moyenne de leur crâne, mais bien ce fait essentiel que la race supérieure contient un certain nombre d’individus au cerveau très développé, alors que la race inférieure n’en contient pas. Ce n’est donc pas par les foules, mais bien par le nombre de ceux qui s’en distinguent, que les races diffèrent. D’un peuple à l’autre, la différence moyenne du crâne – sauf quand on considère les races tout à fait inférieures – n’est jamais bien considérable. En comparant les crânes des diverses races humaines, dans le présent et dans le passé, on voit que les races dont le volume du crâne présente les plus grandes variations individuelles sont les races les plus élevées en civilisation et qu’à mesure qu’une race se civilise, les crânes des individus qui la composent se différencient de plus en plus. Il en résulte que ce n’est pas vers l’égalité intellectuelle que la civilisation nous conduit, mais vers une inégalité toujours plus profonde. L’égalité anatomique et physiologique n’existe qu’entre individus de races tout à fait inférieures. Entre les membres d’une tribu sauvage, tous adonnés aux mêmes occupations, la différence est forcément minime. Entre le paysan, qui n’a que trois cent mots dans son vocabulaire, et le savant, qui en a cent mille avec les idées correspondantes, la différence est, au contraire, gigantesque. La différenciation entre individus produite par le développement de la civilisation se manifeste également entre les sexes. Chez les peuples inférieurs ou dans les couches inférieures des peuples supérieurs, l’homme et la femme sont intellectuellement fort voisins. A mesure au contraire que les peuples se civilisent, les sexes tendent de plus en plus à se différencier. Le volume du crâne de l’homme et de la femme, même quand on compare uniquement, comme je l’ai fait, des sujets d’âge égal, de taille égale et de poids égal, présente des différences très rapidement croissantes avec le degré de civilisation. Faibles dans les races inférieures, ces différences deviennent immenses dans les races supérieures.

(1) Dr Gustave Le Bon. Recherches anatomiques et mathématiques sur les variations de volume du cerveau et sur leurs relations avec l’intelligence. In-8" ,1879. Mémoire couronné par l’Académie des Sciences et par la Socité d’anthropologie.