Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et, quand le douzième coup eut sonné, les chandelles qui brûlaient auprès du lit du mort s’éteignirent comme d’elles-mêmes.

Il ne se trouva pas un dans l’assistance pour oser les rallumer ; en sorte que le cadavre demeura dans une obscurité profonde. On entendait par instants claquer les draps au vent de la porte ouverte, comme si c’eussent été les toiles d’une lessive étendue en plein air sur l’herbe des prés.

De minuit jusqu’à l’aube, les gens qui veillaient n’échangèrent pas une parole. Et plus une prière ne fut récitée. On se tenait rencognés les uns contre les autres, éclairés seulement par la braise du foyer et par la fumeuse lueur du lutic, de la chandelle de résine. On tâchait, avec les mains, de se boucher les oreilles et les yeux, et l’on attendait le jour avec impatience[1].


(Conté par Jeanne-Marie Corre, couturière. — Penvénan, 1888.)


Dès la mort, l’âme comparaît au tribunal de Dieu, pour y subir le jugement particulier. Mais, sitôt le jugement rendu, elle retourne sur le corps (non dedans), et elle reste là pendant toute la durée de l’enterrement, jusqu’après l’inhumation. En général, il n’est donné de la voir qu’au prêtre qui célèbre les fu-

  1. Cf. A. Orain, La veillée du mort, in Mélusine, t. IV, c. 44. [L. M.].