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— J’entends qu’on sale mes aliments !

— Abolissez donc la gabelle.

— Je ne le puis. J’ai juré d’aider à la maintenir, tant que je vivrai.

— Tant que vous vivrez ?

— Certes.

— Oh ! bien, ce ne sera donc pas pour longtemps ! fit la duchesse Anne, et, prenant sur la table un couteau à lame effilée, elle le plongea dans le cœur de son mari. Puis elle ordonna à un de ses domestiques d’aller annoncer partout que la Gabelle était morte.

Les nobles protestèrent :

— Votre mari, dirent-ils, avait cependant juré de maintenir la gabelle, tant qu’il vivrait.

— Oui, répondit la duchesse Anne, mais il est mort, et avec lui nous allons enterrer la Gabelle.

Depuis lors, en effet, on n’a plus jamais entendu parler de ce fléau du monde.


(Conté par Anna Drutot. — Pédernec, 1888.)



XV


La Peste (ar Vossenn) est boiteuse. Cela ne l’empêche pas d’aller aussi vite que le vent. Seulement elle ne peut pas sauter les rivières. Elle n’a d’autre moyen de les franchir que de se faire porter sur le dos de quelque brave homme trop complaisant.

Un vieux, de Plestin, la rencontra un soir sur les bords du Douron. Elle était assise sur la berge, regar-