— « Hors de céans, ou je vous chasserai, en lâchant sur vous le grand chien ! »
Elle se laisse entraîner par sa colère, — elle lâche le chien, aussitôt dit. — Mais la bête ne fait aucun mal au pauvre ; — elle ne fait que le flairer.
Et le pauvre de soupirer ; — et le cœur de lui manquer, — en se voyant ainsi abandonné, — sans personne qui lui vienne en aide.
Du seuil de la maison il partit, — devant la porte de la cour il mourut. — Deux chiens étaient à ses côtés, — chose mystérieuse à comprendre !
Avec le chien qui avait été lâché, — un autre était survenu, — et il se tenait près du pauvre, lui faisant mille joies, — sans toucher à lui, en aucune sorte.
Quand rentrèrent les gens de la maison, pour le repas, — vieux et jeunes, tous furent étonnés — de trouver là cet homme, mort, — sans un seul chrétien pour le garder.
Devant la porte de la cour était resté — le corps du pauvre homme décédé ; — seuls les deux chiens veillaient à ses côtés. — C’était là une grande leçon !
Lorsque la femme eut connaissance de la chose, — elle se prit à pleurer, à se lamenter. — « Hélas ! c’est moi qui suis cause, dit-elle, — de ce malheur, de cet ennui !
« Le grand chien, c’est moi qui l’ai lâché !… — Et c’est lui qui l’aura étranglé !… — Et cela, parce qu’il demandait — un morceau de pain, au nom de Dieu ! »…
Il vint du monde voir le mort, — s’informer de ce qui lui était arrivé. — Il ne portait pas trace de blessure. — Peu après, il fut enseveli.
La femme, dans l’espoir d’expier — sa faute, sans regret, ni tristesse — donna pour l’enlinceuler — chemise, drap, à mettre avec lui dans la tombe.
À la nouvelle d’un malheur si grand, — il se fit nombreux concours de gens — pour le voir déposer en terre ; — et tous avaient navrement et ennui.
À Guinevez il fut envoyé — enterrer, avec tous les honneurs possibles. — Ce fut la femme qui paya les prêtres — pour célébrer le service et dire les prières d’usage.