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Page:Le Coran (Traduction de Savary, vol. 1), 1821.pdf/77

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DE LA VIE DE MAHOMET.

En passant près de Beder, on lui montra la fosse où les chefs des Coreïshites avaient été jetés. Otba et Shaïba, ses neveux, étaient de ce nombre[1]. À cette vue, Ommia mit pied à terre, coupa les oreilles de son chameau, et chanta une longue élégie dont Abul-Feda nous a conservé les vers suivans :

N’ai-je pas assez pleuré sur les nobles fils des princes de la Mecque ?

A la vue de leurs os brisés, semblable à la tourterelle cachée dans la forêt profonde, j’ai rempli l’air de mes gémissemens.

Mères infortunées, le front prosterné contre terre, mêlez vos soupirs à mes pleurs.

Et vous, femmes qui suivez les convois, chantez des hymnes funèbres entre-coupées de longs sanglots.

Que sont devenus à Beder les princes du peuple, les chefs des tribus ?

Le vieux et le jeune guerrier y sont couchés nus et sans vie.

Combien la Mecque aura changé de face !

Ces plaines désolées, ces déserts sauvages semblent eux-mêmes partager ma douleur.

Après avoir prononcé ces mots, Ommia s’abandonnant aux excès de la douleur et du désespoir, tomba mort sur les cadavres qu’il voyait entassés[2].

( Depuis la chute d’Adam, suivant Abul-Feda. 6218. — Depuis la naissance de J.-C. 633. — Avant l’hégire. 3. — De Mahomet. 55. )

La troisième année de l’hégire, Fatime donna un fils à


  1. Abul-Feda, Vie de Mahomet, p. 63.
  2. Les Arabes nés sous un ciel brûlant sont extrêmes en tout. Ils aiment ou haïssent avec passion. En 1778, pendant que j’étais en Égypte, une femme arabe ayant appris la maladie d’un fils qu’elle avait à Damiette, fit trente lieues pour le venir voir. En débarquant, elle demanda des nouvelles de son fils, on lui dit qu’il était mort. L’infortunée se précipita dans le Nil.