Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/455

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— Je ne puis, je suis suspendu à mon clou, répondit le trépied.

— Viens alors, toi, balai !

— Je ne puis, on m’a mis la tête en bas.

— Viens alors, toi, eau des pieds !

— Hélas ! regarde-moi, je ne suis plus que quelques éclaboussures sur les marches du seuil.

Le grand vent tomba aussitôt. Fanta Lezoualc’h entendit la voix furieuse qui s’éloignait en grommelant :

— La « mauvaise pièce » ! Elle peut se féliciter d’avoir trouvé plus savant qu’elle pour lui faire la leçon[1] !


(Conté par Créac’h. — Plougastel-Daoulas, octobre 1890.)
  1. Cf. E. Souvestre : Le Foyer Breton (1845), p. 69 ; R. F. Le Men, loc. cit., p. 421 ; P. Sébillot : Littérature orale de la Haute-Bretagne, p. 202 ; Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne. I, p. 229 et 248-52. Le Men raconte que ces femmes de nuit sont « des lavandières, qui pendant leur vie, ont, par négligence ou par avarice, gâté le linge ou les vêtements de pauvres gens, qui avaient à peine de quoi se vêtir, en les frottant avec des pierres, pour économiser leur savon. » E. Souvestre et P. Sébillot, comme Le Men, parlent des lavandières de nuit, comme d’âmes pécheresses qui lavent ainsi la nuit des linges mystérieux en châtiment de leurs fautes. Il semble que dans ce conte au contraire, le caractère humain de la lavandière de nuit tende à s’effacer, et qu’elle devienne comme le Hopper-noz, comme Iannik-an-Nod une sorte d’esprit malfaisant qui n’a jamais été incarné au corps d’un vivant. Ces transformations d’âmes en esprits ne sont point au reste un fait très rare. On retrouve les lavandières de nuit en plusieurs provinces de France. Je me souviens d’avoir, lorsque j’étais enfant,