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enthousiasme

Je me réinstallais avec mon livre, tranquillement, quand j’entendis des cris. Me retournant, je vis Mousseline passer à l’épouvante et s’engager sur la voie ferrée, en route vers le village. Marie et Julianna couraient derrière. Pourtant sympathique à leur malheur, je les suivis en riant aux larmes, jusqu’à ce que j’aie pensé moi aussi que c’était l’heure du deuxième train de la journée. Au moment où j’envisageais, comme les autres, la possibilité d’un accident, j’aperçus Nazaire qui sautait au cou de la vache. Il était venu jusqu’au talus du chemin de fer pour chercher le fourrage de la litière, et il s’y trouvait juste à point.

Marie, pantelante, me dit :

— Je crois bien que je vais essayer de la revendre…

Mousseline rattachée, renfermée, donna deux petites pintes de lait et se remit à beugler.

Le lendemain, dimanche, Nazaire, qui ne venait pas d’habitude, avait dû accepter de revenir pour la traite. Comme il entendrait ensuite la messe dans la chapelle, cela ne le dérangerait pas plus, en somme, que d’aller jusqu’à l’église.

Mais allez-y voir ! Le lendemain, il pleuvait à boire debout — ce fut la seule pluie de tout l’été — il pleuvait à boire debout, et pas de Nazaire. La messe finie, Mousseline beuglait, et Nazaire ne paraissant toujours pas, Marie prit l’auto, même avant d’avoir déjeuné, et se rendit chez lui. Nazaire fut invisible. Une maladie diplomatique l’avait fait souffrir toute la nuit. Il ne pouvait pas se lever. Marie serait revenue bredouille, si elle