Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/69

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reur. Il est dangereux d’être en trop fréquente et trop intime communication avec les âmes qui peuplent l’autre monde ; il est dangereux même d’en savoir trop sur l’autre vie ; ceux qui reçoivent du pays des morts de trop fréquents messages sont déjà marqués pour être la proie de l’Ankou. Il n’est point rare que ceux qui ont reçu quelqu’une de ces étranges révélations meurent eux-mêmes au bout de quelques semaines ou de quelques mois.

On dirait que de ce pays lointain qu’elles habitent les âmes tirent à elles les vivants et que lorsqu’elles viennent parmi les hommes elles les enchantent et les charment et les emmènent captifs jusque dans leur silencieuse demeure. Tous ceux qui ont été mêlés à quelqu’une de ces scènes étranges, qui précèdent parfois la mort, à ces cérémonies mystérieuses qu’accomplissent les âmes auprès de ceux qui vont mourir perdent à jamais la gaieté, la joie insouciante qui s’exhale en chansons ; ils restent graves, ensevelis en un rêve dont rien ne les peut éveiller ; c’est encore sur la terre des hommes qu’ils marchent, ils mangent et boivent comme les autres hommes ; comme les autres ils conduisent la barque et la charrue, mais ce ne sont déjà plus des vivants.

Nous sommes là en présence de conceptions très