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Page:Le Maistre - Les Œuvres de C. Tacite, 1636.pdf/26

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ANNALES,

fils, moururent tous deux en peu de temps : Lucius allant aux armées Morts ſoupçonnées.d’Eſpagne, l’autre reuenant d’Armenie, affoibly & languiſſant d’vne que bleſſeure. Et toutesfois, leur mort vn peu ſoudaine, ſoit qu’elle fut naturelle, ou auancée par l’artifice de leur maraſtre Liuia. Et comme Druſus eſtoit auſſi mort quelque temps parauant, il ne reſtoit plus à Auguſte, Tibere Neron.que Neron des enfans de ſa femme. Toutes choſes penchoient donc de ce colté. Il ſe fait voir par les armées, comme fils d’Auguſte, & Collegue de l’Empire : & plus receu conjointement auec luy, en la charge du Tribunat, par les pourſuittes de ſa mere bien apparentes, & non par menées & pratiques ſecrettes comme parauant. Car elle auoit tellement gaigné le bon homme Auguſte, qu’elle luy auoit fait releguer en l’Ile de Planaſie, vn ſeul petit fils Poſthume, qu’il auoit encore d’Agrippa : groſſier & mal adroit au maniement des affaires, mais non blaſmé d’aucun crime. Donner au contraire à Germanicus fils de Drufus, le commandement general de huict legions, és pays d’alentour le Rhein, & le faire adopter par Tibere, nonobſtant qu’il auoit defia vn ieune fils, afin par ce moyen d’augmenter ainſi le nombre de ſes appuys. Adonc n’y auoit plus nulle guerre, ſinon contre les Allemans, & non tant pour amplifier ou accroi ftre la grandeur de l’Empire, que pour effacer l’ignominie de la perte Ceux qui auoient d’vne armée, auec Quintilius Varus. La ville de Rome eftoit donc en publique, tous paix, & ſans bruit : les noms des Magiſtrats non changés, toute la ieuneſſe peu voir la Redecedés.

née depuis la victoire Actiaque : & mefme la meilleure partie des plus vieux n’eftoient que depuis les guerres ciuiles commencées : Combien peu y en auoit-il de reſte, quieuffent veu la Republique ? A ET toutesfois l’Eſtat de la Cité fi changé, qu’il n’y paroiffoit plustra ce quelconque de l’ancienne liberté. Il n’y auoit plus d’égalité, & depen doient toutes choſes de la feule volonté & commandement d’vn Prince : fans crainte neantmoins, tant qu’Augufte ſembla auoir aſſez de difpofi tion, pour ſe maintenir auec fa maiſon, & conferuer la paix. Mais depuis que venant fur l’aage, il commença de s’appeſantir, & affoiblir i fur få firi Mouvemens fur qui approchoit, on ſe mità baltir de nouuelles efperances, & ſemer vai la vieilleſſe

bere. nement diuers propos du bien de la liberté. Plufieurs craignoient la guerd’Auguste. re,

autres la defiroient & tous publioient librement leurs aduis, de leurs Divers propos de Seigneurs qui deuoient eftre. Que Agrippa eftoit de fauuage humeur, plein de peuple. fureur & de paßion, à cause de l’ignominie qu’il auoit receue : incapable pour re gir manier vn ſi grand eſtat : homme ieune, de peu d’experience. Que Tibe Qualités de Ti— re au contraire, eftoit en maturité d’aage, auoit faitles prennes de fa valeur au fait des armes, mais qu’il auoir cet orgueil ancien & naturel, de la maiſon Clan diane, & ſe manifeftoient en luy pluſieurs ſignes de cruauté, quelque peine qu’il mift à les couurir. Que dés le berceau il auoit eſté nourry, en vne maison qui aymoit à regner, des ſa ieuneſſe, auoir eu pluſieurs Conſulats, Triomphes Meditations en ſon exil.l’vn ſur l’autre. Que à Rhodes y couurant ſon exil d’vne retraitte volontaire, il n’y auoit eu autres meditations, que de vengeance & ſimulation, & de ſes paillardiſes & ſecrettes voluptés. Dauantage, que ſa mere auoir cette impuiſſance naturelle de ſon ſexe de commander fort peu à ſes paßions : à laquelle il faudroit ſeruir,

Le Pofthume Agrippa.

Appuys recherchés. " IV,