Page:Le Degré des âges du plaisir, suivi de L’École des filles, 1863, T1.djvu/69

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toutes les sociétés où je me trouvais, où madame L’Élu, madame la lieutenante-générale, toujours guindées sur le ton grave et compassées, m’escroquaient au jeu mon argent et ne me permettaient pas seulement de leur baiser le bout du doigt ? Il y avait de quoi périr d’ennui en attendant quelques bonnes affaires, et j’y aurais succombé sans doute si le ciel n’eut amené dans notre ville une troupe de comédiens errants qui s’y fixèrent, et du moment que cette vermine qui court de villes en villes, de bourgades en bourgades, s’est établie dans un endroit quelconque, les mâles de cet assemblage burlesque et ridicule courent au café militaire, s’il y a garnison, et là ils s’étendent richement et avec emphase sur la composition de la bande, vantant adroitement les charmes de leurs compagnes, leur complaisance, leurs agréments. Qu’on ne croie pas qu’ils fassent étalage de leurs talents et de leurs vertus ; ils savent très-bien que c’est là le moindre objet où s’arrêtent des officiers, et qu’il n’y a pas de quoi faire bouillir la marmite une heure après leur arrivée. Tout le corps d’officiers sut par ces histrions vagabonds qu’il y avait du danger à s’approximer avec celle qui jouait les reines, attendu que la majeure