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poilu

s’allongeaient les milles… Enfin, ils traversèrent le grand pont. Pierrot descendit de sa bicyclette pour encourager Poilu qui tirait de la patte, et ne suivait plus aussi aisément la vitesse des roues.

À l’abri du vent et de la pluie, sous le pont, avant de reprendre le boulevard Gouin, ils se reposèrent encore un peu, Puis, ils repartirent, l’un suivant l’autre. Tous les deux maintenant tiraient franchement de l’aile. Pierrot pédalait presque sans arrêt depuis cinq ou six heures. Il continuait à avancer, il fallait avancer ! et Poilu qui n’en pouvait plus continuait à avancer parce que Pierrot continuait à rouler… Le gamin, touchant le nez du chien, s’imagina qu’il était chaud, et tout de suite, il frappa à une maison pour avoir de l’eau pour sa bête. Il raconta son histoire. Il ne savait pas qu’il était touchant avec son amour pour Poilu et sa sollicitude, et il fut bien reconnaissant parce qu’on lui donna un beau morceau de tarte…

Il promit de revenir en passant, des fois, et tout regaillardi, reprit la route, et le vent et la pluie…

La fin du voyage fut un cauchemar. La route semblait de plus en plus longue, et le but de plus en plus éloigné… Le chien avait des yeux qui criaient grâce… Jamais Pierrot n’avait remarqué que le boulevard Décarie formait une telle côte. Mais enfin, ils n’eurent plus qu’à redescendre. Pierrot oubliait sa fatigue, le chien aussi, et un sursaut d’énergie les tira comme un moteur.

— Maman, man, crièrent les premiers qui les virent, voilà Pierrot et il a Poilu…