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256 LE NIVERNOIS

pour modèles, et, comme eux, il passait sa vie entière il fouiller profondément son œuvre et à la ciseler avec amour. Sans études, avec un talent né d’hier et improvisé en quelque sorte, il a semé dans ce livre une multitude de gracieuses petites vignettes qui en sont le plus bel ornement, et qui toutes (pourquoi ne pas le dlre ?) sont de véritables chefs-d’œuvre de finesse et de pureté. Dieu le salt ; le temps peut-être allait faire un grand artiste de ce pauvre jeune bomme que le sommeil de la mort vient de saisir au milieu de ses travaux Inachevés, de ses rêves de gloire et de ses projets interrompus. En voyant ainsi descendre dans la tombe tant de forces, tant de jeunesse et d’avenir, tandis qu’il semble être donné à toutes les existences inutiles de s’achever, on se sent pris d’amer découragement et de tristesses profondes. Pauvre artiste Inconnu, mort avant l’heure de l’illumination et de la renommée, tu ne vis plus que dans le cœur de tes amis ! Hélas ! que ne peuvent-ils, comme faisaient les glorieux artistes des temps passés à ceux de leurs compagnons que la mort couchait trop tôt dans le sépulcre, t’édifier un de ces monuments, étincelants et splendides, qui étaient, à la fois, la gloire de ceux à qui on les élevait et de ceux qui les avaient construits ?

J.-N. MORELLET.


FIN.