Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/160

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savant éminent, M. Armand Gautier, avait montré les conséquences de cette surcharge.

… Une même quantité de travail ou de volonté appliquée à un ensemble de matières et de programmes de plus en plus variés et de plus en plus amples, produit, résultat inévitable, une médiocrité de plus en plus évidente sur chaque sujet, excepté sur celui ou sur ceux que l’élève préfère et conçoit bien. — Augmenter indéfiniment les programmes, c’est effrayer les timides, les faibles, les moyens ; c’est créer logiquement la médiocrité générale et le superficialisme ; c’est habituer l’enfant à savoir en vue de l’examen et par une série d’artifices qui ne laissent presque rien dans l’esprit passé le jour de l’épreuve ; c’est tendre à développer la mémoire aux dépens de l’intelligence et du jugement ; c’est faire du plaqué qui ait un jour, une heure au moins, l’aspect de l’or solide et pur.

Je suis donc de l’avis de la plupart de mes collègues, de MM. Rochard et Hardy en particulier, lorsqu’ils demandent qu’on simplifie les épreuves du baccalauréat. Je suis plus de cet avis qu’eux-mêmes, car, sans regret, je verrais disparaître cet examen, principale cause, sous sa forme actuelle, de notre surmenage scolaire, du travail en vue du diplôme, de ce cauchemar incessant des dernières années passées au lycée : la préparation au bachot ! mot bien trouvé dans son enveloppe méprisante pour caractériser un résultat méprisable en lui-même. Si cette épreuve n’est pas prise au sérieux par l’élève qui n’y voit qu’un bon débarras, par le maître qui la présente comme une amère pilule qu’il faut bien une fois avaler ; par l’examinateur enfin, qui se sent de plus en plus disposé à faiblir devant cette générale médiocrité[1].

La nécessité de réduire les programmes a été signalée également devant la Commission d’enquête.

Si l’on consentait à réformer les programmes, il faudrait prendre le contre-pied des programmes actuels : se contenter de ce qu’il est possible de demander, mais le demander à fond : remettre l’esprit scientifique en honneur à la place de l’esprit d’érudition[2].

On ne saurait mieux dire, mais une telle réduction des programmes semble peu réalisable aujourd’hui

  1. Armand Gautier, professeur à la Faculté de Médecine. (Communication faite à l’Académie de Médecine, le 26 juillet 1887.)
  2. Enquête, t. II, p. 32. Lippmann, professeur à la Sorbonne.