Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/339

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tendait à quelque distance, et les corbeaux, un moment effarouchés, achevèrent de dépecer en paix les restes mortels de Kadô Vraz. Fulupik eût encore volontiers invité son filleul, mais le pauvre petit être était mort dans l’intervalle…

Le jour de la noce arriva. Le nouveau marié, tout à son bonheur, n’avait d’yeux que pour sa jeune femme qui, sous sa coiffe de fine dentelle, était, il faut l’avouer, la plus jolie fille qu’on pût voir. Certes, Fulup ne pensait plus à Kadô. Au reste, n’avait-il pas mis sa conscience en règle de ce côté là ?… Donc, la fête allait bon train. Les mets étaient succulents. Le cidre dans les verres avait une belle couleur d’or jaune. Les invités commençaient à bavarder bruyamment. Déjà on portait les santés et Fulupik s’apprêtait à répondre à ses hôtes, quand tout à coup, en face de lui, il vit se lever un bras de squelette, tandis qu’une voix sinistre ricanait :

— À mon meilleur ami !

Horreur ! à la place qui lui avait été réservée, le fantôme de Kadô Vraz était assis.

Le marié devint pâle. Son verre lui tomba des mains et se brisa sur la nappe en mille morceaux.

Margaïdik, la jeune épousée, était, elle aussi, plus blanche que cire.

Un silence pénible se fit dans toute la salle.

L’aubergiste, surpris de voir qu’on ne mangeait ni ne buvait plus, bougonna d’un ton mécontent :

— Libre à vous ! Mais les choses sont préparées. Ce qui n’aura pas été consommé sera payé tout de même.