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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

mais dans une chambre familière où elle venait de passer la nuit après une longue absence.

Quand elle ouvrit la porte, il était dans la lande, immobile, le regard sur la maison. Elle fut contente qu’il eût compris qu’elle irait avec lui.

Une brume épaisse couvrait la péninsule. On ne voyait rien devant soi. Ils composaient à eux deux le monde. La mer com­mençait à descendre et le bateau était au sec.

Grand-Louis lui commanda d’embarquer et fit glisser, en la poussant des deux bras, l’embarcation jusqu’à l’eau, sans effort ap­parent.

Il connaissait heureusement les passes ; sans cela, ils eussent échoué, condamnés à rester prisonniers des vases jusqu’à la marée montante. Elle n’ignorait pas le risque. Mais à le voir ramer de son air tranquille, les yeux sur les sillons à peine marqués des chenaux, elle se rassurait. Cette maîtrise nouvelle qui était sienne lui fit plaisir. Les rôles étaient changés. Elle devenait la pas­sagère docile.

La côte disparut aussitôt. À peine si une sorte de bourrelet grisâtre indiquait les terres qu’on laissait derrière soi, et les