Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/262

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La véritable force de l’Angleterre, ce n’est pas seulement la valeur de l’éducation donnée à ses fils, ce n’est pas sa richesse, ce ne sont pas ses flottes innombrables, c’est, avant tout et au-dessus de tout la puissance considérable de son idéal moral. Elle a des traditions stables et respectées, des chefs obéis et dont l’autorité n’est jamais contestée. Elle possède un Dieu national, synthèse des aspirations, de l’énergie et des besoins de la race qui l’a créé. L’antique Jéhovah de la Bible est devenu depuis longtemps un Dieu exclusivement anglais, gouvernant le monde au profit de l’Angleterre, et donnant pour base au droit et à la justice les intérêts anglais. Les autres peuples ne représentent qu’une masse confuse d’êtres inférieurs, destinés à devenir tributaires de la puissance britannique. En essayant de soumettre les peuples lointains à leurs lois, les Anglais sont persuadés qu’ils ne font qu’accomplir leur divine mission de civiliser le monde et le sortir de l’erreur. Les Arabes, eux aussi, croyaient obéir à la volonté du Dieu de Mahomet, quand ils réussirent — grâce à cette croyance — à conquérir une partie du monde gréco-romain et à fonder un des plus vastes empires qu’ait connus l’histoire.

Le philosophe doit s’incliner devant de telles croyances, quand il voit la grandeur de leurs effets. Elles font partie des forces de la nature, et vainement essaierait-on de les combattre.

C’est en dehors des sphères de la raison que naissent et meurent les traditions et les croyances. Quand la discussion semble provoquer leur chute, elles étaient déjà bien ébranlées. Aujourd’hui, rien de ce qui touche à l’idéal anglais n’est discuté ni discutable