Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/411

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— Il faut mourir ! se dit Jean ; et, en attendant d’être englouti, il se mit à réciter une courte prière.

En ce moment, une haute vague le souleva.

Il jeta autour de lui, sur la grande mer, le regard désolé de ceux qui sombrent.

Et voici qu’il vit venir vers lui, marchant sur les flots, la silhouette d’un homme. Et l’homme lui dit, d’une voix douce :

— Ne sois plus navré, mon pauvre Jean ! S’il y a des gens qui trahissent, il y en d’autres qui se souviennent.

— Comment ne serais-je pas navré ? Je n’embrasserai plus ni ma marraine, ni ma femme, ni mon fils ! Je leur avais promis, en les quittant, que ce voyage serait le dernier. Je ne croyais pas si bien dire !

— Prends courage ! Je viens pour te sauver.

L’homme surnaturel tendit la main à Jean Carré.

— Monte sur mon dos, dit-il.

Jean Carré obéit.

L’homme se mit de nouveau à marcher sur la mer. Il cheminait dans le creux des vagues, comme un laboureur dans un sillon.

Il emporta ainsi Jean Carré jusqu’à une île rocheuse, mais verte, dont nul capitaine n’avait jamais eu connaissance. Il l’y déposa à l’ombre d’un arbre de palmes.

— Là, camarade, lui dit-il. Ce que tu as de mieux à faire pour le moment, c’est de sécher tes habits. Vois, le soleil est chaud. Dans une heure ou deux tu n’auras plus un fil de mouillé, et tu auras pris quelque repos, Nous continuerons alors notre route.