Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/158

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II


Dame la Paix n’est plus. Un jour de cet automne,
La chasse m’y portant, je monte, & je m’étonne
De ne pas voir le pâtre aux champs, l’homme au labour,
La servante au lavoir, le chien au seuil, personne
A l’étable, au fenil, au four.

Dans la cour grande ouverte, à terre éparpillées
Gisaient, fumier déjà, des javelles souillées ;
L’auge n’avait pas d’eau ; la crèche était sans foin ;
Les râteaux édentés, les faucilles rouillées,
Se cachaient, honteux, dans un coin.

Quelques poules sans coq disputaient d’une paille ;
Un bœuf maigre aiguisait sa corne à la muraille ;
Un âne en liberté se demandait conseil ;
L’abeille, sans abri qu’un chaume qui s’éraille,
Se traînait mourante au soleil.

Le désarroi régnait partout. Les plates-bandes
S’effaçaient au jardin sous les herbes gourmandes ;
L’ortie envahissait la vigne & les fraisiers ;
Et la ronce courait, de ses folles guirlandes
Étranglant jasmins & rosiers.