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enthousiasme

Quatorze cents milles de chemin de fer, pour se familiariser dès ses premières sensations avec ce roulement qui deviendrait pour lui comme un élément naturel ? Depuis, cet enthousiasme — qui prit racine si tôt — est demeuré invincible. Vingt ans ont passé sans l’éteindre, sans l’amortir. À travers le temps et toutes les circonstances, s’est développée sans défaillance sa passion pour les chemins de fer. Aux autres d’adorer les avions, de chanter les navires, les camions, les autos. Louis serait toute sa vie fidèle aux trains. Louis toujours louerait leur utilité plus solide et plus pratique, utilité capable de vaincre plus de distances et plus d’intempéries avec des contenants d’une capacité plus grande que tous les autres moyens de locomotion.

Son amour est incorruptible. Quelqu’un veut-il l’offenser dans la famille ? Il n’a qu’à parler de faire un voyage en autobus ou d’envoyer un colis par camion au lieu d’utiliser le service des messageries de nos chemins de fer ! On jurerait que Louis en est actionnaire et que léser leurs droits, c’est le léser lui-même dans ses intérêts les plus sacrés.

Petit, quand il ne voyageait pas, il poussait des blocs chargés de marchandises imaginaires, ou de minuscules wagons dans tous les coins de la maison, en faisant : pouf ! pouf ! pouf ! tchou ! tchou ! tchou ! avec une patience et une ténacité sans limites. Quand il voyageait, il s’épanouissait comme fleur au soleil et sa joie et son extase pouvaient durer aussi longtemps que ce trajet vers Gaspé, fidèlement suivi chaque année. Dans les